XIII est un jeu vidéo PC publié par Ubi Soften 2003 .

  • 2003
  • First Person Shooter (FPS)

Test du jeu vidéo XIII

4/5 — Exceptionnel ! par

Inspiré de la célèbre BD de William Vance et Jean Van Hamme, XIII est un FPS particulièrement intéressant sur le plan esthétique et doté d’une progression qui tient le joueur en haleine jusqu’à son terme. Pour une fois qu’un jeu inspiré d’une œuvre européenne ne prend pas la forme d’un petit jeu de plates-formes signé Infogrammes, on peut même sabrer le champagne ! Je me souviens, vers la fin des années 90, avoir entendu la rumeur que la médiathèque de ma ville disposait d’un jeu XIII dans ses collections. Je me ruai immédiatement sur les lieux mais, manque de chance, il ne s’agissait que d’une sorte de bande-dessinée multimédia, publiée par les éditions Dargaud, qui présentait des éléments inédits du scénario. Intéressant en soi mais très loin de ce que j’appelle un jeu. Il faudrait 5 années supplémentaires pour que XIII fasse l’objet d’un véritable soft à la hauteur de son propos. Pour ceux qui ne connaîtraient pas l’une des plus passionnantes bandes dessinées franco-belges de l’histoire, résumons ici le fil conducteur de la série, très fortement inspirée du célèbre roman de Robert Ludlum « The Bourne Identity ». Un homme – XIII, vous l’aurez deviné – est retrouvé inconscient sur une plage de la côté est des Etats-Unis, amnésique et porteur d’un tatouage « XIII » sur la clavicule gauche. A peine remis de ses émotions, XIII est pris en chasse par des tueurs à la solde de « la Mangouste ». Notre homme parvient à s’échapper et trouve sur lui un numéro de compte banquaire à New-York. Arrivé sur place, XIII découvre qu’il avait laissé quelques indices au cas où il lui arriverait quelque chose, mais il est arrêté par le colonel Amos, responsable du contre-espionnage de la CIA. Ce dernier lui apprend qu’il serait le capitaine Steve Rowland, auteur du récent assassinat du président des Etats-Unis. Les preuves semblent accablantes mais heureusement, XIII est secouru par Jones, l’assistante du général Carrington. Selon les dires de Jones, Steve Rowland serait bien responsable du meurtre, mais XIII ne serait pas Steve Rowland. On lui aurait seulement donné son apparence afin de confondre les commanditaires de l’assasinat, un mystérieux cartel regroupant 20 personnalités importantes du pays. Le scénario du jeu reprend plus ou moins (avec quelques séquences coupées au montage et quelques rajouts utiles au gameplay) les 8 premiers albums de la série, de « Le jour du soleil noir » à « Treize contre un ». Le jeu respecte d’ailleurs très bien les flashs mémoriels du héros, en offrant certaines courtes scènes dans lesquelles XIII évolue dans un contexte sombre et brûmeux.

De l’équipement et de l’infiltration

Au niveau des armes, on est plutôt gâté : il en existe près d’une quinzaine. Si aucune ne se démarque clairement par son originalité, on dispose quand même de tout l’attirail du parfait petit barbouze (plusieurs types d’armes de poing, un fusil à pompe, plusieurs fusils d’assaut, les grenades, le sniper, l’arbalète, le lance-roquettes et le harpon pour combattre sous l’eau). Dans sa besace, l’agent XIII dispose également de deux outils bien utiles : un rossignol pour crocheter les nombreuses portes scellées qui entraveront sa progression et un grappin équipé d’un treuil pour escalader falaises et facades de bâtiments.

