La saga des Might & Magic fut l’une des plus célèbres séries de RPG sur micro, du milieu des années 80 au milieu des années 90. Aujourd’hui, ce légendaire label évoque surtout les fameux Heroes of Might & Magic, une excellente série de wargames simplifiés mâtinés d’éléments de jeu de rôle. Quant à la série originale, elle commença à se mordre la queue au bout de quelques épisodes, en ne proposant plus des améliorations que d’ordre esthétique, améliorations elles-mêmes en décalage complet avec la technologie de leur époque. Sérieusement concurrencés par des jeux comme Ishar, terrassés par les Lands of Lore, les Might & Magic furent définitivement expédiés dans une autre dimension par la révolution initiée par Baldur’s Gate, et disparurent à jamais de la circulation.
Dans ce second volet, c’est le monde de Cron que votre équipe d’aventuriers sauvera de la terrible menace qui pèse sur son avenir, même si on ignore à peu près tout de la mission lorsqu’on débute une partie. Toujours est-il que Cron est un pur univers heroic-fantasy avec ses cités médiévales, ses magiciens et ses chevaliers, ses forêts sauvages, ses montagnes inexplorées, ses souterrains remplis de trésors, ses dragons et ses gobelins.
Au commencement, vous pouvez créer autant de personnages que vous le désirez parmi 5 races (humain, elfe, nain, gnome et demi-orque), trois alignements et une volée de classes (chevalier, paladin, clerc, archer, sorcier, voleur, ninja, barbare). Six de ces personnages peuvent vous accompagner en mission simultanément. Si vous n’êtes pas satisfaits de leurs performances, il est toujours possible de les remplacer par d’autres équipiers, générés par le jeu ou par vos soins, à chaque fois que vous vous arrêtez dans une auberge.
On évolue dans le monde de Cron en 3 dimensions, et en image par image. Que l’on soit en intérieur ou en extérieur, la sensation d’être dans un labyrinthe de murs géométriques ne vous lâchera jamais, la seule différence étant qu’en extérieur, les murs sont remplacés par des arbres ou des falaises. Au départ, l’équipe se retrouve à Middlegate, une ville de jeux de rôle comme on les aime, avec ses armuriers, ses auberges et ses tavernes ou bruissent les rumeurs. Quelques malfrats rôdent dans les rues, mais ce sont surtout les cavernes sous la ville qui retiendront l’attention des aventuriers, puisqu’un vieux mage ne tardera pas à réclamer votre secours pour récupérer un artefact dans ces dangereux souterrains. Dès lors, de fil en aiguille, la quête principale se dévoilera peu à peu, de même que la menace qui pèse sur Cron.
Tout comme nombre de jeux de rôle, les rencontres hostiles surviennent aléatoirement, et l’opposition est généralement élevée puisqu’il n’est pas rare de se ramasser 7 à 8 monstres sur le râble en un seul combat. Il est cependant possible de se cacher, de fuir ou même de négocier (bien que vous devinerez aisément que les spectres ou les nécrophages ne soient pas des négociateurs très coopératifs). Les options de combat proposent tout ce qu’un menu de combat correct se doit de fournir : le choix de l’adversaire, le tir à distance, les pouvoirs magiques, l’utilisation d’objets ou l’échange de ces objets entres les personnages. Toute victoire rapporte bien entendu des points d’expérience.
Au niveau de l’ambiance, quelques petites évènements (non visuels cependant, un simple texte vous affirme que vous tombez, par exemple, sur un congrès orque… !), pancartes, inscriptions sur les murs et autres gadgets, évitent que le jeu ne se résume qu’à une monotone suite de lattage de monstres. Détail superflu mais sympathique : la nuit tombe et le jour se lève périodiquement dans l’univers de M&M II.
L’arrivée de l’automapping avait été une bonne nouvelle à l’époque de la sortie de M&M II, surtout quand on tenait compte de la nature assez monotone des paysages et du déplacement image par image. On retrouvait ainsi son chemin un peu plus facilement qu’auparavant. L’annotation d’éléments sur la carte n’était malheureusement pas possible, et obligeait le joueur à avoir recours à une bonne vieille feuille de papier et à un crayon, équipement de base de tout aventurier en chambre. Sur Super NES, cet automapping a été repris, et on peut zoomer sur la carte à loisir.
Réalisation technique
Même en 1993, Might & Magic II avait beaucoup vieilli. Les décors sont colorés de manière un peu vive, les diverses créatures rencontrées sont trop classiques, mais surtout l’aventure est visuellement très monotone. Les villes se résument à des successions de murs de pierre avec quelques portes placées à certains endroits des murs. Même remarque pour les forêts ou les cavernes. On ne rencontre rigoureusement personne dans ce monde en apparence inhabité, en dehors des monstres qui surgissent d’un seul coup et engagent le combat. De même, les décors ne proposent aucun détail un peu spécial (je ne sais pas moi, une souche, un puits, une cabane en ruines, etc.) qui aiderait le joueur à retrouver son chemin plus rapidement. L’animation se fait image-par-image, sans même la micro sensation de déplacement présente dans Lands of Lore : sans l’automapping, on se perdrait instantanément dans ces dédales uniformes. On ne distingue d’ailleurs que les murs les plus proches de votre équipe, le reste n’apparaissant qu’au fur et à mesure. Au niveau des différents menus de jeu, ils font preuve d’une grande clarté et la prise en main est assez instinctive, même s’il faudra un certain temps pour maîtriser les nombreuses subtilités du programme. De ce point de vue là au moins, on peut être satisfait. Quant à la bande sonore, elle se compose de thèmes médiévaux stridents et plus énervants qu’autre chose.
En bref : 12/20 :
Might & Magic II fut, à une époque lointaine, LE jeu de rôle dans toute sa splendeur : plusieurs classes et races différentes, des dizaines de sortilèges, d’objets magiques, d’armes et de pièces d’équipement, un univers immense peuplé de très nombreuses créatures, des caractéristiques spéciales à tire-larigot pour vos personnages, et un scénario qui ne se révélait qu’au fur et à mesure (au début, on se balade en faisant du levelling sans but bien précis, en espérant glaner quelques indices). Oui, Might & Magic II, par toutes les améliorations qu’il apportait à son prédécesseur, était un must incontournable. Aaaah, 1988… c’était le bon temps, c’est vrai. Ah… cette version a été publiée en 1993 ? Hum… là ça devient un peu plus problématique. Il est certain que l’adaptation Super NES est fidèle jusque dans ses moindre détails au jeu original, mais c’est là justement que le bât blesse. Quelques améliorations, même cosmétiques, n’auraient pas été de refus pour remédier à l’austérité originelle du jeu. Might & Magic II propose en fait tout le charme, mais aussi toutes les lourdeurs d’un RPG « à l’ancienne ». Pour les rôlistes acharnés, qui seraient prêts à passer outre sa réalisation datée, le trop grand sérieux de l’aventure et la lenteur du gameplay, Might & Magic II possède une durée de vie très conséquente puisque l’aventure s’étend sur pas moins d’une centaine d’heures. En ce qui me concerne, les RPG de qualité – d’origine japonaise pour la plupart – ne manquent pas sur la Super NES, et je n’ai jamais eu envie de m’acharner sur Might & Magic II que le temps de la simple visite de courtoisie qu’on accorde avec bienveillance à un ancien combattant.