Vous connaissez la rengaine depuis le temps : DraQue c’est bien, DraQue c’est bon, mangez-en. Je ne vais pas m’amuser à vous réciter tout le chapelet à chaque épisode, vous connaissez la musique. Et puis vous avez vu la note, non ? Bon, allez, à plus alors.
…
…?
Monsieur Angus ?!
Vous voulez bien poser ce fusil, s’il vous plaît ? Il faut que j’y aille.
…
Un test plus long ? Vous êtes sûr que ça ne vous suffit pas ?
Bon.
D’accord, je reste si vous insistez. De toute façon j’ai plein de trucs à dire, alors hein.
DO IT YOURSELF
Une partie de Dragon Quest IX commence par la création de votre avatar. Il ne sera pas ici question de définir son caractère, les héros de DraQue en étant dépourvus, mais uniquement son apparence physique, façon MMORPG. Ou plus exactement, façon Mii, ces petits avatars pour la Wii. En effet le choix est assez maigre, et le côté trognon des personnages ainsi créés renvoie à l’aspect enfantin des Mii. Bref, vous pourrez donc définir le sexe de votre héros, sa taille, sa coupe de cheveux et leur couleur (avec des variantes toutes japonaises, genre violet, bleu ou vert), son regard et la couleur de ses yeux, et sa couleur de peau. Enfin, vous lui donnerez un nom, et en avant pour l’aventure ! Bref, pour faire plus simple, je me suis créé une donzelle qui répond au nom d’Aikagi, nom que j’utiliserai pour la suite de ce test.
QUIS CUSTODIET IPSOS CUSTODES ? (comme dit ma concierge)
En vérité, votre personnage n’est pas humain. Rassurez-vous, les gars de chez Square/Enix ne sont pas allés jusqu’à vous faire incarner un troll ou un pot de chambre tueur, mais plutôt un ange. Ou, pour utiliser le terme exact, un Célestrien (enfin c’est « Celestrian » dans ma version américaine, mais c’est peut-être traduit autrement en français). Ces anges-gardiens veillent sur l’humanité en toute discrétion, et recueillent leur Bénévolessence, une forme d’énergie représentant leur gratitude envers leurs protecteurs. La Bénévolessence sert en contrepartie à nourrir Yggdrasil, l’arbre-monde qui, s’il donne des fruits, promet d’ouvrir les portes du Royaume du Tout-Puissant.
Mais avant de bourgeonner, il a besoin de Bénévolessence, et c’est donc avec ferveur qu’Aikaigi et ses pairs sustentent l’arbre. Jusqu’au jour tragique (il en faut un dans tout RPG, sinon il n’y aurait pas de jeu) où une lumière violacée frappe la demeure des Célestriens, envoyant bouler Aikagi au royaume des mortels. Elle se réveille dans le village qu’elle protégeait jusque-là… Petit problème : elle est désormais visible aux yeux des humains et a perdu ses ailes et son auréole, ainsi que tout moyen de communiquer avec les autres Célestriens.
JE T’EN METS QUATRE ET JE RETIENS DEUX
Dragon Quest IX se veut résolument classique, et s’inscrit de toute façon dans une série monolithique. RPG tour par tour dans la plus pure tradition, il n’évite pas le traditionnel cheminement ville-atlas-donjon. Concrètement, il s’agit d’obtenir une quête dans chaque cité, puis de se rendre au bon endroit et d’y affronter le boss. Chemin faisant, vous affronterez des pelletées de monstres qui, depuis le précédent volet, sont maintenant visibles directement sur l’écran d’exploration, ou plus exactement y apparaissent spontanément. Vous pouvez donc décider, si vous le souhaitez, d’éviter le combat mais, d’une, si l’ennemi vous repère il cherchera bien souvent à vous poursuivre, et de deux, le levelling est de toute façon une fois de plus indispensable.
Alors battons-nous ! Les combats se déroulent toujours de la même manière : vous attaquez, puis c’est au tour des monstres, et ainsi de suite. Vous pouvez choisir vos actions dans le menu, parmi : attaquer physiquement, utiliser la magie, consommer un objet ou vous défendre. Au départ, les développeurs de chez Level 5 avaient pensé à mettre en place un système orienté hack ‘n slash. Hérésie ! hurlèrent les fans. Du coup, les combats ne réservent que peu de surprises. Tout juste notera-t-on le très pratique multiplicateur de dégâts : plus un adversaire se prend des gnons, et plus les suivants feront mal. Autre point novateur, le coup de grâce. Sorte de coup spécial, cette attaque devient activable sous certaines conditions, par exemple si vous avez bloqué un coup critique ou si vous vous retrouvez grièvement blessé. Malgré son nom, il s’agit juste d’une technique certes efficace, mais rarement létale.
