En 1997, Street Fighter entre enfin dans sa troisième phase. Demi-succès, le premier volet sous-titré New Generation a surtout étonné de par son casting, quasiment renouvelé mais finalement pas bien riche. Il n’en fallait pas plus pour que Capcom lance sa fameuse machine à recyclage et, la même année, une nouvelle itération voit le jour sous le titre de Street Fighter III : 2nd Impact. Cette version Dreamcast est en fait une compilation des deux épisodes, marquée d’un nouveau sous-titre pour l’occasion.
IF GOD HAD A NAME, WHAT WOULD IT BE ?
Dans le premier Street Fighter III, on découvrait en guise de boss final un certain Gill, et par là même sa petite histoire. Ce gars-là est tout simplement le Messie qui va sauver le monde quand l’apocalypse viendra. Non non, sans déconner. Son organisation lui voue un culte, il est là depuis des temps immémoriaux et il cherche les Élus, grâce à qui il pourra fonder son nouvel Éden, rien que ça. En organisant le tournoi de Street Fighter, il a ainsi découvert quelqu’un de particulièrement intéressant : Alex. Ce colosse l’a vaincu à la régulière, et il est maintenant temps de le convoquer pour un nouveau passage à tabac… Non enfin, je veux dire une petite discussion d’homme à Dieu.
WHAT WOULD YOU ASK IF YOU HAD JUST ONE QUESTION ?
Street Fighter III : Double Impact a beau être sorti en pleine époque 3D, il n’en demeure pas moins un bon vieux beat ‘em up des familles, en deux dimensions. Ou plutôt deux bons vieux beat ‘em up puisque, comme indiqué précédemment, ce sont les deux premiers opus de cette sous-saga qui sont réunis dans une seule et même galette. À vrai dire, le second étant une mise à jour du premier, celui-ci n’a que peu d’intérêt.
Concernant le casting, il y a le pour et le contre. Le contre, c’est que seuls seize personnages sont présents. Le pour, c’est qu’à quelques exceptions près, tous les combattants sont peu ou prou nouveaux. En dehors de l’indécrottable couple Ryu/Ken et d’Akuma (présent en version normale ou Shin Gouki, plus mieux bien méchant), nous (re)découvrons donc :
Alex, le véritable héros du jeu, dont le style tout en écrasement-de-ta-gueule-sur-le-sol rappelle un peu les attaques de T. Hawk.
Dudley, un boxeur anglais dans la veine de Balrog (mais avec un bon jeu d’esquive comme ce brave Mike en avait dans Street Fighter premier du nom).
Elena, une danseuse africaine dotée d’un excellent jeu de jambes
Hugo, le bon gros boss de Final Fight, colossal et surpuissant
Ibuki, une apprentie-ninja rapide et douée pour le combat aérien
Necro, un albinos qui se révèle un très bon punisseur grâce à sa belle allonge.
Oro, un tas informe absolument injouable de par sa lenteur
Sean, un énième karatéka dont le style est plus punchy que celui de ses modèles.
Urien, qui est en gros une Elena avec une paire de… euh, enfin…
Yun et Yang les jumeaux cascadeurs, dont le style percutant rapelle un peu Fei Long.
et Gill, donc, le ridicule mais surpuissant boss final
Le système de jeu ne bousculera pas trop les amateurs du genre, puisque vous disposez toujours du stick pour vous diriger, vous accroupir et sauter, et de six boutons (les quatre plus les gâchettes), trois étant dédiés aux coups de poing et trois aux coups de pied, selon trois niveaux de puissance à chaque fois. N’oublions pas les traditionnelles techniques de base : super saut (bas puis haut), dash (deux fois avant ou arrière), projections (avant ou arrière plus attaque au corps à corps), récupérations…
Bien entendu, chaque personnage dispose de sa propre palette d’actions, qu’il s’agisse de coups normaux ou spéciaux. En frappant l’adversaire, vous remplirez une jauge qui vous servira par la suite à déclencher vos Super Arts, des coups spéciaux véritablement ravageurs mais qui nécessitent un timing plus ou moins important selon leur puissance. Il existe également la possibilité de réaliser des attaques EX, qui en terme de dégâts se situent entre le coup spécial de base et le Super Art. Ces attaques se réalisent en appuyant sur deux boutons au lieu d’un lors de la manipulation. Par exemple, le Hadoken de Ryu s’effectue par un quart de tour avant plus bouton de poing, n’est-ce pas ? Sisi, je vous confirme. Eh bien la version EX se réalise par un quart de tour avant plus deux boutons de poing, tout simplement.
