Réalisation légendaire parmi les très nombreux jeux d’aventure LucasArts de la grande époque, Fate of Atlantis fut une création originale qui lançait l’aventurier au fouet sur les traces des mystères de l’Atlantide face à ses ennemis de toujours, les Nazis. Malheureusement, en dépit d’un scénario qui tiendrait tout à fait la route sur pellicule, il semble que le prochain – et très attendu – quatrième épisode d’Indiana Jones au cinéma, dont le tournage devrait commencer dans les prochains mois (du moins, c’est ce qu’ils nous disent année après année) ne soit pas inspiré de ce synopsis.
Abandonnons là ce douloureux sujet et intéressons nous au contenu de ce jeu d’exception. Lorsque débute cette histoire inédite, Indiana Jones est sur les traces d’une étrange statuette cachée dans les réserves de l’Université Barnett. Après l’avoir retrouvée, Indy ramène l’étrange objet à Marcus Brody et à un scientifique fortement intéressé par la statuette, un certain docteur Smith. Malheureusement, le mystérieux scientifique s’avère être Klaus Kerner, un agent du IIIe Reich, et il s’empare de l’objet avant de fuir avec un complice. Indy, curieux de la nature de la statue qui lui rappelait des artefacts mis à jour lors d’une de ses anciennes aventures en Islande, tente alors de retrouver la trace de Sophia Hapgood, sa coéquipière d’alors, devenue une médium obsédée par l’Atlantide. Cette dernière, que tout oppose à Indy, accepte néanmoins de l’aider dans ses recherches, prétendant en avoir reçu l’ordre d’un ancien dieu Atlante avec qui elle serait en contact en permanence. Leurs premières investigations communes les mèneront en Islande, au temple de Tikal, aux Açores et finalement, à l’Université Barnett, où serait rangé le « Dialogue Perdu » de Platon, seul récit crédible de l’existence de l’Atlantide. Le scepticisme d’Indy vis à vis des délires mythologiques de sa comparse fait place à une forte inquiétude lorsque les différents éléments du puzzle lui révèlent la vérité : les Nazis sont bien à la recherche de l’Atlantide, cette mythique civilisation disparue dont la technologie basée sur un métal très rare, l’orichalque, pourrait donner une puissance incommensurable à leur armée. La quête d’Indy pour arriver dans la cité engloutie avant ses adversaires l’emmènera en Algérie, à Monte-Carlo, en Crète et à Théra, et en mer Egée, dans ces mêmes eaux où de toute évidence, repose la cité perdue.
Hormis les classiques mécanismes à décortiquer et l’atmosphère de ruines oubliées propre à tout jeu estampillé Indiana Jones, l’un des éléments qui contribuent le plus à l’excellente ambiance de Fate of Atlantis réside dans les interactions et chamailleries perpétuelles entre les deux protagonistes principaux. Imaginez d’un côté Indy, rationnel, scientifique, un brin macho et adepte de l’humour à froid (un homme, quoi !) ; et Sophia, mystique, rêveuse, colérique et pleine de mauvaise foi (une femme, quoi !). Avec un tel duo de choc, inutile de vous dire que l’aventure promet d’être pimentée !
Réalisation technique :
Pour un jeu d’aventure en VGA 256 couleurs du début des années 90, Fate of Atlantis réalise la meilleure performance technique possible. Malgré le côté grossier et mal détouré des décors et des personnages lointains et la relative pauvreté des animations (typique des jeux d’aventure de l’époque), les lieux explorés sont superbes et variés au possible. De la jungle sud-américaine aux salles étrangement décorées de l’Atlantide, en passant par les souterrains de Cnossos ou le Sahara, Indy et Sophia verront du pays, c’est le moins que l’on puisse dire ! Des musiques d’excellente facture, représentatives du lieu visité et qui changent constamment de rythme grâce au fameux système Muse, apportent un cachet supplémentaire à cette grande expédition archéologique. La version CD-ROM proposait en outre des dialogues en V.O. qui, à défaut d’être particulièrement bien interprétés, avaient le mérite de proposer une amusante collection d’accents à couper au couteau !
En bref : 19/20 :
L’un des grands points fort du jeu réside dans la possibilité de mener jusqu’à trois aventures différentes. Une fois le Dialogue Perdu de Platon récupéré dans les greniers de l’Université Barnett, trois choix d’aventure s’offriront à vous. Le premier d’entre eux est le mode coopératif où vous pourrez alternativement diriger Indy et Sophia pour résoudre au mieux les énigmes. Par exemple, ce vieux vicelard de Felipe Costa, aux Açores, ne sera prêt à parler affaire qu’avec Sophia, Indy se heurtant systématiquement à une fin de non-recevoir…
Le mode réflexion proposera des énigmes à résoudre en solo, tandis qu’en mode action, Indy aura droit à son quota de pugilats à l’image de ceux qui figuraient dans Indiana Jones & The Last Crusade. Quelques lieux seront différents selon l’optique choisie et les énigmes ne seront pas rigoureusement identiques. Par exemple, le sous-marin nazi ne sera accessible qu’en modes coopératif et réflexion. Le mode réflexion vous permettra de mener une petite course poursuite en voiture (en vue aérienne, ne rêvez pas) dans les rues de Monte-Carlo, tandis que dans la partie action, le labyrinthe de Cnossos sera peuplé de soldats allemands qu’il faudra le plus souvent assommer dans un match de boxe. Les trois aventures convergent de toute façon lorsqu’on arrive dans l’Atlantide.
Les énigmes sont plutôt logiques dans l’ensemble, même s’il faudra parfois sérieusement cogiter pour résoudre les divers problèmes qui se poseront au célèbre aventurier, suivant la grande tradition des jeux LucasArts selon laquelle les objets les plus incongrus trouveront leur utilisation logique à un moment ou un autre de l’aventure.
En dehors des combinaisons d’objet et de la bonne utilisation de ceux-ci, Indy devra parfois résoudre des mécanismes, notamment ceux lui demandant d’aligner correctement les différents disques de pierre atlantes qu’il découvrira, sur base d’une interprétation correcte des indices laissés par le Dialogue Perdu de Platon (qui fait un peu office de Journal du Graal de cette aventure). Le scénario est passionnant et les trois aventures différentes assurent une durée de vie très longue à ce programme. Qui plus est, sans être aussi délirant que les Monkey Island, Fate of Atlantis n’est pas exempt d’humour, qu’il s’agisse de réflexions idiotes et décalées du docteur Jones ou des remontrances perpétuelles de Sophia. Sans oublier de nombreux moments cultes de l’aventure, comme ce marchand arabe qui vous arnaquera dix fois de suite avec de soi-disant « objets rares » avant que vous ne puissiez récupérer l’objet utile pour la suite de l’aventure, la séance de spiritisme où il faudra effrayer Alain Trottier à Monte-Carlo ou la balade en montgolfière. Avec son atmosphère unique et sa très longue durée de vie, Fate of Atlantis est un must-have que tout amateur de jeu d’aventure se doit de posséder !