Metal Gear Solid 4 : Guns of the Patriots est un jeu vidéo PlayStation 3 publié en 2008 .

  • 2008
  • Action

Test du jeu vidéo Metal Gear Solid 4 : Guns of the Patriots

3.5/5 — Très bien par

Ouais je sais, mettre un 7 à un chef d’œuvre quand, comme moi, on met parfois des 10 à des âneries, c’est méchant. Mais concernant MGS 4, je me sens d’autant plus obligé d’être sévère que je suis un vieux fan et que cet épisode, plus ou moins conçu pour les fans et rien que pour eux, ne m’a pas entièrement séduit.

Mais bon, si vous le permettez je vais m’expliquer, hein.

MAMAN, C’EST QUOI METAL GEAR SOLID ?

Oui, je ferai un peu l’impasse sur les épisodes annexes à la série « SOLID », bien qu’ils soient pour l’essentiel très bien pris en compte par ce dernier opus (quid de l’excellent épisode Gameboy Color tout de même… MAIS C’EST QUOI LA GAMEBOY DÉJÀ ? JAMAIS ENTENDU PARLER, ÇA COMPTE PAS).

Metal Gear Solid est une série de jeux d’infiltration se déroulant dans un univers légèrement uchronique (enfin une réalité alternative très proche de la notre mais fantaisiste sous tout un tas de rapports quoi), suivant les tribulations de l’agent Solid Snake (et de son père dans l’épisode 3) qui, avec bien d’autres des protagonistes très charismatiques de la série, est impliqué depuis des décennies dans une grande lutte de pouvoir et des complots secrets mettant en péril la terre entière.

Le fil rouge traversant toute la série (mais perdant de son souffle dans le dernier opus) n’est autre que l’arme de destruction massive « Metal Gear » (d’où le titre), un tank bipède (un mecha en gros) capable de lancer des bombes atomiques depuis n’importe quel point du globe, et qui de ce fait est particulièrement convoité par les vilains en tout genre.

Il serait long et inutile de rentrer dans les détails d’une intrigue démesurément complexe et merveilleusement mise en scène, où les liens qui unissent les personnages et où les idéaux qui les poussent dans leurs luttes sans fins forment un puzzle titanesque et passionnant qui trouve ici son dénouement.

Voilà tout le problème : MGS 4 reprend tellement toutes les pistes que ses prédécesseurs ont ouvertes, et s’applique tant à les refermer les unes après les autres, que l’aventure ne ressemble pratiquement plus qu’à un épilogue infernal étalé sur plusieurs heures, dont très peu sont véritablement jouables.

Il y a toujours eu de sacrés morceaux de bravoure dans la série, des audaces de mise en scène et de gameplay qui ont fait le succès de ce qui (à mon sens) constitue les vrais premiers « films interactifs » du monde du jeu vidéo. Évidemment les exemples de jeux « cinématographiques » précédant MGS seraient légion, mais très peu s’approchent autant du modèle sans vendre dans la foulée leur âme vidéoludique au diable.

Du moins c’était le cas pour MGS 1, 2 et 3 qui restaient de vrais jeux vidéos. MGS 4, dans sa folie ubuesque autophage, pousse le carnage jusqu’à réduire les séquences jouables à un minimum syndical dont l’excellent Shadow of Memories, atteint de la même maladie, ne serait pas jaloux.

Pour autant, MGS 4 demeure une aventure palpitante et les séquences de jeu (pour peu qu’on ne les traverse pas en courant droit au but) se révèlent souvent riches et prenantes, mais plusieurs choses viennent gravement entacher le tableau.

MÉTAMORPHOSE DU GAMEPLAY

On aura beau saluer les efforts de renouveau du gameplay, il n’empêche que faire table rase d’une excellente base, voire même du concept de l’infiltration, pour une série comme MGS, ça fait très mal… et c’est plus ou moins ce qui a eu lieu ici.

La formule très (trop) bien rodée des épisodes 2, Twin Snakes et 3, avec ses finesses de gameplay ahurissantes, avait pris un coup de vieux quand, pour MGS 3, la caméra ne faisait plus son office.

Konami nous a donc rapidement offert une refonte avec une toute nouvelle caméra : MGS 3 SUBSISTANCE.

MGS 4, dans la directe lignée de cette version « améliorée » du 3, a donc également troqué l’ancienne caméra (certes périmée) pour une vue le condamnant presque à se changer en FPS.

Et qui dit changement de caméra dans un jeu pareil, dit aussi fatalement changement de gameplay.

Dans MGS 4 on ne se planque plus tel James Bond, dos contre un mur, pour ensuite glisser un oeil et tirer une fléchette sédative dans les fesses d’un garde distrait… ces actions sont encore possibles, mais elles sont devenues si inefficaces qu’on ressent un vrai désintérêt des programmeurs pour elles. Se coller au mur est devenu un calvaire, alors qu’il s’agissait d’une action fondamentale auparavant.

Ce n’est pas l’unique travers d’un jeu finalement assez bancal et très loin du soin apporté à ses prédécesseurs. Il n’est pas rare que l’on se perde un peu dans les maps, pourtant pas particulièrement vastes (et toujours assez vides). L’IA elle aussi a été en grande partie revue à la baisse, quand bien même elle culminait d’une façon redoutable dans l’épisode 2, hanté des soldats les plus tenaces et organisés de la série.

