Irrévérencieux, ordurier, très branché cul et humour pipi-caca, battant en brèche tout ce qu’on est en droit d’attendre d’un dessin-animé… les qualificatifs ne manquent pas pour décrire South Park, la série trash imaginée par Trey Parker et Matt Stone en 1997. Pour ceux qui s’étaient retirés dans une caverne sur la lune ces dix dernières années, South Park présente la vie quotidienne d’une petite ville du Midwest américain, à travers les aventures de quatre garnements : Kyle, Stan, Eric Cartman et Kenny (dont la particularité est de mourir de manière atroce à chaque épisode). Cette petite cité en apparence innocente est en réalité un véritable nid de dégénérés profonds : la mère d’Eric Cartman est par exemple une hermaphrodite, qui joue incognito dans des pornos allemands ; Mr. Garrisson, l’instituteur des garnements, est un transsexuel contrarié qui tient de longs monologues avec sa marionnette, Mr. Toc, dont il se sert à des fins éducatives. Sur la colline habite le Dr. Mephisto, qui crée des clones monstrueux et des animaux à neuf culs, tandis que le célèbre Al Super Gay tient une maison de retraite pour animaux homosexuels. De nombreuses célébrités passent également par South Park au fil de la série. Barbra Streisand, transformée en Godzilla, tenta un jour de détruire la ville, mais Robert Smith de The Cure, devenu Mothra, l’en empêchera. Jésus tient également une émission de radio hebdomadaire intitulée « Jésus et ses potes », et Satan attend impatiemment d’envahir la terre dès que le taux de vulgarité du dessin animé aura atteint un point de non retour (ce qui lui permettra en même temps d’échapper aux exigences sexuelles de Saddam Hussein, son amant). Bref, dans l’univers de South Park, on ne respecte rien ni personne. C’est même à se demander comment il fut possible d’adapter un tel univers sur une console Nintendo. La réponse tient en un mot : édulcoration.
Akklaim a néanmoins réussi à conserver les éléments les plus farfelus et décalés de l’univers de South Park, mais a assez logiquement fait l’impasse sur toutes les outrances à caractères politique, religieux ou sexuel. Suite au crash d’une météorite dans les environs, la petite ville est menacée par une invasion de créatures galactiques agressives. Des dindons mutants et des vaches carnivores hantent la campagne, tandis que des Petits gris et des clones agressifs s’infiltrent dans les rues de la ville. Face à la menace galactique, un seul homme peut sauver South Park : il s’agit de Chef, le cuisinier paillard de l’école municipale. Ou plutôt des quatre garnements qui prennent toutes les paroles de Chef pour l’Évangile : Stan, Kyle, Eric Cartman et Kenny. En choisissant l’un de ces quatre micro-héros, le joueur devra effectuer plusieurs missions dans les alentours de la ville et détruire toutes les créatures hostiles de l’endroit.
Pour ce faire, les armes sont relativement amusantes : boule de neige (et son tir secondaire destructeur : la boule de neige chargée d’urine), sniper lance-œuf, lanceur de vaches explosives, et pistolet à ventouses. Les bonus sont dans le même ton, avec les fameux Cheesy Poofs de Cartman pour récupérer de l’énergie, et le célèbre « Petit caca Noël » comme bouclier protecteur. Chaque zone de jeu propose un unique type d’ennemi à éradiquer. Dans le premier stage par exemple, on explorera la ville en elle-même et les collines avoisinantes dans une traque sauvage au dindon mutant. L’affrontement final de cette mission vous confrontera à la grand-mère de tous les dindons mutants, dont, à n’en pas douter, le glougloutement caverneux hantera vos nuits durant de longues semaines.
Bon, c’est bien beau tout ça… ça a l’air très original, très drôle, délirant d’un bout à l’autre… sur le papier en tout cas. Mais qu’en est-il en pratique ? Hé bien, c’est très simple : South Park est un jeu dont le player fun s’étend… sur une dizaine de minutes montre en main. Prenez la réalisation graphique par exemple : on est positivement surpris par la grande fidélité au dessin animé qui s’en dégage. Mais bon, l’esthétique South Park reste ce qu’elle est, et l’allure très géométrique et dépouillée des personnages et des décors limite rapidement les possibilités de créer quelque chose de luxuriant. Même remarque pour la bande sonore : les bruitages sont rigolos et le glouglou des dindons vous fera hurler de rire la première fois… sourire la dixième et soupirer la vingtième, vu que c’est à peu près tout ce qu’on entendra au fil de la progression. Mais d’une manière générale, c’est surtout la répétitivité et l’absence totale de rythme et d’originalité qui coule totalement South Park. Avec un seul type d’ennemi par niveau, un nombre d’arme assez faible et des bonus qui n’ont comme seule originalité que leur aspect tiré de la série, la progression est monotone à mourir et aucun élément qui sortirait de l’ordinaire ne vient relancer l’action en cours de jeu. Le début de chaque mission est agréable, le temps de découvrir les nouveaux décors et ennemis mais quelques minutes plus tard, on joue déjà par habitude et obligation, dans l’espoir d’arriver le plus vite possible au niveau suivant et découvrir de nouveaux paysages… et ce phénomène se répète malheureusement tout au long du jeu. South Park n’est pas bien difficile à boucler… mais il est douteux que la majorité des joueurs aillent jusque là…
En bref : 5/20 South Park est l’exemple typique du jeu à licence complètement bâclé. Avec l’univers complètement loufoque de la série, Acclaim aurait pu songer à un jeu d’aventure bien délirant… mais non : marketing oblige, South Park était voué à devenir un FPS, genre qui récoltait les faveurs d’à peu près tout le monde à cette époque. Et hormis le design de la série, assez curieux de prime abord, il s’agit bel et bien d’un des FPS les plus plats et inintéressants auxquels il m’ait été donné l’occasion de jouer.