The Dark Eye est un jeu vidéo PC publié par Inscapeen 1995 .

  • 1995
  • Aventure

Test du jeu vidéo The Dark Eye

3.5/5 — Très bien par

Rien de tel qu’un bon bouquin assis au coin du feu n’est ce pas ? Alors pourquoi pas un jeu vidéo au coin du feu, pour vos nuits d’hiver? Je vous propose The Dark Eye, un jeu vidéo tiré des contes de Edgar Allan Poe, qui vous transportera dans son univers inquiétant.

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* Le jeu *

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Le jeu s’apparente à un Myst like basique, c’est-à-dire qu’on se déplace tableau par tableau, grâce à la souris qui nous permet de passer de l’un à l’autre. Un Myst like, les énigmes en moins. En effet, il n’y a pas vraiment de moyen d’être réellement bloqué dans le jeu (à moins d’un bug ?), car le jeu ne dispose d’aucune énigme. Au pire, on aura à avoir un objet dans les mains à un certain endroit, ou bien il faudra avoir bien tourné en rond pour être sûr d’avoir vu tous les tableaux, mais ça ne va pas plus loin. On ne se creuse pas les méninges sur le jeu, mais plutôt sur ce qu’il nous raconte. Le jeu s’habille d’une mode « jeu PC des années 95 qui découvre le Quick Time ». Entendez par là un jeu d’images, avec quelques animations pas bien costaudes, et quelques « effets » de transition au cas où. Ca reste agréable dans l’ensemble, même si certains effets de transitions sont abusés. Au niveau du son, c’est nettement moins vieillissant. Les musiques sont glauques, les bruitages très bien faits, mais surtout, le doublage français est hors du commun, chaque doubleur joue son personnage et sa voix à merveille, ce qui donne une énorme ampleur au jeu, et à son ambiance. Le seul point qui semble réellement négatif serait la durée de vie. Assurément, le jeu n’est pas long, je l’ai d’ailleurs fini en 2 soirées, mais il n’en faut pas plus ni moins pour rendre ce jeu agréable.

Je lui met 7/10, pourtant, je vous invite vivement à vous le procurer*, car il ne vous prendra pas beaucoup de temps, et il n’en demeure pas moins un jeu très intéressant, dont les points forts ne se retrouve pas dans les jeux de nos jours. Si le début ne vous convainc pas, forcez vous un peu, c’est un peu plus loin que le jeu s’avère intéressant. Pas encore convaincu ? Je vais donc vous en parler un peu plus, mais cette partie pourrait vous gâcher un peu de plaisir de la découverte.

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* Analyse *

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Tout d’abord, la base scénaristique. Vous incarnez un personnage, accueilli par sa famille dans le manoir, qui va incarner d’autres personnages. Ce personnage a un visage presque vide. Il n’y a qu’à voir son reflet dans la mare au début, ou dans les objets qui vont vous permettre de passer à un autre personnage. Ainsi, ce personnage, ce ne sera pas n’importe qui, ce sera VOUS. L’immersion est un point important dans The Dark Eye, sinon LE point le plus important du jeu. C’est pourquoi je vous conseille de jouer dans de bonnes conditions : dans une salle sombre, aucune nuisance sonore, et en état de vous plonger dans le jeu. Ce personnage n’a aucune caractéristique, aucune particularité, aucun caractère, à l’opposé des autres personnages. Cette façon de nous immerger dans l’histoire n’est pas sans rappeler Tintin de Hergé, sauf que The Dark Eye, c’est glauque.

Le manoir du personnage principal est délabré, triste, et absurde à la fois. Les murs sont recouverts de ce qui semble être un vieux papier peint, mais il semble en y regardant de plus près qu’il s’agit d’écriture (de Poe ?). L’humidité règne dans ce manoir, où tout semble pourrir peu à peu. On se croirait en plein déménagement, avec ce manoir presque vide de meubles, mais il n’est pas question de çà. Remarquez à quel point ce manoir semble étrange. Cette pièce par exemple, où un des côtés dépourvu de mur, aboutit au ciel (!). Remarquez aussi certains objets, qui ne se trouvent apparemment pas à leur place, où bien certaines pièces, dont on ne comprend pas bien leur utilité. Et que devrais je dire de votre famille (votre oncle et votre cousine en fait) ? Votre cousine semble cacher une tristesse, alors que votre oncle affiche une mélancolie. Il n’y a guère que l’amant de votre cousine pour vous accompagner dans votre histoire, même si apparemment, ce sera plutôt à vous de l’accompagner. Pour sortir de ce manoir, il n’y a qu’une solution : faire avancer l’histoire. Pour ce, vous allez devoir vivre plusieurs histoires, à travers différents personnages, en ayant pris le soin de prendre le dissolvant qui vous permettra de plonger en transe. Vous évoluez donc dans la Phrénologie, qui consiste à déterminer la philosophie d’une personne selon la forme de son crâne. Cette Phrénologie était chère à Edgar Allan Poe. Il sera effectivement question de vivre différents personnages et avec ça, vivre différents physiques, vivre différents esprits, vivre différentes façons de voir les choses. D’ailleurs, vous constaterez dans l’image de la tête humaine qui s’affiche lorsque vous débutez une partie, par laquelle vous pourrez revivre les différentes histoires, que l’histoire du personnage principal, c’est l’œil, les autres, c’est le cerveau. Je commence à comprendre, l’univers du personnage principal, ce n’est que le concept, les bases, le papier sur lequel l’histoire s’écrit.

