Originellement publié en shareware avant la sortie du jeu complet, Rise of the Triad démarre sur le concept d’une équipe de mercenaires gouvernementaux, les « H.U.N.T. », qui investissent un monastère situé au large des côtes californiennes, afin d’y enquêter sur les activités pas très catholiques qui s’y déroulent.
Le ou les aventuriers évolueront dans des dédales à perte de vue, avec des clés à dénicher pour ouvrir certaines portes. Nulle trace de relief ou de constructions complexes, les décors ne sont constitués que de murs (avec des textures variées tout de même) à perte de vue. Malgré une finesse plus avancée, on évolue dans le même genre de niveaux qu’au temps de Wolfenstein 3D, dont Rise of the Triad reprend d’ailleurs le moteur graphique amélioré. Pour le réalisme des décors, on repassera d’autant plus que la majorité du jeu se déroule en extérieur. Enfin disons plutôt qu’on voit un ciel crépusculaire assez répétitif quand on lève la tête vers le haut. Autre constante de l’espace de jeu, la présence dans tous les coins et recoins de curieux trampolines rose fuchsia sur lesquels vous pouvez rebondir pour attraper les bonus ou vous hisser sur des plates-formes volantes. Vous l’aurez peut-être déjà compris à la lecture de ces quelques lignes : Rise of the Triad n’est pas un jeu de massacre qui se prend vraiment au sérieux !
On retrouve le même délire dans l’armement disponible. Trois armes possèdent des munitions illimitées : le pistolet, le double pistolet et la mitraillette. Mais ces engins sont un peu légers pour se livrer à un carnage dégoulinant d’hémoglobine digne de ce nom. On leur préfèrera - et de loin - les gros calibres. Si les munitions de ces derniers sont évidemment limitées, on peut récupérer ces ADM en si grand nombre qu’on ne se retrouve pas souvent démuni face aux hordes de gardes qui rodent dans les différentes niveaux. Voyez plutôt ce que Rise of the Triad possède en magasin : bazooka, lance roquette à tête chercheuse, lance-roquette entropique (les roquettes partent n’importe comment, touchant leur cible au petit bonheur la chance), canon nucléaire portatif, « napalmiseur » (assez amusant celui-ci : quand le projectile touche le sol, il déclenche un tapis de flammes imparable qui transforment tout ce qui respire sur sa trajectoire en feu de St-Elme) et lance-roquettes à double tir asymétrique.
Un degré supplémentaire dans la folie furieuse est atteint avec certains items rares sur lesquels on tombe parfois au détour d’un couloir. L’un d’entre eux permet de se transformer en mage armé d’une baguette de foudre, un autre fait de votre mercenaire un véritable dieu vengeur : d’un mouvement majestueux de la main, vous libérez votre divine colère qui transforme tout ce qui vous fait face en poussière d’étoiles. Un troisième bonus fait de vous un champion de base-ball armé d’une batte qui envoie valdinguer tous les ennemis contre les murs, tels de vulgaires fétus de paille. Le summum est atteint avec l’item « os » qui transforme le joueur en clébard : on ne voit alors qu’un petit museau blanc de Jack Russel et on entend de joyeux jappements. Mais c’est un des moyens les plus brutaux et gores de se débarrasser des gardes !
D’autres items - hors armement - proposés par Rise of the Triad enfoncent définitivement le clou, et condamnent les développeurs au statut de junkies bouffeurs d’amphétamines. Certaines icônes vous permettent de voler. L’icône « boing » vous fait rebondir contre les murs comme une boule de flipper (« qui roule, qui roule » Hum désolé) et le « champignon hallucinogène » rend tout déplacement épouvantable, puisque votre personnage titube de gauche à droite pendant que sa vision trouble et imprécise rend presque impossible l’alignement dans votre viseur des ces foutus ennemis clignotants et multicolores !
