Suikoden Tierkreis est un jeu vidéo DS publié par Konamien 2008 .

  • 2008
  • Role Playing Game (RPG)

Test du jeu vidéo Suikoden Tierkreis

3.5/5 — Très bien par

Depuis le très discutable Suikoden V, les amateurs de la série n’avaient plus rien à se mettre sous la dent. C’était à se demander si Konami se souvenait encore qu’elle avait autre chose dans son catalogue que les Pro Evolution Soccer ou les Bemani. Et puis un beau jour de 2008, on apprend que la société a déposé un nom, Suikoden Tierkreis. C’est toujours mieux que rien mais, de toute évidence, ce n’est pas Suikoden VI.

UNE BONNE BRANLÉE POUR COMMENCER

Comme vous le savez sans doute si vous avez joué aux précédents épisodes, les Suikoden vous permettent de recruter cent huit personnages hors du commun afin de composer votre armée, qui ira finalement mettre une bonne dérouillée au boss final.

Dans Suikoden Tierkreis, l’aventure commence par la confrontation entre le groupe des cent huit déjà formé, et le Roi Unique. Et en l’occurrence, c’est le méchant qui l’emporte ! Passée cette introduction - flashback ou vision prémonitoire ? - bien peu encourageante, nous prenons le contrôle du héros (il n’a pas de nom, charge à vous de lui en attribuer un, comme d’hab’), un remuant jeune homme du village de Citro, qui va enquêter avec une poignée d’amis à propos de l’inhabituelle agressivité des créatures du coin. Rapidement, il va tomber sur un vieux bouquin étrange, prélude à une quête pleine de fondamentalistes, de bestioles anthropomorphes, de gitans à lunettes et d’un chouïa de dimensions parallèles.

À ce propos et pour les habitués de la saga, cet épisode se déroule en dehors de toute chronologie et dans une autre dimension que celle que nous connaissons. Si le principe de multivers existe depuis les débuts de la série (Windy ou Luc invoquaient des créatures outre-dimensionnelles, les Dragons venaient d’ailleurs et même des personnages comme Viki ou Yuber semblent déconnectés des lieux où ils atterrissent), il est étonnant de constater l’absence totale de liens avec les épisodes précédents, alors que justement, Viki aurait très bien pu venir faire un tour par là.

UNE BONNE TRIPOTÉE POUR CONTINUER

Suikoden Tierkreis est un RPG au tour par tour relativement classique. En tout cas, il est surprenant de n’y retrouver pratiquement aucune des particularités de la série (le combat à six même s’il n’est pas présent dans tous les volets, les batailles d’armée ou les mini-jeux). Est-ce vraiment un Suikoden ou le logo a-t-il été apposé à la fin du développement ? Faisons donc taire le fanboy deux minutes, le temps de se concentrer sur le fond de jeu.

Basiquement, votre quête vous conduira à travers différents lieux représentés sur un atlas sommaire où les endroits sont reliés entre eux par des lignes. Au départ, il n’y a que trois ou quatre destinations possibles, mais cela évolue à mesure que vous progressez dans votre quête. On y navigue à loisir (il n’y a pas de combats sur l’atlas), chaque trajet représentant un nombre de jours de voyage. Le jeu implémente même un système de saisons, même s’il ne l’exploite que très peu : simplement, certains personnages ne sont recrutables qu’à certaines saisons.

Ensuite, il y a trois types de destinations : les villes où vous ferez vos emplettes (vous obtiendrez rapidement un QG qui sert de ville géante et où se retrouvent tous les personnages que vous aurez recrutés), les donjons ou assimilés, où vous accomplirez vos missions, et les mini-cartes locales (les Plaines Citro en début de partie sont dans ce cas de figure) qui comportent elles-mêmes plusieurs destinations, villes ou donjons.

Vous progresserez dans la quête principale en effectuant diverses missions. En gros, vous discutez avec un personnage qui a besoin d’aide, vous retournez vers votre QG pour accepter la mission, puis vous vous rendez sur le lieu indiqué pour l’accomplir. Cependant, certaines missions vous demandent simplement d’envoyer une personne ou un groupe, sans avoir à vous y rendre vous-même. De fait, il vous suffit de patienter le nombre de jour qu’est censée durer la mission pour savoir si votre ou vos émissaire(s) l’a (l’ont) accomplie avec succès ou non. Le principe est donc strictement identique à celui des deux Final Fantasy Tactics Advance.

Une mission accomplie vous vaut la reconnaissance de la personne qui vous l’a amenée, mais parce qu’on ne travaille pas pour la gloire, vous aurez droit à une récompense sonnante et trébuchante. Selon les cas, il peut s’agir d’un personnage qui vient se joindre à votre armée ou d’un trésor quelconque, auxquels s’ajoute une poignée de potchs, la monnaie du jeu. Les potchs pourront ensuite être dépensés dans les auberges (pour restaurer la santé de votre groupe), les magasins (pour acheter des objets de soin), ou les armureries (pour acheter ou faire fabriquer de l’équipement).

Quant aux personnages, sachez que certains sont des combattants et d’autre non. Une grande majorité de vos cent huit recrues (il est bien entendu toujours possible de terminer le jeu sans avoir recruté tout le monde, mais vous n’obtiendrez alors pas la meilleure fin possible) peut se battre. Votre groupe de combat ne peut par contre pas dépasser les quatre protagonistes, plus un en soutien pour conférer une aptitude particulière au groupe (gagner plus d’argent en fin de combat, augmenter l’attaque du groupe, etc.).

