Quake est un jeu vidéo PC publié par ID Soften 1996 .

  • 1996
  • First Person Shooter (FPS)

Test du jeu vidéo Quake

4.5/5 — Exceptionnel ! par

Parmi les centaines de FPS à avoir traversé l’histoire des jeux vidéo, trois d’entre eux se détachent plus particulièrement du lot. Au risque de choquer les plus sensibles parmi nos lecteurs, j’estime personnellement que Doom et Duke Nukem 3D ne font pas partie du lot. Ces deux-là furent bien entendu des hits absolus, des claques techniques et des best-sellers à l’atmosphère extraordinaire mais ils se contentèrent de pousser dans ses derniers retranchements une recette déjà établie, sans y adjoindre d’éléments radicalement nouveau. Non, je verrais plutôt dans ces trois softs immortels : Wolfenstein le père fondateur ; Quake le pionnier de la 3D et Half-Life, l’inventeur des premières I.A. correctes. J’ajouterais peut-être aussi à ce trio de choc Dark Forces, pour avoir établi le principe des objectifs à remplir au cours de la mission.

Quake fut donc le premier FPS intégralement en 3D. Sans trop entrer dans les détails techniques, les jeux antérieurs utilisaient des routines de programmation plus simplistes et étaient de ce fait parfois considérés comme des jeux en « 2,5-D ». Par exemple, regarder vers le haut ou vers le bas provoquait une simple distortion de l’écran, qui n’était alors plus en 3D à proprement parler (même si dans le feu de l’action, il y avait peu de chances que l’on se rende compte du subterfuge). Le moteur graphique novateur de Quake offrait en revanche une visualisation 3D permanente, quelle que soit la position du joueur, et sa puissance permettait aux programmeurs de créer des niveaux à l’architecture jamais vue jusqu’alors. Une amélioration encore plus visible concernait les ennemis. Auparavant, les ennemis étaient de simples sprites 2D « plats », qui ne pouvaient donc être visualisés que de face ou par l’arrière. Grâce à Quake, les sprites ennemis passèrent eux aussi intégralement en 3D, et on pouvait donc les observer sous toutes les coutures, admirer la finesse de leurs petits bras musculeux et texturés, et les voir s’effondrer sous l’impact de vos balles dans toutes les directions.

Au niveau du scénario, Quake fait dans le régime slim-fast accéléré : on incarne un soldat et on tue des méchants, point à la ligne. Nul ne sait qui est ce soldat, quel est le contexte, d’où viennent les ennemis. Tout ce qui compte, c’est qu’au bout de quelques heures de jeu, le joueur aura déjà à son actif un tableau de chasse à faire pâlir Rambo et Terminator réunis. Ce côté scénaristique pour le moins absent, ainsi que le parti pris graphique « démoniaque » avec force pentacles et symboles occultes gravés sur les murs, incita beaucoup de joueurs de l’époque à penser que Quake était en fait le très attendu Doom III, simplement doté d’un autre nom. Il est vrai que, à l’instar de ce jeu mythique, Quake offre un mélange de science-fiction et de médiéval-fantastique, autant dans les décors que chez les adversaires. Ainsi, on commençait par ravager des bases spatiales qui n’auraient pas dépareillé dans Doom avant de visiter des catacombes et des forteresses gothiques au niveau suivant, sans logique apparente. Les adversaires, au départ de simples mercenaires, chiens de combat et maniaques à la tronçonneuse, évoluaient rapidement vers un épouvantable bestiaire de mutants difformes tout droit jaillis des plans infernaux. On repère également une légère influence Lovecraftienne tout au long des niveaux, avec des boss appelés Chton ou Shub-Niggurath. Le premier Quake fut à vrai dire l’unique épisode de la série à se dérouler dans ce contexte. Dès le second jeu, la série prendrait une optique résolument futuriste tout en mettant le jeu en multijoueur de plus en plus à l’honneur.

