System Shock est un jeu vidéo PC publié par Origin Systemsen 1994 .

  • 1994
  • First Person Shooter (FPS)

Test du jeu vidéo System Shock

4/5 — Exceptionnel ! par

L’histoire

En 2072, un jeune hacker informatique eut la mauvaise idée de s’infiltrer dans les données sensibles de la station spatiale orbitale de recherche Citadel de la Tri-Optimum Corporation, une énorme boîte ayant des secteurs d’activité fort variés mais principalement axés sur la recherche. Peu après son intrusion, celui-ci se fit immédiatement repérer par le système de sécurité. Appréhendé par la milice de cette organisation, il est emmené à bord de la-dite station spatiale accompagné du responsable de la division marketing de la firme, un certain Edward Diego. Celui-ci informe notre héros que les charges qui pèsent sur lui sont lourdes, mais qu’il serait prêt à les laisser tomber en échange d’un petit… « service ». Le travail à accomplir consisterait à s’introduire dans l’intelligence artificielle de la station, une entité ultra-perfectionnée du nom de SHODAN (Sentient Hyper-Optimized Data Access Network), et à la pirater en supprimant quelques petites portions pour en donner le contrôle à Diego. En prime, Diego propose même au hacker de lui faire greffer une interface neuro-cybernétique de niveau militaire qui lui permettrait de se connecter au cyberespace et de démultiplier ses facultés informatiques. Peu désireux de moisir au fond d’une cellule et appâté par sa récompense, notre hacker accepta. Bien mal lui en prit…

Une fois le travail accompli, Diego tint sa promesse et fit mettre en place l’opération chirurgicale dans la plus grande clandestinité. La procédure médicale relevant de la chirurgie lourde, il fut prévu suite à l’opération de placer le hacker en convalescence en le plongeant dans un coma artificiel pour une durée de six mois. Et six mois plus tard, alors que notre héros se réveille, il constate que durant son coma s’est produit quelque chose d’abominable dont il porte la responsabilité…

En ayant altéré SHODAN, il a par ailleurs supprimé toute contrainte éthique sur sa personnalité, si bien que SHODAN a décidé de supprimer toute forme de vie naturelle pour sa gloire personnelle, et après avoir progressivement tué tout le monde à bord de la station, elle a maintenant les yeux tournés vers la Terre…

Le jeu

System Shock est un jeu datant de 1994 et développé par Looking Glass Studios, une boîte remarquable pour la qualité et l’innovation de ses titres en comparaison de ce qu’on pouvait voir chez la concurrence à l’époque, mais hélas aujourd’hui disparue. Il s’agit d’un FPS, mais d’un FPS un peu spécial et davantage orienté vers un jeu d’aventure qu’un jeu d’action, comparé à ce qui existait à l’époque. C’était un jeu d’avant-garde conceptuellement mais qui n’a rencontré qu’un succès modeste. Certains diront que le jeu était trop en avance sur son temps mais je dirais plutôt qu’il ne correspond pas à ce que le grand public recherche dans un titre vidéoludique, ce qui ne veut pas dire que c’est un mauvais jeu, bien au contraire. Le jeu n’a pas rencontré un grand succès commercial alors même qu’il proposait un contenu extrêmement riche. En fait, pour bien se rendre compte de cette richesse dans le gameplay dans le contexte de l’époque (1994), il est intéressant de comparer System Shock avec un autre titre à peu près contemporain mais ayant lui rencontré un franc succès et qui est bien connu, par exemple Doom (1993) ou Doom 2 (1994 également mais qui n’apporte pratiquement rien de neuf par rapport au 1).

Alors Doom 1 et 2, je vais pas en faire le test, vous pourrez lire ceux de Kenseiden et Kenshiro84 sur Emu Nova dans la section PC. Mais en gros, Doom, c’est quoi ? C’est un FPS bourrin, et défoulant dans lequel on mitraille à tout va sur des hordes de monstres dans des niveaux, on récolte des munitions, des soins et des armures, et rebelote. Doom, c’est de l’action rapide à la prise en main aisée, c’est simple, primaire, diablement efficace et défoulant. Doom a rencontré un grand succès, et c’était mérité car c’était un bon jeu dans le genre. C’est même lui qui a lancé véritablement le genre du FPS, même si ce n’était pas le premier (il y avait eu Wolfenstein 3D avant).

Maintenant revenons à System Shock. En quoi diffère-t-il de Doom ? Et bien si tout comme pour lui il s’agit d’un FPS, donc d’un jeu à la vue à la première personne dans lequel on tire sur des ennemis, la comparaison s’arrête là. Pour tout le reste, System Shock est bien plus riche et varié.

