Le 8 août 2008 à 8h08 (soit 08/08/08 8:08 pour ceux qui avaient pas saisi la subtilité) ont démarré les JO de Pékin. Vingt ans plus tôt, Seta sortait un jeu baptisé 8 Eyes sur NES. Si ça c’est pas un signe que tu peux te foutre la station Mir dans le cul, Paco, alors je m’appelle plus Nostra d’Anus.
LA VIE EN ROSE
Dans un lointain futur, la Terre se remet péniblement d’un conflit atomique qui a apporté son lot de destructions, de mutations radioactives, de guerres de clans et de Star Academyciens au chômage. Le Roi du Monde (preuve que si la Starac’ est morte, Armande Altai a survécu et a bouffé le Roi Soleil) tente paisiblement de reconstruire, aidé en cela par la puissance des huit Yeux. Et surtout par les cohortes d’entrepreneurs chinois qui ont flairé la bonne affaire.
Pour ceux qui se sont arrêtés à « Yeux », sachez que non, le Roi du Monde n’est pas une araignée ; les yeux en question sont des gemmes qui sont nées au coeur des huit plus grosses explosions nucléaires de l’Histoire et en ont concentré toute la puissance. Aux mains d’un saint homme elles se révèleront bénéfiques, mais entre de mauvaises mains elles pourraient raser ce qui reste de la planète.
Et comme de par zazard, les huit Ducs, les seconds du Roi, lui piquent ses Yeux et le banissent au fin fond du trou-du-cul des terres radioactives de la mort que tu t’en sortiras pas indemne. Vous, vous êtes Orin le Falconnier, parce qu’il en faut bien un, et en compagnie de votre compagnon déplumé Cytrus vous partez à la recherche des Ducs. Et des Yeux. Ca va, ça suit ?
ALLEZ, ATTAQUE MEDOR !
8 Eyes, c’est comme si le level-designer de Castlevania avait copulé joyeusement avec le programmeur de Mega Man. Il s’agit d’un jeu de plates-formes/action comme dans le premier, mais où on peut choisir l’ordre des niveaux comme dans le second. Il faut traverser les labyrinthes d’escaliers jusqu’à parvenir au boss comme dans le premier, et le vaincre pour récupérer une arme contre laquelle sera vulnérable un autre boss comme dans le second.
Dans le détail, vous allez traverser huit pays (Espagne, Italie, Inde, Allemagne, Afrique (oui je sais c’est pas un pays mais les développeurs ne le savent pas), Arabie Saoudite et Egypte, plus le dernier niveau qui n’est pas situé géographiquement), et plus précisément huit bâtisses situées dans ces pays : pyramide, maison coloniale, château fort, etc.
Orin se dirige quasiment comme un Belmont : le bouton A permet de sauter, le bouton B de frapper. Haut permet de grimper dans les escaliers - vous ne pouvez alors pas sauter - et, associé au bouton A, il permet d’utiliser une arme secondaire parmi celles que l’on a récupérées sur les cadavres des ennemis (boomerang, dagues, pistolet, CD de Raphaël, etc.) à condition qu’il vous reste du mojo.
C’est ainsi que j’appelle la jauge située le plus en haut de l’écran, et qui se remplit en ramassant les croix blanches que libèrent les ennemis morts. Les croix rouges servent pour leur part à régénérer votre jauge de vie et celle de votre compagnon à plumes.
Oui, lui aussi a sa propre jauge de vie, et pour cause : il s’agit d’un personnage à part. Si vous jouez à deux, le deuxième joueur contrôle le faucon. Si vous jouez seul, vous lui faites quitter votre épaule en appuyant sur haut plus B, et vous le faites attaquer en appuyant sur bas plus B. Ainsi, la bestiole peut attaquer les ennemis innaccessibles ou invulnérables aux attaques normales (ils ne se distinguent pas des autres, vous vous en apercevez lorsqu’ils commencent à vous taper sur la gueule et que vous ne pouvez pas répondre). Mais surtout, il peut actionner les leviers innaccessibles qui ouvrent la plupart des portes des donjons, portes qui ne restent ouvertes qu’un instant.
