Medal of Honor : Allied Assault est un jeu vidéo PC publié par Electronic Artsen 2002 .

  • 2002
  • First Person Shooter (FPS)

Test du jeu vidéo Medal of Honor : Allied Assault

4.5/5 — Exceptionnel ! par

Qu’est ce qu’on a pu l’admirer, ce Medal of Honor : Allied Assault ! Jusqu’alors, les FPS se résumaient le plus souvent à une chasse au bot dans des dédales variés. Parfois plus complexes et dotés d’une I.A. plus travaillée (Half-Life pour ne pas le citer), les FPS n’en restaient pas moins des « jeux », et le joueur ne pouvait nourrir aucun doute sur le côté volontairement artificiel de l’action. Parcourir en solitaire, arme au point, des environnements dépourvus de la moindre présence qui ne soit pas hostile, c’était incontestablement défoulant et libérateur mais également peu crédible si on était en quête de quelque chose de plus « cinématographique ». Avec son action scriptée à l’extrême, l’intervention d’alliés de circonstance et son environnement graphique et sonore extraordinaire pour l’époque, Medal of Honor se rapprochait au contraire d’un véritable film de guerre dans lequel le joueur incarnerait un des figurants. Ce premier volet PC de la série - différent de la version Playstation, je vous le rappelle - lança également la mode des FPS « réalistes » se déroulant durant la Seconde guerre mondiale (Return to Castle Wolfenstein étant hors-concours en raison de son scénario mêlant science-fiction et occultisme).

Comme il est important que le joueur moyen puisse s’identifier à un véritable combattant de la liberté, le brave soldat ricain que vous incarnerez a un nom : il s’agit du lieutenant Michael Powell de l’OSS, envoyé sur les théâtres d’opération africains et européens pour de périlleuses missions visant à briser les reins de la machine de guerre nazie. Powell aura à sa disposition l’armement de pointe américain de l’époque : divers fusils et mitraillettes fidèlement reproduits, des grenades (ainsi que des grenades à manche allemandes, plus faciles à trouver), un pistolet muni d’un silencieux pour les missions demandant de la discrétion, ainsi qu’un bazooka, unique moyen de faire la peau à un char Tiger qui se trouverait sur votre route. Les missions, réparties en six grandes campagnes, se dérouleront en Afrique du nord peu avant le lancement de l’opération Torch, dans une base sous-marine en Norvège, et en Allemagne où, après de fastidieuses opérations de sabotage dans une forêt enneigée, vous aurez à anéantir l’usine souterraine de gaz moutarde de Fort Schmerzen et à fuir au plus vite alors que tout le complexe s’effondre autour de vous. Fidèle à son titre, Medal of Honor se déroule cependant majoritairement durant la campagne de Normandie, puisque trois des six campagnes se dérouleront dans cette verdoyante région.

Bien que les autres théâtres d’opération proposent quelques séquences appréciables (en Norvège, il faudra par exemple voler un uniforme allemand et des papiers et infiltrer la base en restant incognito le plus longtemps possible), la campagne normande présente à la fois les environnements les plus détaillés et les missions les plus passionnantes de Medal of Honor. Tout débute bien évidemment par le débarquement sur Omaha Beach. A présent que cet événement historique a été réutilisé dans nombre d’autres FPS typés WW2, il est plus difficile de se rendre compte à quel point cette mission fut une claque magistrale pour tous les joueurs. Après avoir quitté la barge, vous devrez foncer, dans l’eau peu profonde d’abord, sur la plage ensuite, sous le tir nourri des positions allemandes. Une fois la falaise atteinte, un crétin d’officier exigera que vous retourniez sur la plage chercher des explosifs. Suivra alors une course le long d’une tranchée minée, toujours sous le feu des soldats allemands et enfin, la prise d’un blockhaus afin de soulager la progression des troupes restées sur la plage. D’un réalisme jamais vu jusque là, la mission Omaha Beach avait comme principal défaut d’être fortement basée sur le hasard. La seule technique valable pour s’en tirer vivant était de se planquer derrière les hérissons tchèques disposés un peu partout sur le sable et de progresser en même temps que les autres soldats, en priant pour ne pas se ramasser une rafale perdue. On progressait donc principalement grâce à la chance. D’un autre côté, je ne suis pas convaincu que ceux qui parvinrent vivants au pied des falaises en ce 6 juin 1944 durent leur salut à autre chose qu’à la chance, justement. Une fois cette opération terminée, on passera à une série d’attaques et de contre-attaques dans le bocage et les villages normands, avec de fréquents recours à l’aviation pour détruire les positions d’artillerie ennemie. La seconde partie de la campagne de Normandie table sur le principe des Opérations secrètes aux côtés de la Résistance française. Au programme : rencontre du chef de l’antenne locale dans un village, infiltration le long d’une voie ferrée et mise à sac d’un manoir servant de Q.G. à la division allemande du coin. La dernière partie de la campagne normande débute par la séquence la plus redoutable du jeu : la progression dans un village en ruines infesté de snipers allemands. Dire qu’on meurt à chaque pas durant cette mission est un euphémisme, d’autant plus que Powell devra également veiller à protéger la vie de ses coéquipiers en liquidant tous les tireurs embusqués avant que les Boys ne se décident à sortir à découvert. Là aussi, on notait une petite faiblesse ludique. Il suffisait que vous avanciez d’un pas trop loin pour que le script « le tireur planqué dans la chambre d’hôtel tue le médecin du groupe » se déclenche systématiquement. Après le débarquement, voilà encore une séquence réclamant un apprentissage par erreurs successives et une parfaite connaissance de la position des tireurs ennemis pour être réussie. Cette séance de guérilla urbaine se poursuivait par une promenade en char Tiger II, où la bonne vieille tactique d’exploser chaque maison rencontrée pour en déloger les tireurs potentiels prenait toute sa saveur et s’achevait par la conquête d’une grande ville – Saint-Lô il me semble – avec sniping depuis le clocher de l’église et appel à l’aviation pour anéantir les blindés ennemis qui tentent de reprendre le pont principal de la ville.