Le scénario est bien plus complexe que ce qu’on a l’habitude de voir dans le genre et se dévoilera au fur et à mesure que l’on progressera et que l’on ramassera des messages enregistrés par les habitants de la station spatiale. Les détails des évènements étant survenus durant les 6 mois avant le réveil du hacker se dévoilent ainsi progressivement tandis que l’on joue. A l’inverse, le scénario de Doom tient en 3 lignes…

Le moteur du jeu

Le moteur du jeu est une version évoluée de celui d’Ultima Underworld, excellent RPG datant de 1992 soit dit en passant. D’ailleurs, si System Shock est comparable à un autre titre, c’est bien certainement plus à Ultima Underworld – un RPG, même s’il est en vue à la première personne – dont il est le successeur spirituel plutôt que Doom. Bien plus abouti, le moteur de System Shock permet de gérer des environnements 3D plus complexes avec davantage de possibilités : les murs peuvent être obliques, il est possible de regarder vers le haut ou le bas, de se pencher sur les côtés pour jeter un coup d’œil de côté en restant à couvert, il est possible de sauter pour franchir des obstacles, de se baisser pour offrir une surface plus petite aux ennemis qui voudraient vous tirer dessus ou pour se faufiler dans des zones exiguës, certaines textures sur les murs peuvent afficher ce qui se trouve en d’autres lieux ce qui permet à certains murs de servir d’écrans reliés à des caméras situées plus loin et ainsi de surveiller ce qui s’y trouve, certains objets dans le jeu sont en vraie 3D comme des caisses, bureaux, armoires, etc. Bien sûr aujourd’hui, tout ceci est un minimum syndical mais à l’époque c’était une vraie révolution et ça n’existait pas dans des jeux comme Doom.

L’armement

Qui dit FPS dit armement, et là aussi System Shock innove avec une grande variété d’armes : il y en a en tout et pour tout 16 que l’on peut diviser en 2 catégories :

Les armes à projectiles (armes à feu) qui fonctionnent à partir de chargeurs. Celles-ci ont la particularité de pouvoir fonctionner avec des chargeurs de munitions de nature différente et de pouvoir s’adapter aux types d’ennemis que l’on rencontre. Ainsi, des balles à tête creuse seront inoffensives contre des robots mais feront des ravages contre des mutants, tandis que des balles en téflon auront un fort pouvoir pénétrant contre des robots là où elles seront moins efficaces que des balles à tête creuse contre des mutants, par exemple.

Les armes à énergie qui fonctionnent sans chargeur et consomment de l’énergie stockée par le hacker lui-même. L’énergie peut être rechargée auprès de bornes destinées à cet effet situées dans la station. Ces armes ont la particularité de pouvoir voir leur niveau de puissance réglé manuellement. Un niveau de puissance faible sera peu puissant, tandis qu’un niveau de puissance élevé fera plus mal mais consommera bien plus, et risque de provoquer une surchauffe de l’arme dans les situations les moins désirées.

A cela s’ajoutent 2 armes au corps à corps : un tuyau récupéré dès le début du jeu que l’on abandonnera bien vite au profit de n’importe quelle autre arme, et une rapière laser qui n’est pas sans rappeler Star Wars ™ et dont la portée limitée et inversement proportionnelle à sa puissance dévastatrice. Une valeur sûre à garder à tout pris quand on l’a trouvée ! En effet l’inventaire est limité et vers la fin du jeu il faudra faire des choix sur quelles armes garder sachant qu’on ne peut en porter simultanément que 7.

Donc ça, c’était pour les armes. Après, il y a encore les explosifs… :) Alors, grenades classiques à fragmentation efficaces contre un peu tout (y compris soi-même, attention joujoux dangereux), grenades à gaz, très efficaces contre les mutants / cyborgs, grenades électromagnétiques radicales contre les robots, mines de proximité, explosifs à minuterie réglable plus ou moins puissants, … Et sinon, quand on compare avec Doom, il propose quoi ? :p

L’équipement

Mais il n’y a pas que des armes car le jeu incorpore aussi des équipements (hardware) que le joueur peut mettre en marche, voici la liste : un lecteur de messages qui sert à lire divers messages et notamment ceux laissés par les habitants de la station, généralement peu avant leur mort, une lampe torche extrêmement pratique, un rétroviseur afin de surveiller ce qui se passe dans votre dos, un générateur de bouclier qui sert à amortir les dégâts subis, des lunettes de vision nocturne, une combinaison de protection contre les contaminations toxiques et radioactives, un jet pack pour voler et atteindre des zones en hauteur inaccessibles autrement, etc. Il est possible de ramasser des objets dans votre inventaire. Certains sont liés à l’accomplissement d’un objectif du jeu, d’autres sont des trousses de soins ou des batteries afin de les utiliser quand vous en aurez besoin. Il y a également des patches que l’on peut appliquer sur soi : les plus courants servent à se soigner et remontent progressivement la santé pendant une trentaine de secondes, d’autres servent à augmenter les réflexes ce qui se traduit par un ralentissement du temps dans le jeu (System Shock proposait le bullet time bien avant l’heure), d’autres améliorent la vision dans l’obscurité, d’autres augmentent l’intelligence du héros, ce qui lui permet de résoudre plus facilement les quelques puzzles du jeu.

