Je vous parlais il y a peu de ces séries qui ont cédé aux sirènes de la 3D, avec en général un résultat catastrophique ou pas loin. Pitfall en fait partie. Légendaire sur Atari 2600, oubliable sur NES, la saga avait retrouvé son panache grâce à un épisode 16 bits à la réalisation dantesque et au challenge (peut-être un poil trop) ardu. Activision se devant d’être sur la console du moment, c’est tout en polygones que nous revient Harry Jr. Pour le meilleur, mais surtout pour le pire.
ONCE YOU KNOW YOU CAN NEVER GO BACK…
Baroudeur de la jungle, Harry Jr. traverse son domaine de liane en liane, tel un Tarzan des temps modernes, jusqu’à ce qu’il croise la route de sa Jane, la jeune et séduisante Mira. Cette dernière lui enjoint de l’aider à repousser la terrible force maléfique connue sous le nom de Scourge, qui menace de conquérir l’endroit où elle vit. L’ennui, c’est que l’endroit en question se trouve être dans une autre dimension, et qu’il y a une forte probabilité pour que le héros soit définitivement bloqué de l’autre côté même en cas de succès…
I’VE GOT TO TAKE IT ON THE OTHER SIDE
Mais ce n’est pas ça qui va arrêter notre aventurier modèle, et c’est donc à travers un jeu d’aventure en trois dimensions qu’il se lance à la recherche du monstre. Sa quête le conduira au travers de quatorze niveaux répartis en trois sections : dans la première, il doit trouver le moyen de se rendre dans le monde de Mira, dans la seconde, il le traverse de part en part et dans la dernière, il se dirige vers l’antre de la bête.
Chaque fin de section est marquée par le combat contre un boss. Le reste du temps, les stages alternent phases de plates-formes pures et dures et résolution d’énigmes plus ou moins simples. Le décor peut aussi bien être la jungle profonde qu’une ziggourat ou une mine, mais le fonctionnement est le même. Vous dirigez Harry Jr. à l’aide du stick analogique et utilisez principalement trois boutons : la touche croix permet de sauter, la touche carré d’attaquer - le héros étant muni d’un piolet - et la touche cercle d’utiliser un objet. Vous pourrez également utiliser la gâchette R1 pour vous accroupir ou esquiver les attaques adverses, la gâchette L1 pour afficher votre jauge de vie (par défaut, l’interface est masquée) et le bouton Start pour accéder au menu de pause, qui ne sert pas à grand-chose à vrai dire.
Principalement, vous récolterez durant votre aventure divers trésors qui compteront pour votre score en fin de niveaux. Tous les deux mille et quelques points, vous obtiendrez une vie supplémentaire. Vous en trouverez également directement dans les niveaux. Vous pourrez enfin obtenir divers objets bien utiles : un champ de force qui vous protège de toute attaque pendant un moment, des bombes qui explosent au bout de quelques secondes, un champ électrique qui détruit tous les ennemis passant à sa portée (existe aussi en version plus méchante, qui touche de plus loin, et en version encore-plus-plus méchante, qui touche encore-plus-plus loin), le météore qui s’écrase sur la gueule de l’ennemi qui ose s’approcher de vous, et enfin un objet qui régénère petit à petit votre santé.
Les niveaux abritent quelques checkpoints, qui vous permettent de recommencer pile à l’endroit si jamais vous mourez d’une mort aussi involontaire qu’inopinée, ainsi que des points de sauvegarde. De manière amusante, le jeu propose à la fois une sauvegarde sur carte mémoire et une sauvegarde par mots de passe, les deux ayant exactement la même fonction.
HOW LONG ? HOW LONG WILL I SLIDE…?
La série des Pitfall se mêle donc désormais de science-fiction, peut-être pour mieux correspondre aux canons « modernes » de la console « next gen » qui l’accueille. Toujours est-il que cette première trahison envers l’esprit même de la saga n’est peut-être que la moins grave de toutes.
Pourtant, le premier coup d’œil sur Pitfall 3D : Beyond the Jungle se montre plutôt clément. Certes, les décors et personnages ont pris du volume et les polygones qui les alimentent s’avèrent un peu grossiers, mais les textures sont nombreuses et variées. Verdure, cavernes, architecture torturée des divers bâtiments ou volcans… Harry Jr. trouvera vite ses marques dans ces décors familiers. Premier souci néanmoins, l’ami Harry se déplace vite, et ses mouvements ne sont pas des plus simples à suivre.
C’est d’ailleurs de là que découle tout le reste. La maniabilité est catastrophique, le héros effectuant des bonds ingérables, glissant à la réception, frappant sans que l’on ne puisse prédire où son coup touchera, entrant en catatonie dès qu’il se tape un mur ou un autre élément du décor… Et parallèlement aux errements de l’avatar - et donc du joueur - les adversaires, eux, savent précisément vous en mettre plein la gueule. De fait, la difficulté est imposante. C’est même un euphémisme, car la série n’a jamais été connue pour être particulièrement coulante. Mais ici, on atteint des summums du fait de la jouabilité exécrable. Le double système de sauvegarde fait donc office de méthode Coué : le joueur tente péniblement de s’accrocher, en se disant qu’il est doublement protégé. Hélas pour lui, son parcours sera long et sa progression lente.
On sait pourtant la PlayStation capable - moins que la Saturn, mais tout de même - de grandes choses en matière de 2D. Quelques jeux de plates-formes (The Adventures of Lomax ou Pinobee par exemple) et RPG (les Legend of Mana ou les Tales) nous l’ont prouvé. Mais rares sont les développeurs à avoir su discerner à l’avance les pièges d’une 3D encore rudimentaire. Activision, lui, est tombé droit dans le piège. Sa série fétiche en a pris un sacré coup derrière les oreilles, et ce sera à partir de là à l’épisode PlayStation 2 de redorer le blason.