On n’y croyait plus, et pourtant Bandai l’a fait ! Saint-Seiya, ou « Les Chevaliers du Zodiaque » pour les détracteurs de la V.O., arrive enfin sur console. Certes, il y avait eu, voici bien longtemps, de curieux jeux de rôle sur la 8-bits de Nintendo (dont un seul avait fait l’objet d’une localisation française), mais ces programmes, d’un niveau très médiocre, n’avaient pas convaincu grand monde. Bien entendu, dans le cas qui nous occupe ici, c’est la célèbre saga du Sanctuaire, probablement la période la plus appréciée de la série, qui fait l’objet de ce jeu tant attendu.
**A l’assaut du sanctuaire **
Le mode story est d’une fidélité irréprochable à la série. On peut réellement revivre tout cette saga légendaire, paddle en main. Les concepteurs ont poussé la fidélité jusqu’à découper la progression en épisodes, comme dans la série. Un petit résumé de l’ « épisode » précédent, un écran d’introduction, la mise en place des forces en présence, et le tour est joué. Au final, on passe quand même plus de temps à regarder les scènes non interactives qu’à jouer réellement. Point énervant : la voix off, celle qui annonce le titre de l’épisode, est celle de Seya, dont le véritable doubleur français (ainsi que celui de Saori) a été retrouvé au fond d’un grenier d’AB Productions et embauché pour assurer la localisation française du jeu. Bon, là, on entre dans le domaine des goûts et des couleurs, mais la voix de Seya m’a toujours semblé irritante au possible (ne nous acharnons pas sur ce pauvre homme : à deux ou trois exceptions près, les doubleurs français de séries japonaises sont TOUJOURS irritants), d’autant plus que l’épouvantable individu ne se prive pas, entre chaque combat, de claironner un horripilant « As-tu déjà senti ton cosmos brûler ? », qui donne effectivement envie de flanquer le feu, non pas au cosmos, mais à la console. Pour les temps de chargement, parfois un peu longuets, Bandai a inventé un petit jeu bien régressif pour que les nerveux puissent tuer le temps. Alors que dans DBZ Budokai III, on faisait pousser des monstres verts en appuyant comme une brute sur les boutons, on peut ici faire exploser la cosmo-énergie d’un Seya nain planqué dans un coin de l’écran. Pour en revenir à ce mode story, tout se déroule de manière tellement prévisible qu’on pourrait presque anticiper tous les dialogues. Ce n’est pas vraiment dramatique en soi : même si ce mode n’a guère d’intérêt sur le long terme, on aurait donné n’importe quoi pour l’essayer au moins une fois.
La première maison, celle du chevalier du Bélier, sert, comme dans la série, de tutorial. Mü vous apprendra les principales commandes et il faudra simplement réussir les enchaînements et combo demandés pour pouvoir passer à la maison suivante. On serait tenté de zapper cette séquence pour pouvoir entrer de plein pied dans le vif du sujet, mais subir ce tutorial jusqu’au bout est le seul moyen existant de débloquer le chevalier du Bélier. Les combats sont rarement difficiles. Seuls deux chevaliers, celui du Lion et le Grand Pope m’ont posé de réels problèmes. Notez que vous ne pourrez pas choisir votre personnage pour les différentes batailles, le script est fidèle à la virgule près, et chaque chevalier de bronze affrontera les mêmes adversaires que dans la série.
A noter qu’après avoir débloqué l’essentiel des personnages lors d’une partie complète, les parties suivantes vous proposeront, lors de certains combats, des scénarios alternatifs. Ainsi, il sera possible de franchir la maison du Lion avec le chevalier Phoenix. Dans la maison de la Balance, au lieu de la simple vidéo vous montrant la délivrance d’un Hyoga surgelé, on affrontera le Vieux Maître, redevenu jeune homme pour l’occasion. Et dans la maison du Sagittaire, en lieu et place de la séquence où l’armure tire une flèche dans le mur pour dévoiler le testament d’Ayoros, Seya, revêtu de l’armure d’or pour l’occasion, combattra son double maléfique. Lorsqu’en mode duo, deux chevaliers d’or s’affrontent, le deuxième joueur est d’ailleurs toujours revêtu d’une armure gris-bleutée, similaire aux surplis aperçus dans la série Hadès. Pas très logique mais bon, fallait bien trouver un moyen de différencier les deux adversaires.
A la fin de chaque combat, votre prestation est analysée. En fonction du temps que vous avez passé à attaquer, à vous défendre, à réaliser des coups spéciaux, vous recevez un grade : Bronze (le plus souvent), Argent (ça arrive) et Or (quand ça ?). Vous pourrez également bénéficier d’un niveau bonus. Incarnant le chevalier que vous venez de diriger dans le combat précédent, vous évoluerez en trois dimensions entre deux maisons, et vous devrez terrasser en un temps limité le plus de gardes du sanctuaire possibles. Moche, ennuyeuse et peu maniable, on ne s’attardera pas plus longtemps sur cette activité sans intérêt.