Lorsqu’on fait le compte de l’ensemble des niveaux présents dans XIII, on peut constater que les stages se rapprochant du FPS pur et dur (c’est à dire, en gros, aller d’un point A à un point B en tirant sur tout ce qui bouge et en tentant de survivre) ne sont pas en majorité. De plus, même parmi eux, la séance de tir aux marines s’agrémente de certains objectifs, comme le fait de protéger le général Carrington lors de la fuite dans les montagnes ou de défendre un point précis dans ces mêmes montagnes jusqu’à l’arrivée des renforts. Une grande part des missions fait davantage appel à l’infiltration et à la discrétion plus qu’à l’action pure et dure. Pour ne citer que deux exemples, la mission dans la banque vous demandera, une fois l’alerte donnée, de vous échapper en ne tuant aucun garde de la banque. Il faudra donc opter pour les armes non léthales. On trouve ces armes disséminées dans tous les stages : chaises, balais, bouteilles… avec lesquelles vous pourrez neutraliser tout adversaire sans le tuer. A noter que dans ce niveau et dans d’autres, il est également possible de prendre des otages civils. Si avec votre otage, vous faites face à l’adversaire, ce dernier vous maintiendra en joue mais ne tirera pas (pour autant qu’il s’agisse d’un garde ou d’un policier et non d’un tueur de la Mangouste).

Dans l’autre type de mission « discrète », XIII pourra tuer autant qu’il le souhaite pour autant qu’il ne se fasse pas repérer et que les gardes ne donnent pas l’alarme. Dans le camp SPADS par exemple, l’objectif est d’aller placer un émetteur dans la tente du colonel McCall, qui est évidemment au beau milieu du camp et redoutablement gardée. Si vous sortez la grosse artillerie, l’alarme sera vite donnée et XIII échouera dans sa mission. Il faudra donc se servir exclusivement du silencieux, de l’arbalète ou des armes non léthales pour liquider les militaires ennemis. De plus, ces derniers effectuant des rondes, il sera capital de ramasser les corps de vos victimes et d’aller les planquer dans un endroit où ils ne risqueront pas d’être découverts. Dans l’ensemble, toutes ces missions sont passionnantes et soutenues par de nombreuses séquences non interactives, par des dialogues plus ou moins utiles entre les personnages et par un scénario qui suit fidèlement celui de la bande dessinée.

Dis monsieur, dessine moi un XIII

L’aspect technique le plus intéressant de XIII repose sur sa représentation en cell-shading. Cependant, n’allez pas penser que l’on retrouve le trait de crayon de la bande-dessinée d’origine : cette dernière était sans doute un peu trop réaliste et fouillée graphiquement pour obtenir un résultat probant. Non, XIII a le design d’un bon vieux Comic américain. C’est un peu surprenant au début, surtout quand on garde à l’esprit l’aspect graphique d’origine, mais on s’y fait très vite. Les décors sont les grands bénéficiaires de cette optique visuelle : que l’on soit au cœur d’un complexe ultra-moderne, dans des montagnes enneigées ou dans un canyon en Arizona, l’immersion est totale. On pourrait penser, au vu des images, que le trait reste grossier et que les textures manquent de détails. Il est certain qu’on n’atteint pas la finesse de grain d’autres FPS majeurs de cette époque, mais c’était le prix à payer pour obtenir un rendu comics crédible. Peu importe : une fois au cœur de l’action, on s’accomode parfaitement de la chose, et on finit par trouver aux graphismes quelque chose d’unique et d’attachant. Pour les personnages, ennemis comme amis, on sera un peu plus réservé. Les simples adversaires sont parfaitement représentés, leurs proportions sont parfaites et leurs mouvements sont réalistes. En ce qui concerne les personnages récurrents dans la série, on remarque parfois une certaine bizarrerie au niveau de leurs traits. Si certains, comme le colonel Amos ou le général Carrington sont fidèlement reproduits, d’autres (La Mangouste par exemple) ont une allure un peu surréaliste, la palme revenant au Major Jones : on peine à reconnaître dans le jeu vidéo la séduisante comparse de XIII… ! D’autres détails relient XIII à son milieu d’origine. Lors de nombreuses conversations auquelles on peut assister au cours des niveaux, les personnages s’expriment au travers de bulles (ou de phylactères pour les plus pointus). On peut également apercevoir de nombreuses onomatopées apparaîtrent à l’écran : des « Baaoum » en cas d’explosion, des « Flap-Flap-Flap » pour les hélicos en approche et, beaucoup plus important pour la survie de XIII, les « Tap-Tap-Tap » dont la police va grossissant suivant qu’un ennemi ou un personnage s’approche du héros. Enfin, en cas de tir lointain réussi (par exemple à l’arbalète ou au fusil sniper), un petit strip de trois cases apparaîtra brièvement dans un coin de l’écran, vous montrant la tête de la cible se prendre le projectile de plein fouet. Les musiques n’ont rien de mémorable mais soutiennent l’action quand il le faut. C’est finalement tout ce qu’on leur demande. Ce sont surtout les dialogues qui retiennent l’attention. Bavard, le jeu l’est, qu’il s’agisse de XIII lui même, des personnages importants avec lesquels on discutent ou de simples trouffions en train de discuter chiffon dans leur guérite. Non seulement cette masse de dialogue contribue au réalisme de l’action mais pour une fois, on sent que les personnages n’ont pas été doublés par un stagiaire qui passait par là. L’intonation et le ton sonnent juste, avec juste ce qu’il faut d’emphase pour qu’on garde à l’esprit qu’il ne s’agit que d’une BD… !

