Originellement conçue par New World Computing, Might & Magic est souvent considérée comme une des trois grandes séries fondatrices du RPG sur ordinateurs avec Ultima et Wizardry. De fait, ce sont des jeux exceptionnels et particulièrement riches jusqu’au septième épisode, à partir duquel il est évident que les concepteurs n’ont pas su la renouveler. Mais revenons à ce qui nous intéresse ici, à savoir le troisième épisode de la série, dans sa version CD-ROM pour PC Engine.
L’action se passe dans le monde de Terra, où règne un désordre absolu. Des myriades de monstres ont fait leur apparition et sèment la terreur dans tout le royaume. Les villes elles-mêmes ne sont plus sûres et les rues réservent leur lot de mauvaises rencontres. Il semble que l’instigateur de tout ce fatras soit une entité dont on ne connait que le nom : Sheltem. Qui est Sheltem, quelle est sa nature, quelles sont ses motivations, tout cela reste des inconnues. Toujours est-il que le roi à fait un appel auprès des aventuriers, ses troupes étant désemparées et trop occupées à défendre la population… Ainsi commence l’aventure de votre équipe de six héros, qui auront entre leur main le destin de Terra…
Migh & Magic 3 commence par une brève introduction animée , exactement la même que la version PC, durant laquelle vous est expliqué brièvement le scénario grâce à des voix digitalisées. Une fois celle-ci terminée, vous avez l’occasion de créer votre propre équipe ou, si vous êtes flemmard, de commencer directement avec l’escouade préconstruite qui, une fois n’est pas coutume, est à la fois équilibrée et efficace. Le jeu en lui même se déroule selon une vue subjective. Le paysage est représenté dans une fenêtre à gauche de l’écran. A droite se trouve une série d’icônes permettant d’effectuer diverses actions (lancer un sort, accéder à l’inventaire des personnages, défoncer un mur…). En bas se trouvent les portraits de vos personnages reflétant leur état. Une gemme au dessus de chaque portrait indique de façon approximative leurs points de vie. Verte quand le personnage est en pleine forme, elle devient rouge quand celui-ci est proche de la fin. Les déplacements se font avec le pad alors qu’un bouton permet de basculer vers le pavé d’icônes. On s’y fait, mais l’interface qui était parfaite à la souris se révèle lourde sur console, particulièrement en ce qui concerne la gestion de l’équipement. En effet, pour voir les effets d’un objets, il faut se rendre dans l’écran de statut du personnage après avoir revêtu l’objet en question, ce qui est assez long et nécessite pas mal de manipulations. Il est donc regrettable que les développeurs n’aient pas adaptés l’interface à la console. Le jeu se joue au tour par tour.
Chaque personnage appartient à une classe que l’on choisit en fonction de ses statistiques : du guerrier au sorcier en passant par les voleurs ou les prêtres, tout y est. Au niveau des compétences d’ailleurs, on retrouve les paramètres classiques : force, endurance, charisme, chance… Ces statistiques évolueront de façon impressionnante au cours de la partie : un barbare débutant avec 18 de force atteindra facilement les 200 en fin de partie. Les statistiques pourront être altérées de façon positive comme négative, temporairement ou définitivement tout au long du jeu. Les personnages sont d’ailleurs gérés de façon assez complexe. Ils peuvent en effet être atteints de diverses « pathologies » plus ou moins handicapantes mais pouvant se révéler fatales si elles ne sont pas rapidement traitées. Outre les classiques empoisonnement et maladie, on trouve le sommeil magique, l’ivresse, la dépression ou même la folie qui sont généralement infligés par des monstres. Par ailleurs, il est intéressant de noter qu’un personnage ne meurt pas quand ses points de vie tombent à zéro. Il est simplement inconscient. Un sort de guérison ou le repos le guériront sans problème. Mais les points de vie peuvent être négatifs. A un certain point, le héros meurt et pour le ressusciter, il faudra payer au temple ou disposer d’un sort de résurrection. Pire encore, il peut être éradiqué, c’est à dire que son corps est détruit. Relever un décédé dans de telles conditions ne se fait pas sans peine. Un sort permet de le faire mais n’est accessible qu’à un stade très avancé. Reste la solution du temple, qui pourra exécuter une telle action, pour un coût exorbitant. Mais quel que soit le moyen employé, un personnage éradiqué gardera ad vitam aeternam les stigmates de sa mésaventure et ses caractéristiques seront revues à la baisse de façon permanente…
Might & Magic, c’est un peu le gigantisme en fait. L’armement est des plus complet et comprend autant diverses sortes d’épées que des naginatas ou des nunchakus. Il en va de même avec les armures, très variées, et des objets magiques. La diversité de l’arsenal est encore renforcé par la gestion des matériaux les composant, qui influe sur leur puissance. Bien entendu, certains objets sont dotés de capacités magiques et là encore, les possibilités sont des plus nombreuses… Vous pourrez également utiliser des armes de type « missile » comme des arcs ou des arbalètes. Tous ces objets sont, comme il se doit, réservés à une ou plusieurs classes de personnages. N’espérez pas faire porter une armure de plates ou un maul à un mage… Au niveau de la magie, le jeu fait dans la démesure puisque j’estime que le nombre de sorts s’élève facilement à plus de 70, regroupant autant des sorts d’attaque plus ou moins dévastateurs que des sorts de défense et de guérison ainsi que des sorts d’utilité diverse, comme Create Rope qui crée une corde permettant d’accéder aux cavernes. L’efficacité des sorts d’attaque est variable en fonction des monstres, certains étant plus ou moins résistant à certains types de magie.