Les puzzles

Car outre ses aspects action et aventure / exploration, System Shock propose aussi quelques puzzles à résoudre. Certaines portes fermées nécessitent parfois l’obtention d’une carte d’accès à dénicher quelque part, d’autres nécessitent simplement l’activation d’un bouton, d’autres fois encore il faut dénicher une combinaison chiffrée à taper sur un digicode, d’autres fois encore il faut diminuer le niveau de sécurité à l’étage en détruisant des caméras de surveillance et des ordinateurs qui sont autant d’yeux et d’oreilles de SHODAN, mais parfois il faut résoudre un petit puzzle électrique. Il en existe de 2 types ou il faut soit faire parvenir un courant de la gauche vers la droite en modifiant la structure des circuits. Bien qu’un peu trop faciles, ces petites énigmes à résoudre sont bienvenues et alternent un peu le gameplay, du moins à condition de ne pas être hermétique à la réflexion… :p

Le cyberespace

Une autre forme de puzzle à résoudre pour déverrouiller certains accès ou collecter des fragments d’information se fait par le passage dans le cyberespace. En se connectant à des bornes situées à quelques endroits de la station grâce à son implant cybernétique, le hacker peut naviguer par sa conscience dans le cyberespace. Celui-ci est alors symbolisé dans le jeu par un espace en 3 dimensions constitué de salles reliées entre elles par des couloirs et dans lesquels la conscience du joueur flotte. Il n’y a pas de textures, le jeu est alors représenté par des graphismes en fil de fer. Le but du joueur durant ces phases est de naviguer, collecter des données ou des logiciels représentés par des formes géométriques simples et colorées en les touchant (il est même possible ainsi de télécharger des mini-jeux inspirés de vieux classiques et d’y jouer dans le jeu :p), et éviter ou détruire les cyber-gardes contrôlés par SHODAN. Le joueur a à sa disposition des petites attaques informatiques qui sont autant de tirs qu’il dirige sur ses ennemis. Le jeu change alors complètement de ce qu’il est en temps normal pour devenir une sort de shoot them up très simpliste à la première personne dans un environnement virtuel. Tout comme les puzzles électriques, ces phases sont bienvenues et permettent d’alterner agréablement le gameplay pendant quelques instants.

L’ambiance sonore

Le jeu propose des musiques de style plutôt technologique et électronique dont les notes ne sont pas sans rappeler la technologie, les machines et les ordinateurs propres à cet univers cyberpunk. On aime ou on aime pas. Personnellement je n’ai pas été particulièrement emballé par elles, chacun ses goûts. Au niveau des bruitages, rien de bien extraordinaire à noter, ceux-ci sont de qualité correcte pour l’époque.

La version CD

Le jeu est sorti en version disquettes en 1994 mais une version CD est sortie en 1995. Celle-ci proposait d’afficher le jeu dans des résolutions supérieures au simple 320*200 jusqu’en 640*480 (mais cela nécessitait d’avoir une bête de course à l’époque pour avoir une fluidité décente dans ce mode) et contenait en prime l’intégralité des messages lus dans le jeu en format audio et en anglais. On appréciera tout particulièrement leur qualité tout simplement excellente, parfois accompagnés de bruits de fond illustrant ce qui se passe à proximité lors de leur enregistrement. La présence de ces logs audio renforce énormément l’immersion dans le jeu. Mention spéciale à la voix effrayante et détraquée de SHODAN jouée par Terri Brosius qui s’accorde parfaitement bien à son visage horrible (SHODAN, pas Terri Brosius, pas de malentendu :p). Il paraîtrait que le producteur du jeu, Warren Spector, aurait dit qu’il regrettait la sortie de la version disquette et qu’il aurait voulu que le jeu sorte directement en version CD parce que sans les voix, le jeu perdait énormément de son ambiance oppressante. Et effectivement, je confirme cela, c’est pourquoi je recommande vivement à quiconque veut essayer se jeu de se procurer la version CD. Toutefois, on regrettera éventuellement le fait que les musiques n’aient pas bénéficié du support CD.

Un jeu parfait ?