Notons aussi la quasi absence de communications via codec… on rigolera bien avec le secret permettant d’agiter la poitrine de la belle Rosemary pendant les communications (hum hum, si seulement c’était une plaisanterie) et sur quelques dialogues facultatifs bien salés, mais comparé aux conversations hilarantes avec Sigint et Zero dans MGS3 et certains tips de Master Miller dans MGS1, tout cela semble encore une fois bien terne.

L’approche complètement différente rend obsolète nombre des mécanismes de la série et dénature complètement cet épisode, finalement trop distant des autres pour ne pas être vu d’un œil au moins UN PEU grognon.

Si les gadgets restent très nombreux, peu d’entre eux se révèlent utiles. Il en va de même pour les armes que l’ont essayera plus par coquetterie qu’autre chose, sans parler du système de munitions achetables où que l’on se trouve et qui empêche littéralement d’être dans la dèche de bastos. Seules les vies restent difficiles à se procurer, mais du reste un joueur flemmard aura tôt fait de préférer s’acheter plein de balles de mitrailleuse plutôt que de s’emmerder avec des équipements plus subtils (et c’est dommage car elles sont nombreuses, les armes intéressantes, dans ce petit MGS).

Les quelques premiers niveaux du jeu sont d’une qualité nettement supérieure aux suivants, très linéaires et mous … ils laissent présager du meilleur mais on déchante vite tant les niveaux passables voir anecdotiques qui suivent se révèlent malheureusement largement majoritaires.

Après quelques heures de batailles intenses dignes d’un jeu online (le soft aurait dû être intégralement comme ça) l’action, cherchant inutilement la variété se rabat sur des filatures, des boss, des scènes de voiture ou de moto et quelques passages décousus ne parvenant jamais à avoir l’aura des vastes environnements peuplés de gardes aux aguets et de caméras de surveillance des opus précédents. On ne se sent pas dans Metal Gear mais dans BAYOU BILLIE, où un petit stage de bagnole succède à un stage de baston suivi d’un stage au revolver…

La liberté d’action, malgré un gameplay inventif, prend donc un sacré coup sauf dans de très rares morceaux de bravoure où soudain, le jeu d’espionnage d’antan semble reparaître (pour disparaître aussitôt derrière d’interminables cinématiques).

LE JEU QUI SE PRENAIT POUR UN FILM (ce dernier se prenant lui-même pour un jeu)

La performance finale de la cut scene géante de près d’une heure (1H30 paraît-il, mais je ne l’ai pas perçue comme ça) démoralise et ennuie plus qu’elle n’excite le gamer en quête de nouvelles sensations. Les cinématiques auront beau se révéler d’une splendeur invraisemblable et profiter de qualités vidéo ludiques pour se démarquer des possibilités offertes par le média imité (le ciné) et proposer une expérience audio-visuelle unique en son genre (au jour d’aujourd’hui), il n’en demeurera pas moins que ce pastiche de cinéma sauce jeux vidéo ne fonctionne pas tout à fait.

Qui ne se sera pas exclamé « QUAND EST-C’QU’ON JOUE ? » devant ces scènes sans fin, avant de grogner à nouveau en se voyant interrompu pour une demi-heure après même pas 10 minutes d’un jeu dont les séquences jouables vont sur le déclin en avançant (à l’exception d’un sursaut ludique génial avec le boss « la rage » et du combat final à mains nues, complètement délirant).

Restera alors un bon film merveilleusement joué et mis en scène, profitant du jeu vidéo pour dilater sa durée et tester des effets excellents d’intégrations de véritables vidéos (l’intro zapping est fabuleuse), de champs/contre-champs interactifs, de split-screens et autres astuces géniales. Un film au scénario tiré par les cheveux et éprouvant pour les méninges (que les petits nouveaux ne comprendront pas), avec de nombreuses allusions aux épisodes précédents, un mode online plus intéressant et riche que le jeu lui-même (dont il reprend allègrement les meilleurs maps) et un goût amer dans la bouche en pensant à ce qu’aurait pu être ce dernier opus, avant le renouveau annoncé de la série allégée de la quasi intégralité de ses protagonistes.

Au rayon des secrets et des petites astuces facultatives en tout genre, on notera tout de même pas mal de petits gags comme il y en a toujours eus, et qui font le charme de la série ; MGS demeure un jeu plaisant à explorer À FOND pour profiter de la multitude de gadgets et de bonus dissimulés un peu partout. La rejouabilité et son mode online le sauvent peut-être… je n’ai pas vraiment eu le temps d’approfondir ça.

Rapidement, j’achèverai en évoquant l’aspect technique. Permettez-moi de ne pas trop rentrer dans les détails, MGS 4 comme ses ancêtres est un jeu superbe techniquement ; sa bande-son est également superbe… bref… tout ce qui sert au spectacle filmique brille d’une manière presque arrogante à côté de toutes les approximations ludiques que contient le jeu.

Alors MGS 4, une fin de série bâclée ?

N’exagérons rien, mais cet ultime épisode restera le point noir d’une saga grandiose (ça n’en fait bien entendu pas un mauvais jeu pour autant). J’y colle donc un 7, avec beaucoup de regrets pour un jeu dont on pouvait légitimement attendre beaucoup plus.

MAIS QUEL BON FILM TOUT DE MÊME !!!

Metal Gear Solid 4 : Guns of the Patriots