En fin de combat, vous gagnez bien entendu un peu d’or et quelques maigres points d’expérience. Le premier vous permettra d’acheter victuailles et équipement dans les différents magasins que vous croiserez, les seconds se cumuleront jusqu’à vous faire grimper de niveau. Vos caractéristiques (force, résistance, points de vie, magie, etc.) augmentent alors, et, bien souvent, vous obtiendrez des points de compétence. Ces derniers peuvent ensuite être répartis quand et comme bon vous semble entre les différentes compétences propres à votre vocation.
Y’A PAS D’SOT MÉTIER
Et donc là, forcément, me voilà obligé de vous parler des vocations. Le principe est le même que dans Dragon Quest III, VII ou VIII. Chacun de vos personnages peut choisir une vocation, ou un job si vous préférez. Il y a six vocations accessibles au départ (enfin, à partir du moment où vous trouvez l’endroit où on peut changer de job), chacune ayant ses spécificités. Le Ménestrel est par exemple porté sur les sorts de soutien, alors que le guerrier est une brute au corps à corps et que le prêtre utilise surtout la magie de soin.
Chaque vocation commence également avec des attributs propres, et si le guerrier ou le moine commencent avec des points de vie et une attaque très élevés, le mage est pour sa part de bien plus frêle constitution. En contrepartie, ses capacités magiques sont très élevées. Enfin, à chaque vocation son coup de grâce propre, ainsi qu’un équipement dédié. Chose amusante, toutes les modifications d’armes ou d’armures que vous pouvez effectuer sont immédiatement retranscrites visuellement. Vous voyez votre personnage tel qu’il est habillé.
Dernier point, d’une importance capitale : si vous changez de job, vous recommencez à zéro. Ainsi, si vous aviez, mettons, monté votre guerrier au niveau 54, avec trois cents et des berlouzes de points de vie, et que vous décidez que ce serait super trop cool de le transformer en voleur, eh bien vous repartez du niveau un, avec une trentaine de pauvres PV qui se battent en duel. Rassurez-vous, hein, si vous décidez que finalement, guerrier, c’est pas si mal, vous reviendrez au niveau où vous l’aviez laissé. Mais changer de job est le seul moyen d’augmenter certaines compétences.
AH MARDI JE PEUX PAS, J’AI PISCINE
Si jamais vous vous emmerdez durant la quête principale, Level 5 a pensé à vous. En dehors des quêtes censées faire avancer l’intrigue, vous pourrez répondre à de nombreuses sollicitations. Il suffit de parler à un personnage surmonté d’une bulle bleue (le jeu fonctionne avec plein d’icônes pour les plus débiles d’entre nous : un point d’exclamation signifie que l’on peut effectuer une action, une bulle que l’on peut parler à la personne…), et d’accepter sa mission. Généralement, il s’agit de lui rapporter un objet ou de tuer un monstre. Ça revient souvent au même, parce que les PNJ qui vous demandent un objet se démerdent pour vous en réclamer un qu’on ne peut trouver qu’en lattant du streum, ou perdu dans un coin de la carte du monde, ce qui vous obligera quand même à combattre.
Ou alors, c’est un objet à fabriquer soi-même. Eh oui, la traditionnelle marmite d’alchimiste fait son grand retour. Le principe est simple : vous trouvez des recettes un peu partout dans le monde - fouillez les bibliothèques ! - et vous pourrez les essayer lorsque vous aurez accès à la marmite. Il s’agira alors de mélanger deux ou trois ingrédients ensemble. Vous pouvez aussi tenter un mélange sans recette, mais c’est aussi sans garantie de résultats. Vous pouvez tout créer de la sorte : des équipements, des objets de soin…
La quête des mini-médailles est bien entendu une nouvelle fois présente, et elle vous permet toujours d’acquérir de superbes - et rares - équipements. Si cela ne vous suffit pas, vous pouvez toujours vous amuser à compléter le bestiaire et l’inventaire ; vous avez de quoi vous occuper pendant quelques siècles et vous pourrez contempler vos résultats dans le menu des Records de Bataille. Toujours au chapitre des trucs inutiles, signalons l’existence de poses. Vous apprendrez auprès de certains personnages (c’est même l’objet de l’une des toutes premières missions du jeu) des postures, genre salutations, prière ou saut de joie etc., que vous pourrez ensuite réaliser vous-mêmes après les avoir assignées à l’une des directions de la croix. Ça n’a aucun intérêt, si ce n’est pour vous la péter Bioman lorsque vous jouez à plusieurs.
