Phantasy Star est un jeu vidéo Master System publié par Segaen 1987 .

  • 1987
  • Role Playing Game (RPG)

Test du jeu vidéo Phantasy Star

4.5/5 — Exceptionnel ! par

Lorsqu’il sortit en 1988, Phantasy Star était vendu à un prix tout simplement prohibitif (70$, pratiquement le prix de la console !), mais il faut dire que le titre avait tout de la Superproduction : 512 KB de Rom, 5 emplacements de sauvegarde et un design qui renvoyait tous les RPG contemporains au rang d’aimables antiquités. Nettement en avance sur son temps, ce chef d’œuvre, épisode fondateur d’une véritable légende, marqua le véritable point de rupture, à compter duquel RPG japonais et occidentaux divergèrent profondément. A la base simple imitation peu inspirée des références américaines du jeu de donjon, les softs made in Japan se dirigèrent à partir de cette époque vers de grandes quêtes flamboyantes, truffées de rebondissements, de romance, de ficelles parfois cousues de fil blanc mais tout à fait dans l’esprit des grandes luttes manichéennes popularisées par les mangas.

Constamment affinée au fil des épisodes suivants, la trame de cet épisode fondateur prend déjà place dans le système solaire d’Algol et plus précisément sur ses trois planètes principales : Parma, Motavia et Dezolis. Le seigneur Laschiec, autrefois dirigeant plein de sagesse de la confédération, s’est vautré de manière inexplicable dans le côté obscur de la force. Alys, une jeune résidente de Parma, a vu son frère Nero sauvagement assassiné sous ses yeux par la police secrète du tyran et décide qu’il est temps qu’un vent de liberté souffle sur Algol, un vent de liberté qui passera par sa vengeance. La jeune fille se fixe immédiatement comme quête sacrée de renverser la tyrannie de Laschiec et de découvrir comment le souverain a pu basculer à ce point dans la cruauté et le vice. De rebondissements en rebondissements, Alys délaissera peu à peu son désir de revanche, une fois découvert que le danger qui menace Algol est bien plus conséquent que les divagations sanguinaires d’un monarque vieillissant. Conformément à la tradition rôliste, Alys ne pourra vaincre les forces du mal par sa seule volonté, aussi grande soit-elle. La première partie de l’aventure consistera à parcourir la galaxie en quête d’alliés dévoués. Au nombre de trois, ces combattants seront Odin, un féroce guerrier, Noah - rebaptisé Lutz dans les épisodes postérieurs - le mystérieux mage esper et Myau, un curieux chaton parlant. Chacun de ses personnages dispose évidemment de capacités différentes : aussi Odin sera-t-il le « tank » de la petite compagnie, tandis que Noah, malgré sa vulnérabilité, pourra renverser le cours d’un combat pour autant que ses pouvoirs magiques soient judicieusement utilisés. Si Noah est le véritable magicien du groupe, Alys et Myau peuvent également utiliser quelques capacités spéciales. Ces pouvoirs peuvent être offensifs (tornade, blizzard, etc.), protecteurs (barrière magique), curatifs ou de soutien (terreur, vitesse, etc.). Il s’agit d’ailleurs d’une autre innovation apportée par Phantasy Star : en lieu et place d’une bande de guerriers stéréotypés et anonymes, vos trois alliés ont un nom et, dans une certaine mesure, un rôle à jouer dans l’histoire, fut-il minime. Phantasy Star voit également l’apparition du petit personnage « kawaï » (mais pas inefficace du tout) en la personne de Myau. La plupart des RPG qui suivraient utiliseraient ce gimmick pour s’attacher la sympathie des jeunes joueurs.

Les immenses territoires vierges des trois planètes d’Algol sont tout sauf des zones paisibles et, dès que l’on quitte la sécurité des villes et des villages algoliens, de nombreuses créatures mutantes tenteront de vous ajouter à leur menu journalier. Les combats surviennent donc de manière aléatoire, autre constante de la série des Phantasy Star (un peu déplaisante celle là, d’ailleurs..!), et se dérouleront suivant un système de tours de jeu. Alys et ses alliés affrontent à tour de rôle le ou les adversaires qui leur font face. Il est également possible de fuir un combat (cela fonctionne assez souvent), d’utiliser un item (les mêmes que l’on retrouvera tout long de la série, même s’ils portent des noms différents : Peromate et Peruginin pour l’énergie, Escaper pour quitter un donjon sain et sauf, antidote pour lutter contre le poison) ou de parler à l’adversaire, ce qui permet parfois un dénouement heureux pour autant que l’intéressé soit doté d’une intelligence minimale (les rôdeur Motaviens ou les habitants de Dézolis, par exemple). Chaque victoire est récompensée d’un nombre variable de points d’expérience ainsi que par quelques mesetas, la monnaie locale. Les quatre alliés deviendront de plus en plus puissants et résistants au fur et à mesure qu’ils gagneront des niveaux d’expérience mais pour ce faire, il faudra passer au préalable par de longues heures de levelling sauvage…!