L’armement proposé dans Quake reste assez classique : Chaingun, fusil à pompe, lance-grenades, lance-roquettes, … ID Software n’a pas vraiment cherché l’originalité de ce côté-là. Ces armes ont également un look assez étrange : on ne voit pas la main virtuelle du joueur (comme dans Doom une fois de plus) mais simplement le canon de l’arme, alors que les jeux 3D Realms avaient depuis longtemps ajouté ce petit détail au visuel à leurs FPS. Quant aux objectifs à remplir dans chaque mission, il s’agit malheureusement une fois de plus d’une simple recherche de clé, même si quelques éléments nouveaux ont fait leur apparition, comme le fait de tirer sur un interrupteur distant pour ouvrir une porte, ou d’actionner rapidement plusieurs de ces interrupteurs pour déclencher un mécanisme.

Réalisation technique :

On l’a dit et redit : les claques techniques du passé font généralement partie des softs qui supportent le moins bien le passage des années. Et Quake paraît une victime toute trouvée pour appuyer ce raisonnement, d’autant plus qu’objectivement, les limites de ce mode de représentation novateur se faisaient déjà sentir à l’époque. Effectivement, les ennemis humanoïdes sont géométriques, taillés à la serpe et les créatures monstrueuses ne se caractérisent pas par leur profusion de détails. La manière de se mouvoir de ces créatures n’est pas mauvaise, mais n’est pas particulièrement supérieure à celle des créatures en 2D des FPS de la même époque. Pourtant, ce serait mentir que de prétendre qu’il ne reste aujourd’hui de Quake qu’un simple témoignage historique. Si les sprites n’ont plus rien d’enthousiasmant, l’architecture générale des niveaux, parfois monumentale, reste tout à fait acceptable de nos jours. Mais c’est surtout l’atmosphère angoissante et le level-design soigné qui firent de Quake un jeu bien supérieur à ses contemporains. Un boyau sombre et étroit, même s’il lui manque le milliard de textures dont on recouvrirait ses parois aujourd’hui, ça reste un endroit où on n’aime pas trop s’attarder ! On notera également l’apparition de l’éclairage dynamique dans les stages de Quake, ce qui signifie que la luminosité d’une torche par exemple dépendra de la position du joueur par rapport à elle. De même, lorsqu’on tire une roquette dans un couloir obscur, celui s’éclaire brièvement au rythme de la trajectoire du projectile. Détail, détail, …mais c’est avec ce genre de détails qu’on crée les meilleures ambiances. Enfin, la bande sonore a été réalisée par Trent Reznor et confier une grosse partie de l’ambiance à ce maître du glauque et du malsain ne pouvait se solder que par une réussite extraordinaire ! Rien que les bruitages, gémissements, grattements et couinements de tout le joyeux bestiaire quakien devrait vous faire dresser les poils de l’échine en toutes circonstances !

En bref : 17,5/20

Jeu historique, désuet techniquement, et ne proposant pas grand chose d’original au niveau de l’armement ou des ennemis, le premier Quake reste néanmoins un FPS parfaitement acceptable aujourd’hui. Ce succès réside dans un seul et unique point, capital dans tout FPS qui se respecte : l’ambiance. Cette dernière n’a que peu perdu de son impact au fil des années et permet encore à Quake d’infliger quelques bonnes giclées de stress au joueur… L’un de ces moments forts se situait dans les premiers stages. Le joueur devait traverser des douves boueuses et des zombies s’élevaient soudain hors de la vase en gémissant. On n’abattait ces importuns que pour constater avec effroi qu’ils se relevaient continuellement, sauf si on détruisait leurs corps au lance-roquette. Inoubliable ! D’une manière générale, les séquences mettant les nerfs et les réflexes à rude épreuve sont légion, et c’est bien ce qui permet à Quake d’être encore aujourd’hui un FPS tout à fait digne d’intérêt, malgré le côté assez classique de son armement et de ses décors. On peut ajouter à cela le mode multijoueur, qui propose plusieurs variétés de Death-Match, du carnage sans règles au one-on-one en passant par le jeu en équipe. Quake était d’ailleurs arrivé à point nommé, alors qu’Internet explosait réellement, pour devenir l’un des premiers véritables succès en multi. Un grand jeu quoiqu’il arrive, qui combine une stature historique à un plaisir toujours d’actualité.

Quake