La plupart du temps, quand on écoute l’avis des gens qui ont connu ce jeu et qui en ont vanté les mérites, on a droit à des avis pour le moins tranchés sur ce jeu qui serait « le meilleur de tous les temps » ou d’autres trucs du genre. Pour ma part, je ne suis pas d’accord avec ça car il y a une chose importante que l’on peut lui reprocher. Bon déjà, il s’agit d’un univers sombre cyberpunk oppressant. En soi ce n’est pas un défaut, mais c’est quelque chose que l’on aime ou que l’on n’aime pas. Tout le monde n’est pas fan de ce genre d’univers, et ceci explique déjà partiellement à mon sens le fait que ce jeu n’ait pas rencontré un grand succès. Ensuite, et plus important, je ferais un reproche à la maniabilité. Le jeu utilise la souris pour se déplacer dans la direction voulue, selon la zone de l’écran dans laquelle on maintient enfoncé le bouton gauche de la souris. Mais celle-ci sert aussi à interagir avec l’environnement : ouvrir les portes, actionner les interrupteurs, ramasser les objets, et surtout, viser et tirer sur les ennemis. En effet, le curseur de la souris sert aussi de viseur, si bien que comme la souris sert à la fois à combattre et se déplacer, il est impossible de faire les 2 en même temps. Heureusement il est possible de palier à ce problème en partie grâce au clavier que l’on utilisera pour se déplacer et s’orienter et la souris pour viser et tirer, mais cela reste infiniment moins pratique que pour les FPS modernes. Certes, à la même époque, des jeux comme Doom n’avaient pas non plus une maniabilité optimale, mais elle était supérieure pour ce qui est de l’aspect action / combats à ce que propose System Shock. Du coup les combats sont très statiques là où leur dynamisme faisait la force de jeux comme Doom. On se retrouve en effet la plupart du temps immobile à tirer sur des ennemis qui font la même chose sur soi jusqu’à ce que l’un des deux meure. Il n’y a pratiquement pas d’aspect mouvement / esquive de projectiles qui faisait la force de Doom. Heureusement, ce point sera plus tard amélioré dans System Shock 2 dont le test de Sigfrodi figure aussi sur Emu Nova, pour en faire un vrai FPS d’action cette fois. Si la maniabilité et les combats avaient été améliorés et comparables aux autres FPS contemporains, j’aurais monté la note à 9 ou 10.

Par ailleurs, System Shock propose une difficulté un peu inégale. Celle-ci est réglable au début du jeu, et en mode normal, on se débrouille la plupart du temps correctement sans trop de dégâts, mais pour peu que l’on soit surpris par des ennemis dont on met quelques secondes à repérer l’emplacement, la santé physique du hacker peut descendre très vite si bien qu’il n’est pas rare de mourir sans avoir compris d’où ça venait. Il est intéressant de noter que la mort n’est pas forcément fatale puisque lorsqu’elle survient, le corps du héros est amené pour être transformé en cyborg dans une machine appropriée qu’il est possible de reconvertir en machine de soins grâce à un switch que l’on peut avoir actionné au préalable. Dès lors, toute mort survenue sur le même étage devient automatiquement suivie d’une résurrection… :p Ce n’est pas de trop étant donné les pièges et embuscades qui peuvent parsemer votre route.

Enfin, on regrettera un peu l’inutilité des armes à énergie. En effet celles-ci consomment de l’énergie qui s’épuise assez vite et qui est aussi utilisée par des équipements vitaux comme le générateur de bouclier personnel et la lampe torche. Dès lors, tirer avec revient à tomber à cours de jus beaucoup plus vite et donc de ne plus pouvoir faire appel à l’équipement ce qui peut devenir très compromettant. On préférera donc nettement utiliser les armes à munitions, d’autant que celles-ci sont en nombre plus que suffisant dans l’ensemble.

Conclusion

Au final, System Shock est un FPS axé aventure très innovant pour son temps. Le jeu est très oppressant et les quelques apparitions de SHODAN et autres messages des derniers humains ayant vainement tenté de lui résister n’arrangeront rien à l’affaire. Les possibilités techniques du moteur sont sans comparaison avec ce qui existait à l’époque et ont permis de faire un FPS au contenu beaucoup plus riche que ce qui existait. Mais System Shock n’est pas un jeu qui satisfera les fanas de la gâchette sur le plan action. Bien qu’étant un FPS, le jeu est presque plus un jeu d’aventure qu’un jeu d’action à part entière, si bien que les fans du genre se sont plutôt rabattus sur des titres comme Doom, Quake et autres Duke Nukem 3D… Mais même si on n’accroche pas au genre, il faut reconnaître à ce jeu ses nombreuses qualités techniques.

System Shock sous Windows XP

Je crois que le jeu est jouable nativement en passant par VDMSound pour l’émulation sonore, mais sinon, le jeu est jouable sous la dernière version de Dosbox à ce jour (0.72).

System Shock