Et si les néophytes auront déjà de quoi faire avant de maîtriser tout cela, les amateurs confirmés n’ont pas été oubliés sur le bord de la route. Ces gars-là se régaleront sans doute à pratiquer le Super Cancel, manœuvre consistant à annuler un coup spécial, voire même une attaque EX, pour balancer à la place un Super Art. Bien entendu ceci pompe sur votre jauge de Super Art. Ils en veulent encore, les amateurs confirmés ? Alors voilà. Je réclame une minute de silence. Je vais vous parler de l’invention la plus importante dans l’histoire de l’humanité depuis le tire-bouchon : le parry. Le principe est extrêmement simple : quand on vous attaque, ripostez ! Un peu plus dans le détail, le parry c’est le contraire de la garde. Habituellement, pour éviter un coup vous appuyez vers l’arrière pour vous mettre en protection. L’ennui c’est que d’une, les coups spéciaux vous blessent quand même (moins, mais ils vous blessent) et de deux, votre attaquant se retrouve prioritaire, en terme de temps de latence, sur la prochaine attaque. Alors essayez donc le parry, vous m’en direz des nouvelles ! Lorsqu’on vous attaque, appuyez vers l’avant au lieu de l’arrière : non seulement vous ne serez pas blessé, y compris par un coup spécial, mais en plus c’est vous qui vous retrouverez prioritaire sur la prochaine attaque. Elle est pas belle, la vie ? Attention toutefois, cette technique ne marche pas (encore, dans Street Fighter III : Third Strike ce sera le cas) contre les Super Arts.
YEAH, YEAH, GOD IS GREAT
Je ne sais pas vous, mais moi j’en avais soupé des personnages ridicules, du casting de cinquante-douze combattants déjà vus et revus, des musiques de karaoké et surtout, du fond de jeu grand-guignolesque des trois Street Fighter Alpha. Il était temps que Capcom passe à autre chose, et Dieu merci, ils l’ont fait. Et de quelle manière !
Table rase, donc. La quasi-totalité des personnages sont nouveaux, et nombre d’entre eux proposent même de nouvelles choses fort séduisantes. D’un point de vue esthétique en tout cas, le CPS-3 en met plein la vue et qu’il s’agisse des décors riches en détails, des sprites très fins ou des couleurs pastels, tout est beau. Il subsiste tout de même quelques résidus de fausse couche, comme Hugo qui est toujours aussi moche ou Oro qui ne ressemble à rien, mais ce n’est rien au regard de la catastrophe que c’était avant. Les animations sont d’une étonnante fluidité, la partie sonore est assurée avec brio, et si l’on veut absolument trouver à y redire, le seul point de reproche serait que la conversion est facile, la Dreamcast étant capable de faire tourner des jeux bien plus gourmands que ces deux-là.
Sur le plan du gameplay par contre, il faudrait vraiment être d’une mauvaise foi crasse pour reprocher quoi que ce soit à Street Fighter III. Le jeu est accessible à tous, et rien que le parry est une formidable avancée. La difficulté en solo est en tout cas bien calibrée, et le seul vrai gros point noir finalement, c’est que même avec deux jeux en un, la durée de vie n’est pas exceptionnelle.
Reste que Street Fighter III représente une avancée importante dans le petit monde du beat ‘em up 2D, si bien que ce Double Impact se doit d’être présent dans la ludothèque de tous les amateurs du genre. Après, je ne saurais déterminer lequel de celui-ci, KOF ‘99 Dream Match ou Guilty Gear X représente le summum de ce que la Dreamcast nous a donné de meilleur en matière de baston à plat, je les aime tous les trois. Ah ! mais non, suis-je bête, j’ai failli oublier que quelques temps après ce double impact, Capcom frappera un troisième coup, encore considéré (au moins par moi) comme le meilleur jeu du genre.