Développé par Chunsoft, édité par Enix.
Dès 1993, Enix comprend l’intérêt du spin-off, épisode annexe visant à maintenir la passion des fans entre deux épisodes de la série phare, en l’occurrence Dragon Quest. Seulement voilà : plutôt que de développer le jeu en interne, Enix confie le bébé à Chunsoft. Et mine de rien, ça fait toute la différence.
LA VÉRITÉ SI JE MENS !
Suite directe de Dragon Quest IV (sur NES puis porté sur PlayStation et DS) où apparaît pour la première fois Torneko Taloon, Torneko no Daibouken : Fushigi no Dungeon nous met dans la peau grassouillette du bedonnant marchand, apte à partir aux quatre coins du monde pour dénicher les plus rares des trésors, qu’il revendra bien entendu à prix d’or dans son échoppe, tenue par sa femme et son fils.
C’est qu’on a le sens des affaires dans la famille. Le titre fait donc l’apologie du mercantilisme à outrance, mais attention ! Torneko n’est pas qu’un simple échappé du Sentier, c’est aussi un aventurier digne d’Indiana Jones, qui ne recule devant aucun ennemi pour parvenir à ses fins.
LE SINGE ÉTAIT-IL VRAIMENT INDISPENSABLE ?
Avant d’être un épisode annexe de Dragon Quest, Torneko no Daibouken est avant tout un opus à part entière de la série des Fushigi no Dungeon. Dans cette saga de Chunsoft, divers héros traversent des dédales impressionnants dans ce qui s’apparente de toute évidence à un dungeon crawler, comme disent nos amis d’outre-Atlantique, ou Dungeon-RPG pour le reste du monde.
Pour cette première itération dédiée au personnage d’Enix, ce sont seulement deux donjons qui s’offrent à vous. Cependant, si le Donjon d’Entraînement ne comprend que dix niveaux, le Donjon Mystique en dispose de 99 ! Mieux encore, une fois l’aventure bouclée, vous débloquez le Donjon Bonus qui est encore plus terrible.
Terrible oui, car les niveaux sont générés de manière aléatoire : à chaque partie l’organisation des couloirs et des salles change, ainsi que l’emplacement des objets et des escaliers. Il y a un objet particulier à trouver dans chaque donjon pour compléter la quête, et lorsque vous l’avez trouvé il est nécessaire de repérer la sortie.
Tout ceci serait bel et bon sans une nuée d’ennemis prêts à vous assaillir au moindre pas. Les combats ne sont pas aléatoires : les adversaires (tous tirés des précédentes aventures « draquiennes ») sont visibles à l’écran, mais à moins que vous ne passiez dans leur dos sans éveiller leurs sens, vous ne pourrez les fuir puisqu’ils vous poursuivront sans relâche.
Les combats dans Torneko no Daibouken sont en faux temps réel, ou en tour par tour masqué, si vous préférez. Chaque pas que vous faites, chaque coup que vous donnez, est considéré comme une action, et il en va de même pour vos adversaires. Du coup, si vous frappez un ennemi (il faut qu’il soit à portée, donc sur l’une des huit « cases » qui vous entourent), cela sera considéré comme un tour. Ce sera donc à l’ennemi de vous agresser, puis à votre tour, puis au sien… Tout cela se complique bien évidemment lorsque plusieurs monstres vous entourent.
Ceci dit le système est simple à appréhender. Vous disposez d’un bouton d’attaque, et d’un autre permettant d’ouvrir le menu à n’importe quel moment (un dernier affiche la carte, tout du moins les portions que vous avez découvertes). Cela vous permettra par exemple d’utiliser un objet que vous avez ramassé précédemment.
Ainsi vous trouverez des armes et boucliers à équiper pour améliorer votre attaque et votre défense, des parchemins à utiliser pour activer un sort, des herbes médicinales à consommer pour vous soigner, des flèches pour frapper les ennemis à distance (gâchette L), et en l’absence d’arc, on peut déduire que Torneko se contente de les jeter sur l’adversaire. Mais aussi de la nourriture, parce qu’il faudra manger régulièrement, sous peine de souffrir d’une terrible anémie à même de pomper votre jauge d’énergie.
Déjà qu’elle est pas mal mise à partie, cette jauge… Eh bien oui : en plus des ennemis, on trouve aussi des pièges au sol, des trous qui vous font descendre d’un étage en vous blessant (ça peut être une solution alternative lorsqu’on ne trouve pas l’escalier pour descendre, mais c’est nettement plus emmerdant lorsqu’on remonte ; parce que oui, une fois arrivé en bas, il faut se retaper tout en sens inverse !), des culs-de-sac, de la lave… Sans oublier que les monstres, en plus de nous frapper, peuvent aussi nous paralyser, nous rendre fous, nous téléporter ou même nous tuer en un coup (faites très attention aux rochers) !
L’ennui dans l’histoire, c’est que si la jauge de vie tombe à zéro, les monstres nous virent manu militari (Manu qui ?) du donjon, charge à nous de tout reprendre à zéro ! Heureusement, à force de latter du streum, Torneko augmente en puissance, gravissant les paliers d’expérience comme Frison-Roche gravissait les montagnes alpines. Il devient donc plus puissant et résistant, indépendamment de son équipement.
À chaque donjon terminé, vous revenez automatiquement à votre magasin, lesté du poids de tous les objets ramassés. Et autant vous conservez vos niveaux d’expérience à mesure que vous avancez dans le jeu (alors que dans sa suite sur PlayStation, vous recommencez à chaque fois du niveau un !), autant vous revendrez tous vos biens à la seule fin de faire du bénèf’.
MAIS DANS QUEL ÉTAT J’ERRE ?!
Malgré l’aspect bon enfant dégagé tant par le protagoniste principal que par ses ennemis, Torneko no Daibouken : Fushigi no Dungeon n’est pas à mettre en toutes les mains.
Pas entre celles des amateurs de DraQue en tout cas, parce que le titre ne fait pas honneur à la saga-mère. Les graphismes sont dépouillés, la bande-son est bien peu séduisante et le concept même du dungeon-RPG est particulièrement limité et répétitif.
Et puis bordel ! Qu’est-ce que c’est que cette difficulté de ouf ? Jouer à Torneko no Daibouken relève du masochisme le plus pathologique. Maniabilité exécrable, surnombre d’ennemis et de pièges, difficulté à prendre des niveaux d’expérience, rareté des objets de soin… Rien n’est fait pour rendre la vie facile au joueur.
Enix a de toute évidence commis une erreur de stratégie en confiant une itération, même secondaire, de sa franchise à Chunsoft. Une erreur qu’il répètera par trois fois, avec à chaque fois le même résultat. L’expression « seuls les cons ne changent pas d’avis » n’aura jamais été aussi vraie.
Nota Bene : la ROM a été traduite en anglais.