En garde, chevalier !
Au début, seuls les cinq chevaliers de bronze sont disponibles dans le mode deux joueurs. Au fur et à mesure de la progression en solo, mais également en mode deux joueurs (lorsqu’on gagne dix combats d’affilée par exemple), on débloque d’autres personnages. Les 12 chevaliers d’or bien sûr (dont les Gémeaux en deux versions : Armure incarnée et Grand Pope) mais également quelques personnages plus atypiques : Marine, Shaïna, Mysty (Chevalier d’argent du lézard) ainsi que les trois chevaliers d’acier. Parmi les autres items à débloquer, on trouve de petites récompenses dans le « musée » Saint-Seiya, comme les fiches signalétiques de tous les chevaliers, des cartes à collectionner japonaises et des photographies des fameux jouets Bandai qu’on vendait voici une quinzaine d’années à un tel prix que mon fertile esprit d’enfant en était venu à se demander si les petites pièces d’armure n’étaient pas réellement en or. J’ignorais tout à l’époque des termes « Marketing » et « capitalisation d’un produit en vogue », voyez-vous
Première surprise : les coups ne sont pas vraiment nombreux comparés à d’autres jeux du même acabit sur la Playstation. Un bouton d’attaque faible, un bouton d’attaque puissante, un bouton pour les coups spéciaux, un bouton pour parer, les touches du dessus pour avancer ou reculer à grande vitesse, et des combos plutôt limités. Hormis votre barre de vie, il existe bien évidemment une barre de cosmos. Ce dernier monte lentement sans discontinuer, même s’il est possible d’accélérer le processus en concentrant sa cosmo-énergie. Les deux enchaînements spéciaux que vous pourrez réaliser (et dont la réalisation est pratiquement similaire de chevalier en chevalier) varieront en intensité suivant le niveau de la barre de cosmos. Mais plus important, une fois remplie, cette barre vous permettra de déclencher les célèbres attaques ultimes des différents chevaliers..
Une fois la barre arrivée à son maximum, un anneau garni de un à trois cercles apparaît. Il faut alors charger la barre de coups spéciaux de manière à remplir un, deux ou trois cercles. Chacun de ces cercles correspond à un coup spécial (chez Seyar par exemple, il s’agit successivement des météores de Pégase, du tourbillon de Pégase et de la comète de Pégase). Et là, c’est le panard intégral pour le fan transi! Chacun de ces coups spéciaux donne droit à une vidéo, généralement bien réalisée et d’une fidélité exemplaire à la série. La danse du cygne avant la « Poussière de diamant » est pile poil comme dans mes souvenirs. L’ « autre dimension » des Gémeaux est superbe et aussi inquiétante que dans la série. Et que dire des attaques de Shaka, chevalier de la Vierge? Comment ne pas frissonner de plaisir nostalgique en regardant votre pitoyable adversaire traverser les 5 mondes infernaux, brisé comme un simple fétu de paille? Certains finiront par trouver irritantes ces vidéos impossibles à zapper. Pour le fan moyen, c’est une joie sans pareille dont on met un certain temps à se lasser. Tout n’est pas parfaitement équitable dans ce système, puisque certains chevaliers, comme celui du Taureau, ne disposent que d’un unique coup spécial. D’accord, c’était déjà le plus faible des chevaliers d’or dans le dessin-animé, et il ne possédait de toute façon que cet unique coup, mais ce n’est tout de même pas très réglo. Enfin, l’intéressé compense heureusement cette carence au niveau de la simple force brute.
Comme dans Budokaï (auquel Saint-Seiya ressemble décidément beaucoup), il est toujours possible de bloquer ce genre d’attaque spéciale. Soit, en parant directement avant que l’adversaire ne lance son l’attaque soit, une fois l’attaque déclenchée, en appuyant sur le bouton O durant la fraction de seconde où ce dernier apparaît à l’écran. On rate son coup neuf fois sur dix. Dans le cas contraire, l’attaque est maintenue en équilibre entre les deux adversaires, et celui qui parviendra à faire pencher la balance en sa faveur sera celui qui fera le plus de mal possible à son joystick.
A noter que pour éliminer l’adversaire avec certitude, en mode solo comme en mode versus, il est impératif de l’achever par un coup spécial. Autrement, le vaincu, gisant au sol, sera invité par Athéna à poursuivre la lutte. Ce qui nécessitera, de la part du joueur, qu’il martyrise à nouveau le petit joystick de la manette jusqu’à rétablissement complet de son personnage. Evidemment, plus le nombre de défaites augmente, plus remettre son chevalier sur pied sera ardu, voire impossible. A la troisième ou quatrième défaite, il est nettement préférable de laisser tomber, à moins d’avoir quelques manettes de rechange sous la main.
Vous n’avez aucune chance, misérables chevaliers de bronze !