Si on ne devait faire qu’un seul reproche à Medal of Honor : Allied Assault, c’est que sa nature de pionnier d’une nouvelle variété de FPS l’a rendu quelque peu obsolète à tous points de vue. Les épisodes suivants, ainsi que la série des Call of Duty l’ont surpassé dans tous les domaines : les progrès techniques ont suivi l’évolution de la technologie informatique, les objectifs sont devenus un peu plus complexes, les événements scriptés sont aujourd’hui plus travaillés et l’atmosphère ainsi que les interactions avec les autres soldats proposent un réalisme accru. Mais si on laisse tomber les comparaisons malheureuses, Medal of Honor reste un jeu d’excellente facture. Basé sur le moteur graphique de Quake 3, sa réalisation technique est encore tout à fait acceptable en 2008. Le réalisme des décors est au-dessus de tout soupçon, les soldats ont une apparence et des mouvements parfaitement corrects et ce n’est qu’au niveau des mains et des visages qu’on remarquera que cinq ans se sont écoulés depuis la sortie du jeu. De plus, vos pérégrinations ne se limiteront pas à de sempiternels camps retranchés, bunkers et autres lieux foisonnants de couleurs. Le bocage normand offre une atmosphère champêtre beaucoup plus agréable, et les villages français dévastés proposent bon nombre de possibilités de se planquer dans l’attente du soldat ennemi insouciant. En fait, les environnements de Medal of Honor ont été conçus comme ceux d’un film, avec beaucoup de talent, dans l’optique de vous faire voir un maximum de choses en un minimum de temps. Et cela ne nuit en rien au réalisme des environnements, qui auraient parfaitement pu être reproduits d’après des plans d’époque. La bande sonore est ronflante au possible : de qualité certes, mais ces violons et ces trompettes impériales évoquent directement un paysage quelconque (rade de Pearl Harbour, cimetière d’Arlington, aéroport de la base Edwards, colline d’Iwo Jima, pelouse du SuperBowl) où la bannière étoilée flotterait en surimpression. En l’espèce, ce n’est absolument pas perturbant : autant rester dans le trip jusqu’au bout.

En bref : 17/20

Medal of Honor reste une valeur cible du FPS encore aujourd’hui. Contre toute attente, il a très bien vieilli et sa réalisation, éblouissante pour son époque, lui permet encore de tenir tête à des softs beaucoup plus récents. Si certaines missions sont assez pénibles à jouer (celles qui se déroulent dans un endroit fermé ont largement été surpassées depuis lors, et la forêt enneigée est très pénible), les trois campagnes normandes n’ont pas pris une ride. Malgré un nombre plutôt conséquent de missions, Medal of Honor demeure trop facile à terminer mais heureusement, l’excellence du mode multijoueur permet de renouveler le plaisir de manière durable. Ce mode multijoueur, qui peut accueillir 64 joueurs simultanément, est l’un des meilleurs qu’il m’ait été donné d’expérimenter. Sa réussite tient dans la grande variété de modes de jeu (Medal of Honor ne se cantonne pas au Deathmatch ou au Capture the Flag : on trouve également un mode demandant de détruire un objectif ennemi avec des explosifs, et un mode permettant de construire une base qui devra ensuite être défendue) mais aussi à la qualité des cartes et à l’esprit réaliste de l’action. D’une certaine manière, Allied Assault reste indémodable.

Medal of Honor : Allied Assault