On connaissait Gate of Thunder, magistral shoot them up du CD-Rom NEC, unanimement acclamé comme l’une des plus belles réussites du genre durant la première moitié des années 90. Sa suite, Lords of Thunder (ou Winds of Thunder au Japon), fit un peu moins parler d’elle. Pourtant, cette séquelle fut en tout point équivalente à l’épisode fondateur de la série. La principale différence entre les deux softs réside dans le changement radical d’univers. Alors que le premier se déroulait dans l’espace, le second prend place dans l’univers heroic-fantasy de la planète Mystra. Les commandeurs du puissant empire Garuda tentent de réveiller un dieu antédiluvien, qui ravagera toute la planète dès qu’il se sera levé de son sommeil millénaire. Le seul espoir des peuples libres de Mystra repose sur les épaules du dernier des chevaliers Drak, un guerrier volant aux grands pouvoirs. Le chevalier devra traverser les 6 continents de Mystra et défaire le commandeur de Garuda en charge de la région. Ces 6 continents proposent les types d’environnements habituels des shoot them ups se déroulant sur la terre ferme : un monde désertique, une région marécageuse, un continent volcanique, un continent montagneux où on évoluera en haute altitude, etc.
L’achat des multiples bonus disponibles (plusieurs types de power-ups, plusieurs types de boucliers protecteurs, de l’énergie, des super-bombes, des crédits supplémentaire pour continuer la partie) se fait dans un magasin avant le commencement de chaque stage, au moyen des gemmes que l’on a gagnées en abattant les adversaires. Les ennemis détruits laissent en effet systématiquement derrière eux une gemme, de plus ou moins grande valeur et, plus rarement, de l’énergie supplémentaire. Contrairement à nombre de ses congénères, Lords of Thunder ne permet donc pas de changer d’arme continuellement en cours de stage. Avant chaque niveau également, on peut sélectionner l’armure que l’on endossera pour affronter les troupes de l’empire. Ces armures, dédiées aux quatre pouvoirs élémentaires, définissent le type de projectile qui sera utilisé durant le stage.
Réalisation technique :
Un rien moins beau que sa version NEC (principalement au niveau des couleurs), Lords of Thunder a pourtant l’immense mérite de proposer plusieurs univers au design intéressant, et des décors d’arrière-plan parfois extraordinaires. Le scrolling, qui évolue horizontalement, verticalement ou en diagonale selon le moment, contribue à créer cette atmosphère unique, ce qui range Lords of Thunder dans le peloton de tête des shoot them ups au niveau de l’atmosphère générale qui s’en dégage. Sur le continent de Cielom, par exemple, l’ascension sous un ciel crépusculaire vers le sommet des montagnes fait arriver le Drak dans des décors dominés par un ciel nocturne, parsemé de magnifiques palais célestes. Il n’arrive pas si souvent qu’on soit sincèrement émerveillé par l’esprit graphique d’un jeu de 1995. Précisons aussi que ce fameux scrolling est d’une fluidité exemplaire, malgré le nombre imposant de sprites à l’écran, et qu’il lui arrive même d’être foutrement rapide à l’occasion. Même constat pour l’opposition ennemie : si les adversaires de petite taille n’ont rien de particulièrement marquant, les boss et les ennemis imposants (par exemple, le dragon qui sort du marécage, ou l’étrange mélange de crustacé et de saurien en armure d’or qui sert de boss au premier stage) sont généralement superbes. La jouabilité est impeccable : malgré l’absence de possibilité de changer d’arme en cours de stage, Lords of Thunder propose une action qui ne s’arrête jamais, une opposition adverse continuelle et trépidante et une progression fertile en surprises et en poussées d’adrénaline. Le fait de pouvoir choisir son stage de départ et d’en choisir un autre lorsqu’on utilise un crédit après le game over est une bonne idée, et permet d’éviter tout ennui lié au fait qu’on soit désespérément coincé dans un stage particulier. Cependant, Lords of Thunder est également un soft redoutablement difficile : si le Drak peut encaisser pas mal de coups avant d’être détruit, il ne dispose que d’une seule et unique vie pour terminer le jeu. Heureusement, Lords of Thunder propose 3 crédits pour continuer la partie et, si on gère bien le truc, il est possible de se racheter un crédit supplémentaire après chaque décès impromptu. Impossible de terminer ce tour d’horizon sans parler de la bande sonore. Si les bruitages demeurent standards, les musiques sont tout simplement à tomber par terre. Mélange foudroyant de mélodies épiques et endiablées remixées à la sauce heavy metal, on se les enregistrerait bien sur un CD, histoire de se les passer à l’aise sur une chaîne hi-fi dotée d’énormes haut-parleurs. C’est avec un résultat de ce genre qu’on comprend à quel point la bande sonore joue un rôle capital dans la réussite de n’importe quel jeu à l’action soutenue.
En bref : 18,5/20
Il y a des jeux comme ça, qui vous filent le frisson sans qu’on comprenne très bien les raisons. Et dès les premières secondes de Lords of Thunder, on se retrouve à lutter avec acharnement pour sa survie avec une irrépressible envie de vaincre le jeu. On peut bien sûr tenter d’y trouver des causes rationnelles… quelque chose dans la réalisation ou le gameplay par exemple… Lords of Thunder est très bien fichu techniquement, c’est incontestable, mais il ne surclasse pas particulièrement un Thunderforce IV, un Gleylancer ou même un Gynoug de ce point de vue-là. Non, il s’agit d’autre chose, d’une ambiance particulière, d’un esprit unique, d’une esthétique qui n’appartient qu’à ce jeu, d’une tonne d’éléments qui contribuent à faire de Lords of Thunder un shoot qu’on est incapable d’abandonner après l’avoir commencé. Même la difficulté plutôt relevée ne parvient pas à entraver cette rage de vaincre et cette obsession de renvoyer l’empire Garuda garnir les poubelles de l’histoire. On aurait pu penser que l’impossibilité de changer d’arme en cours de stage serait un défaut, mais on n’y fait même pas attention à vrai dire. Lords of Thunder est l’un des spécimens du genre les plus réussis de cette époque, toutes plates-formes confondues, et entre sans difficulté dans le club très fermé des shoot them ups qui sont entrés dans l’éternité.