À QUATRE SUR LE DOS DE LA BÊTE
À plusieurs ?! Eh oui, en utilisant les capacités de connectivité de la DS, vous pouvez jouer à quatre sur la même partie. Ainsi, plutôt que de créer des compagnons contrôlés par le jeu (ou d’utiliser les combattants pré-mâchés), vous pouvez vous faire accompagner par trois autres joueurs humains (ou extraterrestres, si vous en connaissez qui jouent à la DS). De préférence, vous choisirez de jouer sur la partie du joueur le moins avancé, histoire de pas trop spolier, mais en même temps vous faites ce que vous voulez, hein.
Afin d’éviter les petits coups de putes genre « OK, je t’aide mais par contre, je dépouille tes coffres histoire de gratter un peu, de pas être venu pour rien », les coffres existent en deux couleurs : les bleus peuvent être ouverts par tout le monde, mais les rouges (qui sont souvent les plus intéressants) ne peuvent être ouverts que par l’hôte des joueurs invités.
Tant qu’à en finir avec les spécificités de la DS, signalons que le micro ne sert toujours à rien (y’a des jeux qui l’utilisent ?), que le double écran permet d’afficher les cartes des lieux visités, et que le jeu peut être intégralement pratiqué au stylet, mais que comme d’habitude c’est beaucoup plus chiant qu’à la croix.
VEUILLEZ AGRÉER L’EXPRESSION DE MES SENTIMENTS LES MEILLEURS
Le premier trailer de Dragon Quest IX laissait rêveur, avec ce jeu d’une qualité visuelle légèrement en deçà du précédent, mais qui tournait sur la petite portable de Big N. Et c’est vrai que Level 5 nous en met plein la vue. S’ils pixelisent plus que sur PlayStation 2, les graphismes de cet épisode sont encore une fois d’une grande finesse ; les décors splendides et richement colorés flattent la rétine et le design d’Akira Toriyama conserve une fraîcheur incomparable.
Malheureusement, les développeurs ont peut-être eu les yeux plus gros que le ventre. Cette débauche de détails, alliée à des animations fouillées et à de nombreux effets spéciaux, occasionne de gros ralentissements qui peuvent parfois se montrer gênants. En outre, si Sugiyama continue de nous régaler avec ses thèmes toujours raccord (mélancoliques ou épiques suivant l’humeur qui s’y prête), on l’a connu plus inspiré.
Concernant l’histoire, on est loin des DraQue VI et VII. J’ai lu un résumé hier dans Télé Star, qui disait en gros « Des anges collectent les prières des gens pour sauver le monde », et c’est vrai qu’à première vue, cela semble se limiter à cette courte phrase. Pourtant, si l’on y regarde d’un peu plus près, DraQue IX aborde un thème beaucoup plus intéressant et rarement traité dans le jeu vidéo : la mort. Alors bien sûr, le discours reste, comme toujours, naïf, Yuji Horii préférant aborder des thématiques lourdes avec beaucoup de retenue, et il est vrai qu’on est loin de la vision dramatique d’un Valkyrie Profile. Mais mine de rien, l’émotion fonctionne et on se prend à avoir de la pitié pour ces petits bouts de pixels.
En matière de jeu, les évolutions apportées par cet épisode sont nombreuses et significatives, preuve que l’on peut proposer de nouvelles choses tout en restant dans un carcan assez confiné. DraQue IX abandonne quelques lourdeurs des précédents épisodes, et cela laisse augurer du meilleur pour l’avenir de la saga, qui n’est, on s’en rend enfin compte, pas gravé dans le marbre.
Pour autant, le jeu reste définitivement roots, vous obligeant à de longues séquences de farming pour espérer gagner le gallon suffisant pour latter le prochain boss. L’aventure est d’ailleurs relativement longue pour un RPG actuel : comptez une quarantaine d’heures en ligne droite, au moins deux fois plus si vous voulez vous amuser à faire tous les à-côtés. On regrettera néanmoins - parce qu’on peut être fan et se montrer chiant quand même - la disparition du casino et de l’arène des monstres, qui auraient sans doute encore augmenté la durée de vie, mais qui ne rentraient sans doute pas dans la petite cartouche.
Au final, Dragon Quest IX n’est pas l’épisode le plus abouti de la saga, et ceci n’est sans doute pas sans rapport avec les limitations techniques de son support. Mais ledit support assure aussi à Square/Enix des ventes confortables, et aux joueurs la garantie d’une suite à plus ou moins court terme. Alors que bon, un DraQue sur PlayStation 3 et c’était quasiment la banqueroute assurée. Oui, je trolle, et alors ? Bon ça va, là, tu me laisses sortir maintenant ?