Les rencontres se déclenchent de manière aléatoire lorsque vous vous déplacez dans les donjons (ou les mini-cartes), excepté contre les boss bien sûr. Lorsqu’une telle rencontre débute, vous avez le choix entre accepter le combat, laisser l’ordinateur agir à votre place (le mode auto-battle est surtout valable lorsque vous tombez sur un monstre bas niveau contre qui vous ne risquez rien, si ce n’est vous ennuyer) ou fuir. Plus tard dans votre quête, vous obtiendrez la possibilité de déclencher une attaque spéciale avant même d’entrer dans le feu de l’action, variable selon les personnages qui composent votre groupe.

Si vous choisissez d’accepter le combat, vous aurez accès à plusieurs commandes : l’attaque physique, l’utilisation d’un sort ciblant un ou plusieurs ennemi(s), l’attaque de groupe (il vous faut pour cela deux (ou plus) personnages partageant une affinité, par exemple les sœurs Chlorechild et Fredegund), la mise en position de garde, ou la consommation d’un objet de soin.

Pour ce qui est des sorts, le système de Tierkreis diffère grandement de celui des autres Suikoden, puisqu’il n’y est plus question de runes (mais t’es vraiment sûr que c’est un Suikoden ?). Lorsque vous recrutez un personnage, vous « déclenchez » en quelque sorte son aptitude à la magie. À partir de là, vous devez vous rendre sur un point de magie (qui ressemble à un point de sauvegarde à ceci près qu’il est rouge plutôt que bleu) afin d’attribuer un sort parmi ceux qu’il peut apprendre, à chacune de ses quatre Marques des Étoiles. C’est un peu le même principe que dans Final Fantasy VIII cette fois : vous disposez de quatre emplacements pour les sorts, il ne vous reste plus qu’à choisir lesquels y placer. Et tandis que le lancement des runes était dépendant d’un nombre d’utilisations évoluant selon le niveau d’expérience du personnage, il s’agit ici d’un bête système de MP, ou points de magie. Un sort coûte tant, point final.

UNE BONNE RESUCÉE POUR TERMINER

Je connais des gens qui renient carrément l’existence de cet épisode. D’autres, un tout petit peu moins intégristes, préfèrent le considérer comme non-canon et ne faisant donc partie de la saga Suikoden qu’en tant que spin-off, au même titre que Suikoden Tactics ou les deux Genso Suikogaiden. Et il est vrai que ce volet constitue un véritable reboot de la saga. Il conserve certes quelques principes difficilement contournables pour un Suikoden (le recrutement des cent huit, le QG, les possibilités en combat) mais fait fi d’un bon nombre de spécificités, comme nous l’avons vu.

Pour le commun des mortels - et donc si l’on met de côté les fans les plus dévoués - Suikoden Tierkreis se présente comme l’un des tous meilleurs RPG sur la portable à double écran. Tout d’abord, s’il change drastiquement des idées développées dans les autres jeux de la saga, son scénario est plutôt agréable à suivre. Rien de bien révolutionnaire dans cette histoire de cataclysme inter-dimensionnel, mais la quête principale évolue par rebonds successifs qui poussent le joueur à poursuivre.

En outre, la réalisation est pour une fois pas trop dégueulasse. En principe, les Suikoden sont connus pour leur train de retard sur les dernières technologies : les deux premiers auraient aussi bien pu sortir sur Super NES, tandis que les trois suivants ne rendent pas non plus vraiment grâce aux capacités de la PlayStation 2 en matière de 3D. Ici les décors en deux dimensions dégagent un certain charme bucolique, tandis que les personnages en 3D super deformed sont mignons comme tout. Seuls les combats restent encore une fois la cinquième roue du carrosse, la faute notamment à une caméra toujours placée ou trop près, ou trop loin. Le double écran permet malgré tout de dégager les informations superflues lors des duels.

En termes d’animation, il y a du pour et du contre. Les environnements en 2D sont forcément statiques, ce qui nuit un peu à l’immersion, mais en contrepartie, les cinématiques sous forme de dessin animé sont de toute beauté malgré l’encodage vidéo toujours très limité sur la bécane. La partie musicale n’a pour sa part rien de transcendant, mais en matière de son, on ne peut que saluer le fait que tous les dialogues importants soient joués, et joués avec conviction qui plus est.

C’est surtout le gameplay, finalement, qui dénature le concept. Certes, la prise en mains est simple, puisque le système de jeu est ultra-classique. Mais tout ce qui faisait l’originalité des Suikoden a disparu. Bon en même temps, quand on voit ce qu’étaient devenues les batailles d’armées dans le cinquième volet, on ne peut qu’applaudir l’impasse. Tierkreis préfère donc renier son ADN et aller piocher ailleurs, du côté de Square-Enix notamment. Lorsqu’on veut toucher le plus grand nombre, ce n’est pas forcément une mauvaise idée.

Cette itération portable est donc destinée à une nouvelle clientèle, plus large espère Konami, et surtout plus jeune. La difficulté est dès lors moindre, même si la saga n’est pas franchement réputée hardcore. La durée de vie est également plus légère, surtout qu’il y a très peu à faire en dehors de la quête principale.

Un petit RPG sympatoche pour les d’jeunzz, voilà en quoi a muté Suikoden. Maintenant, si c’est pour engranger les pépettes et rendre un futur Suikoden VI viable commercialement parlant, je signe où vous voulez. La série est toujours restée dans l’ombre et cette exposition sur la console star de la décennie est la bienvenue.

Suikoden Tierkreis