Les villes sont architecturalement similaires d’un bout à l’autre du jeu et on retrouve les mêmes types de services sur les trois planètes : quelques villageois qui vous donneront parfois des informations utiles sur la suite des événements, un armurier, un herboriste et un hôpital pour se soigner. De temps à autre, au fur et à mesure que le scénario dévoilera ses ramifications, on devra également terrasser un ennemi beaucoup plus puissant, qui fera donc office de boss intermédiaire (une gorgone, un cyborg, un dragon, etc…).

Réalisation technique :

Même sa réalisation technique plaçait Phantasy Star nettement au dessus de ses contemporains. Certes, les sprites sont assez petits et les déplacements sur la carte principale n’ont rien de visuellement très ébouriffant mais n’oublions pas que Phantasy Star fête aujourd’hui ses deux décennies d’existence. Sans être extraordinaire, Phantasy Star n’en reste pas moins plutôt joli et surtout, l’impression d’évoluer à travers un monde cohérent et élaboré avec précision est très présente. Les affrontements contre les monstres – pour la plupart assez originaux - sont réussis et on notera avec satisfaction des arrière-plans changeants suivant le type de terrain sur lequel on se trouve. Enfin, on ne peut faire l’impasse sur l’exploration des donjons et autres cavernes qui se déroulent selon un scrolling en pseudo 3D. Malgré l’aridité des décors, ces déplacements offrent un rendu extraordinaire pour une Master System, dont nombre de jeux Megadrive utilisant le même angle de vue et pas mal de RPG sur micro en image-par-image pourraient prendre de la graine. Reste que cette prouesse possède tout de même un revers : comme il ne dispose d’aucun élément décoratif pour se repérer dans ces labyrinthes, le joueur en sera quitte pour dessiner de longs et pénibles plans des donjons sur une feuille de papier (même si un item à dénicher dans le labyrinthe donne accès à l’auto-mapping). Hormis ce scrolling impressionnant, le reste du jeu reste relativement peu « animé », mais il est vrai que le genre ne s’y prête pas particulièrement. Au niveau de la prise en main, il m’est personnellement un peu difficile de juger. Le « système Phantasy Star » m’a toujours paru relativement instinctif mais je suis conscient que tout le monde ne partage pas mon opinion sur la question. Qui plus est, j’ai découvert cet épisode fondateur après les épisodes 2 et 3 sur Megadrive, et il m’a donc semblé extrêmement simple à manipuler. Enfin, la bande sonore est tolérable, avec quelques mélodies intéressantes ce qui, pour une Master System, est tout de même assez rare pour qu’on prenne la peine de la signaler.

En bref : 18/20

Phantasy Star est le meilleur RPG de la Master System, notamment par l’absence de concurrence sérieuse (qui a dit « Miracle Warriors » ?). Quand bien même cela aurait été le cas, je doute fort de la capacité d’un autre soft à concurrencer efficacement Phantasy Star. Toutes les bases de ce qui ferait le bonheur des Segamaniaques rôlistes pendant près de 10 ans ont été posées par ce premier jeu. Evidemment, Phantasy Star reste encore maladroit sous certains aspects : le scénario est bien moins élaboré qu’il ne le deviendrait dans les épisodes suivants. Le levelling imposé est parfois fastidieux et il existe une possibilité de devenir fou dans les dédales en 3D, une fois la prouesse technique admirée. Quoi qu’il en soit, par rapport au commun des jeux de rôle de cette époque (généralement des clones plus ou moins inspirés les uns des autres), Phantasy Star mettait une sérieuse claque à tout le monde. L’univers d’Algol reste étrangement attachant, de même que certains personnages et boss demeurent inoubliables (je pense particulièrement au petit Myau !). Ce premier épisode, brillamment réalisé, est un passage obligé pour tous les fans de la série qui veulent remonter aux sources. J’irai même jusqu’à dire qu’il est plus attrayant que le deuxième épisode, à mon sens le plus frustrant et le moins séduisant de la série. Le commencement d’une légende, tout simplement.

Phantasy Star