Il y aura donc différentes histoires : trois histoires que vous vivrez + deux qui vous seront racontées + l’histoire du personnage principal. Celle du personnage principal, je vous ai déjà tout dit, elle évoluera tant que vous accomplirez une des histoires. Les histoires racontées seront en fait de longues cinématiques. Ce ne sont pas ces passages qu’on retiendra du jeu. Les trois histoires que vous vivrez, c’est le truc fort du jeu. Chacune se vivra de deux manières différentes, car vous les vivrez à travers deux personnages différents à chaque fois. Ces deux personnages suivront ce schéma : une victime et le tueur. Vous vivrez donc l’histoire à travers la victime, innocente, ou naïve, mais paniquée lorsqu’elle se fera tuer ; mais vous vivrez aussi le tueur, froid, ou fou, sans pitié, qui tuera sa victime sans trop se rendre compte de ce qu’il fait. Ces histoires seront un véritable voyage. Un univers différent à chaque fois, de même pour l’époque, mais surtout, les personnages que vous vivrez. Lorsque vous incarnez un personnage, vous le vivez, vous entendez ses pensées, vous ferez ses gestes, vous aurez SES sentiments.

Cette manière de raconter une histoire à travers deux personnages est ahurissante. Si cette méthode peut s’avérer amusante pour un film ou un livre, elle prend carrément toute son ampleur dans un jeu vidéo, à tel point qu’il en devient étonnant que cette idée n’est pas été tellement reprise. En se basant sur l’œuvre de Edgar Allan Poe, les créateurs ne s’y sont pas trompés, l’esprit des recueils y est parfaitement rendu, poussant la qualité jusqu’à dépasser le maître. Si The Dark Eye pouvait faire partie de l’œuvre de Edgar Allan Poe, nul doute qu’elle en serait une œuvre majeure.

Mais je garde le meilleur pour la fin : l’univers. Ainsi, les personnages sont des marionnettes, caricaturales, non pas modélisées en 3D, mais entièrement faites, puis retranscrites dans le jeu, en les ayant filmées ou prises en photos. Si cette idée peut paraître étrange, elle révèle toute sa force grâce aux personnages, qui sont tous caricaturaux, qui sont tous de vrais marionnettes. Même leurs gestes sont caricaturaux, tout comme leurs dialogues. Et pourtant, on pourrait croire qu’un dialogue caricatural serait grotesque, mais il révèle en fait tout son coté humain de cette manière. A l’excellente qualité du doublage donc, de confirmer ce fait. L’immersion dans cet univers en devient forte. Le jeu ne fait cependant pas dans la surenchère, ainsi, il n’y a pas de violence « picturale ». De la violence morale, mais pas de sang, de corps mutilés, de gore. C’est une violence en parfait accord avec l’univers imposé. Le jeu n’est pas malsain, mais met mal à l’aise.

Je crois qu’on peut dire, que The Dark Eye explore une voie du jeu vidéo qui n’a jamais été exploitée, et qui ne l’est pas non plus aujourd’hui. The Dark Eye en devient ainsi un jeu très particulier dans l’univers du jeu vidéo, si bien que je vous conseille d’y jouer, ne serait ce que pour constater le potentiel scénaristique que peuvent avoir les jeux vidéo.

*Ici par exemple :

http://www.the-underdogs.org/game.php?gameid=273

Cette version est peut etre en anglais.

ou ici en version française:

http://www.gameslover.org/index.php?option=com_content&task=view&id=208&Itemid=47

A noter que le jeu est entièrement compatible Win XP.

The Dark Eye