Dans ce jeu de plates-formes peu connu, Max D.Cap, le méchant du coin, s’est élevé des ténèbres et emparé du pays (pays qui a plus ou moins la forme d’un corps humain fraîchement disséqué, c’est vous dire s’il y fait bon vivre ). Le seul espoir de ce monde fleuri est Chuck D.Head, une créature conçue par un savant fou mais plein d’humanisme. Chuck D.Head est un abominable mort-vivant trapu et contrefait, enveloppé de bandelettes, et qui a l’ultime mauvais goût de ne pas avoir de tête. Ce qui ne l’empêche cependant pas d’avoir des yeux et même un dentier extensible pour mordre ses adversaires. En résumé, D.Head attaque D.Cap (m’a fallu 10 ans pour piger le jeu de mot lamentable contenu dans le titre, mais j’y suis arrivé !).
Le plus surprenant, c’est qu’on ne tarde pas à constater que Decap Attack est une copie conforme, dans un univers différent, du célèbre Psycho Fox de la Master System. En dehors de l’univers macabre, tous les éléments qui avaient assuré le succès du jeu au petit renard ont été repris sans la moindre gêne : les mats auxquels on s’accroche pour se projeter plus ou moins loin, les ennemis sur lesquels il faut sauter plusieurs fois pour les enfoncer dans le sol, ou encore les bonus aux effets variés (course plus rapide, sauts plus puissants, invincibilité, immobilisation des ennemis ) qu’on récupère dans des statues et qu’on peut utiliser en cours de partie. Dans Psycho Fox, certaines de ces capacités spéciales étaient obtenues à chaque fois que l’on se transformait en un nouvel animal. De même, on retrouve de nombreux éléments du décors communs aux deux jeux comme les ponts qui s’effondrent, les souffleries à air comprimé et même la manière qu’avait le petit renard de pédaler désespérément dans le vide s’il dérapait malencontreusement hors d’une plate-forme.
Le mode d’attaque est également pompé sur Psycho Fox. Dans ce dernier, on mettait parfois la patte sur un petit oiseau qu’on pouvait projeter sur les ennemis, qui revenait comme un boomerang après quelques secondes et qui permettait de ne pas périr immédiatement si on était touché. Le principe est rigoureusement identique dans Decap Attack si ce n’est que le petit oiseau est devenu un petit crâne rigolard. Les programmeurs ont même poussé le vice jusqu’à réutiliser le niveau bonus de Psycho Fox, ce labyrinthe où il fallait parier de l’argent afin que les renards suivent les différents chemins comme des rats de laboratoire et récoltent soit des bonus, soit rien du tout. Au vu de ce clonage presque parfait, Decap Attack devrait donc être aussi exceptionnel que son renard de frère incestueux, pas vrai ? Pas vrai ? Ben non, en fait, pas trop. Pourquoi ? Réponse (ou plutôt absence de réponse) un peu plus bas
Réalisation technique :
Decap Attack propose une animation fluide, bien que le jeu ne soit pas excessivement rapide. Malgré des bruitages déplaisants, les thèmes musicaux sont pour une fois d’excellente facture, à la fois rythmés et macabres. Le style graphique choisi est très spécial, avec un étrange mélange de couleurs très (trop ?) vives et très (trop ?) austères. Parfois, les décors donnent l’impression d’être très détaillés, parfois d’être désespérément vides. Il est assez difficile de se positionner pour déterminer si graphiquement, le jeu est agréable ou raté. Quant au personnage principal, il est original et se maîtrise relativement bien (bien qu’il soit nécessaire de lui faire prendre un peu de vitesse pour qu’il saute efficacement).
En bref : 13/20
Curieusement, on s’ennuie relativement vite avec ce Decap Attack, alors que Psycho Fox était un des meilleurs jeux de plates-formes de la Master System. Pourtant, le gameplay, les éléments de jeu, les obstacles, les modes d’attaque, tout est pratiquement identique entre les deux softs. Tout au plus Decap Attack oblige-t-il le joueur à partir à la recherche d’items obligatoires pour terminer chaque niveau. Même en dehors de toute comparaison, Decap Attack renferme tout ce qu’un jeu de plates-formes de qualité est sensé offrir. Alors pourquoi diable ne parvient-on pas à éprouver un réel attachement pour cette variation sur le même thème ? Pour plusieurs raisons assez abstraites, de mon point de vue. Les stages sont tout d’abord plus petits, plus courts et moins bien construits. Ensuite, l’univers est bancal, mixant le gothic-horror avec des drôles de petites bêtes poilues qui n’ont pas grand chose à faire là. On ne parvient pas à s’attacher réellement au personnage ou aux décors. Il s’agit sans doute là de la principale tare de Decap Attack, celle qui le relègue au rang d’un jeu de plates-formes de seconde zone, à juste titre tombé dans l’oubli. La même chose avec un petit canidé dans un univers japonais, et on applaudissait pourtant des deux mains. C’est bizarre la vie, par moments