Ces mêmes ennemis étant d’une stupidité magistrale, l’optique du jeu est on ne peut plus limpide : pas question de straffer sans arrêt, de se planquer, de contourner, de ruser non, l’objectif de Rise of the Triad est de tirer comme une brute avec les engins de morts les plus explosifs possibles, de faire exploser les corps, gicler les tripes, désosser les carcasses, en espérant voir au passage une orbite arrachée ou un visage écorché vif passer à toute vitesse par-dessus votre épaule. En parlant de ces ennemis, il est un peu dommage qu’on ait toujours à faire à des gardes d’un type ou d’un autre (5 ou 6 différents au final). Seuls les moines des derniers niveaux et quelques robots plus ou moins originaux offriront un peu de variété à cette grande chasse à l’homme en uniforme. A noter tout de même que ces ennemis digitalisés sont en fait les employés d’Apogee qui ont gracieusement accepté de se faire digitaliser pour servir de cible au ramassis de petites brutes qui constituent le public habituel des FPS ! Le seul parmi cette soldatesque qui soit un tant soi peu amusant est ce garde qui, après avoir pris une ou deux balles, tombe en genoux en implorant votre pitié avant de sombrer dans l’inconscience. Etant donné qu’il se relèvera rapidement pour vous tirer dans le dos, mieux vaut le liquider pendant qu’il comate !
Au cours de l’aventure, il sera également vital d’éviter un certain nombre de pièges, comme des murs qui se referment subitement, des lance-flammes enterrés dans le sol ou des structures que, faute d’avoir une meilleure idée, je nommerai « charcuteuses » qui déboulent soudainement en rangs serrés, histoire de vous réduire en chair à saucisse avant que vous n’ayez eu le temps de dire ouf.
Réalisation technique :
Si les graphismes sont relativement fins pour un FPS paru en 1994, il n’empêche que ces simples alignements de murs à perte de vue finissent par être très monotones d’autant plus qu’à l’époque, Doom était déjà sorti depuis quelque mois et proposait des zones à explorer un rien plus intéressantes que les ennuyeux dédales de Rise of the Triad. Les adversaires sont sympathiques et bien représentés mais là aussi, leur manque de variété et d’inventivité lasse très vite. D’un autre côté, même en mode solo, la profusion de plates-formes volantes, trampolines et autres idioties ne confère pas à l’ensemble un caractère très sérieux. Chaque niveau tient plus du terrain de jeu délirant pour mode multijoueur que des bases secrètes, prisons ou réseau d’égouts dans lesquels on est sensé évoluer. Les musiques sont énervantes, et les bruitages sont parfois trop assourdissants pour être agréables. Néanmoins, quelques voix digitalisés sont hilarantes (dont le fameux garde pleurnichard et ses « Nooo, please, don’t shoot, nooo ! ». Au niveau de la jouabilité, elle est sans doute excellente mais, en considérant que l’on passe les trois quart du temps à tirer comme un fou sans même se soucier d’être blessé, la précision n’est pas la compétence première requise par Rise of the Triad !
En bref : 15/20
En solo, Rise of the Triad est super amusant quelques heures, avant que la monotonie graphique et ludique ne fasse son uvre. Ce jeu n’était de toute façon pas conçu pour dévoiler l’entièreté de son potentiel en solitaire. Il propose en effet un mode multijoueur très bien foutu pour l’époque, puisque pas moins de 11 joueurs pouvaient y jouer simultanément en réseau. C’est dans ce mode de jeu que Rise of the Triad prenait toute sa saveur. Il allait demeurer le FPS typé « massacre à grande échelle » le plus fendart jusqu’à la sortie de Serious Sam. Rise of the Triad proposait 10 modes de jeu différents en multijoueur, du classique deathmatch à la récolte du maximum d’items, d’armes, en passant par la capture du drapeau ennemi ou la traque d’un joueur en particulier. Inutile de vous dire qu’il y avait de quoi faire ! Bref, à défaut d’être un FPS de premier choix en solo, Rise of the Triad reste un défouloir de premier plan et prend toute sa mesure pour autant que vous disposiez d’une connexion web et d’une poignée d’amis tout aussi assoiffés de sang que vous !