Déjouer la conspiration ? Peuh…un jeu d’enfant !

Si XIII ne fut pas le plus impressionnant ni le plus réussi des FPS de l’année 2003, il s’imposa en tout cas comme le plus original visuellement. Le cell-shading donne un vrai cachet à l’aventure, et revisite les principaux moments de la BD avec un autre regard artistique. Evidemment, ce n’est pas forcément le visuel qui fait le bon FPS. XIII propose-t-il donc un gameplay à la hauteur de son originalité graphique ? De ce côté-là, il n’y a pas de quoi râler : toutes les missions, sans exception, sont passionnantes. Avec les rebondissements perpétuels dans le scénario et cette impression de ne jamais faire deux fois la même chose, inutile de vous dire qu’on ne lâche pas le jeu une seule seconde, même quand on connaît l’histoire à l’avance. La seule faute de goût réside dans cette séquence dans la prison de Plain Rock où, désarmé, deux gardes vous escorteront jusqu’à la douche. Il faut marcher exactement à leur rythme à égale distance de vos deux géoliers : approchez vous un peu trop près de celui qui vous précède ou laissez celui qui se trouve derrière vous rattraper, et vous recevrez une volée de coups de matraque. C’est peut-être représentatif de l’ambiance des prisons spéciales américaines mais, question gameplay, c’est assez frustrant. Honnêtement, c’est assez léger comme raison de râler. L’I.A. des ennemis est correcte, quoique pour un jeu surtout centré sur l’infiltration, on aurait peut-être espéré encore mieux. En 2003, il y avait de quoi trouver un peu lourd le fait que des adversaires « humains » se jettent sur vous dans la plus parfaite inconscience de vos balles. Ce problème n’est heureusement pas trop récurrent. On râlera surtout sur la grande facilité du jeu. Malgré quelques missions d’infiltration plutôt coriaces, on progresse très régulièrement sans jamais rencontrer d’opposition sérieuse. Le mode multijoueur permet de continuer l’aventure un peu plus longtemps mais il ne propose malheureusement rien de très novateur et les cartes ne sont guère nombreuses.

Malgré sa courte durée de vie, XIII reste néanmoins un FPS de très haute volée, original, passionnant, dont on a du mal à décrocher. Il restait beaucoup d’albums au terme de celui-ci et un second jeu aurait été apprécié. Malheureusement, les ventes furent décevantes, et le projet semble aujourd’hui au placard…

XIII