Un troisième mode de jeu permet d’incarner le Grand Pope et de prendre la tête de la défense des 12 maisons. Les chevaliers de bronze progressent un à un dans les temples du Sanctuaire, et votre tâche est de les empêcher d’arriver au temple d’Athéna. Pour cela, vous placez vos différents chevaliers dans les temples afin qu’ils affrontent les chevaliers de bronze, vous leur attribuez quelques pouvoirs spéciaux, et vous envoyez quelques gardes affaiblir les cinq héros. A noter que son côté, Athéna booste ses poulains après chaque bataille. Pour les besoins du jeu, les cinq avortons de bronze sont épouvantablement puissants lors de la première partie. C’est bien simple : lors de ma première tentative, Seyar a liquidé mes 12 chevaliers d’or à la chaîne sans la moindre difficulté. Mais suivant l’analyse du combat évoquée plus haut, vos chevaliers d’or gagneront peu à peu en expérience, ce qui permet au bout de quelques parties de rééquilibrer les forces en présence.
Tu pense me battre avec ton armure à moitié brisée, chevalier ?
Et au niveau technique, me direz-vous ? hé bien là il y a tout de même de quoi être un peu déçu. Graphiquement, ce n’est pas mauvais en soi. Les différents chevaliers sont relativement bien représentés (enfin, du moins on les reconnaît, c’est déjà ça), mais on a tout de même vu beaucoup mieux sur la console. On admirera néanmoins le rendu des armures, particulièrement détaillé pour les armures d’or, et on déplorera certains personnages tout simplement loupés (le chevalier des Gémeaux en version « Grand Pope »). On remerciera les programmeurs d’avoir tenté d’innover un peu dans la représentation des maisons (en plein air dans un décor de cascades pour le Bélier, froide et gelée pour le Verseau, grotte sous-marine pour les Poissons), mais on regrettera qu’en dehors de ces temples grecs, il n’y ait que le monde des morts cher au chevalier du Cancer pour voir du pays. On saluera la rapidité et les effets impressionnants de la majorité des coups spéciaux tout en jugeant que les chevaliers, en temps normal, se déplacent comme des androïdes rouillés particulièrement gauches. Enfin, vu la réussite graphique de Budokaï III, il est finalement assez surprenant que la même technique graphique n’ait pas été utilisée, de manière à coller encore davantage à la série et d’éviter les quelques travers visuels dont on vient de parler.
Question jouabilité, pas de problèmes particuliers à signaler. Le nombre de coups étant assez limité, on ne met pas deux plombes à les maîtriser tous sur le bout des doigts. Il est tout de même regrettable qu’un certain nombre de chevaliers ait tendance à avoir des mouvements de base fort semblables. Enfin, j’aimerais pousser une gueulante en ce qui concerne la bande sonore. Pas spécialement au niveau des voix et bruitages (préférez cependant les voix japonaises si vous voulez éviter les crises de fou rire que générait l’adaptation française), mais au niveau de la musique. Bon, dans l’absolu, les thèmes musicaux utilisés ici ne sont pas désagréables en soi et restent proche de l’esprit de la série. Mais bon dieu, pourquoi, alors que les compositions de Seiji Yokoyama sont parmi les plus belles à avoir jamais servi de toile sonore à un manga, pourquoi ne pas les avoir incluses dans le jeu? D’autant plus que la version japonaise, elle, a pu bénéficier de cette chance. Il s’agit vraiment d’un lamentable gâchis, tout ceux qui ont apprécié à leur juste valeur les thèmes musicaux de Saint-Seiya me le confirmeront.
Au final, que faut-il penser de cette adaptation tant attendue ? De manière évidente, qu’il s’agit d’un jeu avant tout destiné aux fanatiques acharnés des chevaliers du zodiaque. Ceux qui, tout en ayant conscience des défauts techniques et de l’aspect un peu limité du programme, seront prêts à pardonner tout cela pour le simple plaisir de pouvoir réaliser une « Exécution de l’aurore » ou une « Aiguille écarlate ». Les combats de Saint-Seiya sont de toute manière loin d’être aussi limités qu’on pourrait le penser après seulement quelques heures de jeu.
Les non fans, eux, n’y verront qu’un jeu délassant le temps d’un après midi, qui reprend maladroitement le principe de Budokaï sans l’améliorer, tout en proposant nettement moins de possibilités et une réalisation technique inférieure. Et ils auront raison, les bougres, car objectivement, Saint-Seiya est malgré tout une déception. Ou en tout cas, un programme trop moyen en comparaison des attentes et des espoirs qu’il avait suscité. Il ne reste plus qu’à espérer une suite qui, comme pour les Dragon Ball Z, se bonifiera normalement avec le temps. Et avec, pourquoi pas, les chevaliers d’Asgard
Néanmoins, et c’est une opinion totalement partiale et subjective, je m’amuse énormément avec Saint-Seiya, beaucoup plus qu’avec un Tekken IV, pourtant indiscutablement plus réussi et travaillé à tous points de vue. Il est vrai que je n’y ai jamais joué qu’avec d’autres fans, tout aussi volontairement aveugles que moi sur les nombreuses carences du programme. En fonction de votre affinité avec la série télévisée, faîtes votre choix !