Le bestiaire est également des plus variés. Chaque parcelle du territoire de Terra est envahie de monstres très différents par leurs caractéristiques et leur type d’attaque. Certains sont des brutes sanguinaires tablant sur leur simple puissance, d’autres vous pourriront la vie avec des sortilèges. D’autres enfin ont des capacités aux effets parfois désastreux : vieillissement magique, pétrification ou tout simplement éradication directe d’un personnage…
Le territoire de Terra est gigantesque et l’explorer demande beaucoup de temps, d’autant que bien des lieux ne sont accessibles que si vos personnages ont les compétences secondaires nécessaires. Ces compétences, que vous acquerrez généralement en les achetant auprès de maîtres, ont des effets des plus variés. L’escalade vous permet ainsi de franchir les montagnes et d’accéder à des lieux autrement inaccessibles. La cartographie vous permet d’obtenir l’auto-mapping alors que la musculation augmente votre endurance et votre force. Si le monde de Terra est vaste, il est loin d’être vide, car les donjons sont très nombreux et les quêtes innombrables. De fait, Might & Magic 3 est immense, et c’est bien là dessus que les concepteurs ont joué.
Pour avoir fini le jeu à l’époque sur PC, je vais être un peu forcé de faire la comparaison entre les deux versions. Il est remarquable de constater la ressemblance graphique. Certes la PC Engine n’affiche pas des graphismes aussi colorés et fins que le VGA, mais globalement, le jeu est aussi beau malgré une résolution sensiblement inférieure. Bravo donc aux concepteurs de ce point de vue. L’animation est à peu près équivalente à la version d’origine, juste un peu plus lente mais cela ne gêne absolument pas. L’ambiance sonore est par contre beaucoup plus réussie. Même si les musiques ne sont pas extraordinaires, elles profitent largement du médium CD. Les sons, pour leur part, sont corrects même si certains sont insupportables (je pense surtout aux fontaines). La jouabilité est donc le point faible à cause de la lourdeur de l’interface, comme je l’ai expliqué plus haut, mais aussi à cause d’un léger manque de souplesse qui, s’il n’altère pas vraiment le gameplay (le jeu est en tour par tour), est un peu gênant. Nul besoin de préciser que la longévité est colossale, je pense que mon argumentation précédente l’a bien démontré. En s’attardant sur les quêtes connexes, il est fort probable qu’il faille plus de 150 heures de jeu pour achever Might & Magic 3 (de mémoire, quand j’y ai joué sur PC).
Might & Magic 3 est donc un jeu de longue haleine qui vous fera passer de très longues heures de plaisir si vous accrochez. Ce jeu de rôle, à mon sens excellent, a subi là sa meilleure adaptation. : il est clair que la version PC Engine est supérieure tant à celle sur Amiga que sur Super NES. Seul handicap, l’interface peu pratique, qui donne vraiment l’avantage au PC et à sa souris. Mais comme le jeu tourne mal sur les machines actuelles (pas de sons autrement que pas le beeper), je vous recommande vivement de vous tourner vers ce portage sur NEC, car c’est un grand jeu!
Note : Le jeu nécessite la System Card 3 pour fonctionner correctement.