Une fois le boss vaincu (ce sera d’autant plus rapide que vous aurez en main l’arme qu’il craint, à vous de trouver le bon chemin car rien ne vous l’indique), vous prenez le thé au coeur du donjon, servi par un squelette ! Je vous jure que c’est vrai ! Non je n’ai rien pris. A ce moment-là sera indiqué en haut d’écran le mot de passe nécessaire pour revenir à cet endroit lors d’une prochaine partie.
RIEN QUE POUR VOS YEUX
Le hasard fait bien les choses, dit-on. La Seita… Pardon, la Seta Corporation aussi, preuve en est ce 8 Eyes des plus satisfaisants, poil aux dents.
Déjà, petite cerise sur le gâteau que nous n’avons pas encore goûté, le jeu se paye le luxe d’un scénario. Un scénario abracadabrantesque avec un fauconnier à la con dans un monde à la Mad Max, mais un scénario quand même, et quand on sait à quel point les jeux NES en sont désespérément dépourvus on ne peut que féliciter la Seta d’avoir filé un taf en trois huit à trois scénaristes sans domicile fixe qui ont pu ainsi se payer un litron de rouge en racontant leur cauchemar aviné de la veille.
Ensuite, 8 Eyes tire parti de la machine du point de vue visuel. Ben oui : on sait tous que programmer sur NES équivaut à vouloir faire une course de dragsters avec un robot mixeur, alors plutôt que de chercher à nous en mettre plein la vue avec trois pauvres pixels, les développeurs ont pondu un jeu à l’ambiance assez glauque, une alternative au Castlevania de Konami avec une architecture des niveaux et un panel d’ennemis très proches.
Niveau animations, pas de miracle non plus. Les différents protagonistes se déplacent avec le naturel de Jeanne Moreau en déambulateur, et seul le faucon dispose d’un plan de vol un minimum cohérent, même si on se demande comment il fait pour trouver ses courants chauds dans une baraque calefeutrée mieux qu’une Inuit frigide. La bande-son est en accord avec ce que l’on peut attendre sur cette bécane. En gros on a l’impression d’écouter Tata Françoise qui fait frire le chat en sifflotant, c’est insupportable même pour un non-mélomane et ça pousse le vice jusqu’à tourner en boucle toutes les trente secondes.
Bref, la réalisation technique est digne de la NES, ni plus ni moins, mais on savait à quoi s’attendre avant de commencer. Par contre, la bonne surprise vient du gameplay. Très proche de celui de Castlevania, le petit plus vient non pas de Monsieur Plus mais du faucon qui se dirige très facilement et s’avère amusant. Par contre je ne vous cache pas que ça doit être particulièrement chiant pour le joueur deux de passer son temps les plumes à l’air.
La durée de vie du soft est malheureusement son plus grand point faible. Les niveaux se traversent vite, et seuls les stages allemand et africain vont vous faire baver. Ce sont des labyrinthes façon huit bits. Vous savez, de ces dédales où tant que vous ne trouvez pas le bon chemin vous pouvez tourner en rond des plombes, passant toujours par la même salle jusqu’à vous en bouffer les burnes.
Toutefois je mets un petit bémol sur la relative courtitude du soft, vu que la difficulté est intense. C’est-à-dire qu’en fait, à bien y réfléchir, je ne connais pas de jeux NES franchement faciles. Comme toujours, il vous faudra apprendre par coeur les pièges des niveaux et les patterns des ennemis, ce qui implique un tas de morts, de resets violents à coup de tatanes dans la machine, de jetés de manettes digne du concours du Guiness Book et de coups de boule à la petite soeur qui entre dans la chambre en venant pleurer que le chat s’est fait griller par Tata. Sale gosse, va !