Vous jouez trop avec votre souris, bonsoir… C’est par ces mots réadaptés au contexte que PPDA accueille l’heureux possesseur du soft tiré de l’émission vedette de Canal +. Publié en 1995, le jeu des Guignols reprend donc les personnages, les gimmicks et les expressions consacrées qui avaient cours dans l’émission voici une dizaine d’années, juste avant l’élection de Jacques Chirac. Vous êtes un jeune journaliste engagé récemment par la World Company Television Corp (« la télévision du monde mondial », comme y dit monsieur Sylvestre). et en tant que bleu, vous venez de prendre possession de votre bureau (dans la cave, « le niveau syndical » comme y dit monsieur Sylvestre). Votre objectif va être de dénicher des scoops pour faire de l’audimat et gagner plein de patates. Ces scoops peuvent concerner n’importe lequel des guignols : il pourra s’agir de déterrer des infos sur le prochain film top secret d’Alain Delon, la nouvelle campagne de pub de Raymond Barre, le programme politique de Jacques Chirac ou le truc de Bernard Tapie pour se « saper nickel, bonhomme »…
En pratique, il va donc falloir se rendre sur les lieux prédéterminés pour chaque mission, explorer l’endroit dans les limites du temps imparti, cliquer sur tout ce qui est cliquable (ce qui vous permettra d’observer pas mal d’objets incongrus et d’entendre un grand nombre de dialogues tirés de l’émission) jusqu’à avoir déniché le scoop que vous cherchez. Il ne vous reste alors plus qu’à filmer le ou les éléments nécessaires au montage du reportage (en n’abusant pas de cette possibilité, sinon les batteries de la caméra tomberont à plat) et à retourner à votre bureau. En fonction de vos choix, PPDA décidera si oui ou non, le reportage est digne d’être diffusé. Vous pouvez aussi décider vous-même que le reportage n’est pas diffusable afin de ne pas vous décrédibiliser aux yeux de la direction. En fonction du degré de réussite de la vidéo, votre journaliste – mais aussi le sujet de votre reportage – évolueront sur le grand organigramme popularité / crédibilité. L’objectif ultime est bien entendu d’arriver au sommet de l’organigramme et de détrôner PPDA. Mais attention : si une progression constante est encouragée et si la stagnation est tolérée, accumuler les flops risque de vous faire régresser au niveau syndical, ce qui signifie la porte, sans autre forme de procès. Hé oui, c’est comme ça dans l’économie du monde mondial… beuhaaaarrrh.
D’autres séquences vous demanderont d’infiltrer le réseau de sécurité CERBER, en répondant à des questions stupides, en faisant apparaître des mots respectables (« sécurité », « contrôle ») sur un mur de banlieue sans faire apparaître les mots des sauvageons (« bouffon », « ta mère »), et en reconstituant le portrait robot du guignol sur lequel vous menez l’enquête. Le soft propose enfin une mini-encyclopédie multimédia des guignols de l’info (le « kicéki chez les fromages qui puent »), assez amusante à lire.
Réalisation graphique :
Des écrans fixes, dramatiquement fixes que l’on explore suivant un déplacement image-par-image. Bon, à la base, on ne peut pas dire que les Guignols de l’Info se signalent par un style esthétique bien particulier, donc ce n’est pas trop grave. Mais les décors s’avèrent tout de même terriblement géométriques, et rares sont les éléments à être animés. Cela donne aux lieux visités un aspect irréel assez ennuyeux. Même en 1995, je suis certain qu’il aurait été possible de faire un peu mieux que ça. Un peu plus vivant, en tout cas.
Jouabilité / difficulté
Les commandes sont très simples à comprendre, un nombre suffisant de lieux à prospecter a été prévu pour éviter que l’on ne tourne en rond trop vite, mais le jeu des Guignols n’est tout de même pas terrible de ce point de vue là. On ne comprend pas toujours pourquoi tel reportage est jugé valable et tel autre pas. Les points de progression plus ou moins élevés attribués en cas de succès restent eux aussi un mystère total. En fonction de ces cotations pour le moins hasardeuses, une partie peut être très longue ou très courte… et on ne sait jamais exactement pour quelle raison.
Son
Les voix des Guignols, ni plus ni moins, ont été insérées dans le jeu en très grand nombre. A chaque fois ou presque que l’on clique sur un objet, il se produit quelque chose. Les autres bruitages sont incongrus et plutôt dispensables.
En bref : 12/20
Les Guignols de l’Info est un soft assez étrange. On passe indéniablement un bon moment sur ce jeu qui ne manque évidemment pas d’humour, mais sa replay-value est proche du zéro. Ce n’est pas la faute de l’équipe de programmation qui a conçu des lieux et des missions en grand nombre, mais le principe même du gameplay n’a d’intérêt que le temps de découvrir toutes les surprises qui parsèment les différentes phases du jeu. Une fois que l’on sait où filmer dans le cadre de chaque mission, il ne reste plus qu’à ranger à jamais le jeu dans son boîtier. Mieux vaut considérer le « jeu » des guignols comme une agréable promenade interactive dans leur univers, qu’on se contenterait de visualiser de temps en temps pour rire un bon coup, comme on le ferait pour une rétrospective des sketchs de cette époque.