Développé par Twilight, édité par Ocean Software sur Amstrad, Amiga, Atari ST, C64, DOS, 1991.
Depuis 1988 et le premier WWF Wrestlemania sur NES, les jeux de catch avec licence officielle WWF (World Wrestling Federation, la plus grande fédération internationale de catch, aujourd’hui nommée WWE avec E pour Entertainment) se sont multipliés sur console, ordinateur et borne arcade.
C’est en 1991 qu’Ocean a sorti le premier jeu de catch made in WWF, pour la génération d’ordinateurs irréversiblement en fin de vie que sont alors l’Amstrad, les Commodore et l’Atari ST.
Précisons d’emblée que ce soft n’est pas un portage du titre éponyme NES (réalisé uniquement pour la console Nintendo). S’il met bien en scène des lutteurs réels, ceux-ci ont eu le temps d’être renouvelés en 3 ans, et seul l’Immortel Hulk Hogan figure encore dans le roster. De même, le gameplay n’a plus grand-chose à voir.
Un mot sur le terme « Wrestlemania ». Il s’agit du plus grand et médiatisé show de catch annuel. Il se déroule chaque mois de mars depuis 1985. Très attendu par les fans du monde entier, cet évènement présente les matches les plus spectaculaires et les plus alléchants de l’année. C’est pendant les Wrestlemania que s’écrit la légende du catch entertainment.
WHATCHA GONNA DOOO WHEN HULKAMANIA RUNS WILD ON YOUUUU ?!
2 modes de jeu sont proposés : mode « histoire » à 1 joueur et mode versus.
En histoire, le joueur choisit son lutteur parmi 3 disponibles, les 3 catcheurs les plus populaires du début des années 90, scénaristiquement des gentils, ou babyfaces. Ce catcheur devra ensuite affronter successivement 5 adversaires reconnus pour être les plus gros méchants, ou heels, de l’époque.
Les gentils :
Hulk Hogan : THE catcheur of the 20e siècle. Moult fois champion du monde, il est aussi le lutteur le plus populaire et le plus apprécié. Il a même lancé le phénomène de Hulkamania, mouvance ayant pour idée de sanctifier notre Dieu à tous. Légende vivante, son nom restera éternellement associé à Wrestlemania.
Prise spéciale : Piledriver
The Ultimate Warrior : le Guerrier Ultime. Boule de muscles et d’adrénaline, il est le premier lutteur à avoir battu le grand Hulk dans son show fétiche. Avant une carrière ayant pris fin en eaux de boudin, il a marqué les esprits.
Prise spéciale : Gorilla Press
The British Bulldog : le regretté Davy Boy Smith. Au départ membre de la percutante équipe desBritish Bulldogs, il a ensuite mené une brillante carrière solo, même s’il a été plus populaire qu’efficace (aucun titre de champion du monde). Un ton en-dessous des 2 autres lutteurs.
Prise spéciale : Powerslam
Les méchants :
Mister Perfect : le regretté (eh oui, aussi) Kurt Hennig. Surnommé ainsi en raison de ses fabuleuses et innées prédispositions dans toutes les disciplines (basket, foot, lutte, échecs, fléchettes…). Peut-être le plus grand champion intercontinental de l’histoire (2e plus grand titre). Heel lors de ses débuts, il s’est mué en favori du public durant l’année 92.
Prise spéciale : Backdrop
The Warlord : le Dieu de la Guerre. Autrefois équipier du Barbare au sein des Powers of Pain, il a ensuite catché en solo. Une montagne de muscles. Un classique méchant de service peu charismatique.
Prise spéciale ?
Ted « Million Dollar Man » Dibiase : le Millionnaire du ring. Un des méchants les plus marquants des années 80. Il pense que tout et tout le monde a un prix. Il s’est fait faire une ceinture en diamants à défaut d’avoir pu conquérir la ceinture de champion.
Prise spéciale : Cobra Clutch
The Mountie : le Québécois Jaques Rougeaux dans le rôle d’un officier de la « Police Montée » du Québec. Hurlant sans cesse : « I am the mountie !!! » sur le ring. Un catcheur ne servant pas à grand-chose…
Prise spéciale : je sais même plus tiens
Sergent Slaughter : unhun ! Le boss de fin est aussi le pire enc*** de la fédération. Son personnage de militaire irakien vicieux et cruel a été créé en plein conflit USA-Irak. Crachant sur le drapeau américain, heureusement que Hulk Hogan était là pour lui botter les fesses au Wrestlemania 91 ! Ils ont le sens du spectacle moralisateur ces Américains…
Prise spéciale : Camel Clutch
COME AND FEEL THE POWER OF THE ULTIMATE WARRIOR !
Vous sélectionnez donc un gentil, et partez casser du méchant. Si vous choisissez le mode versus, vous affrontez un ami en un match sec de 5’ maxi. Le 2e joueur aura obligatoirement Mister Perfect, il ne pourra choisir un autre perso. Un peu dommage. Un mode pas très intéressant mais qui a le mérite d’exister.
Le mode histoire est classique. Vous commencez par affronter Perfect. Match de 5’ maxi. Il vous faut le battre par tombé (pin) en lui rivant les épaules au sol pendant 3 secondes. Si c’est lui qui vous épingle, si le match se finit en dehors du ring ou s’il n’y a pas de vainqueur dans le délai, vous êtes déclaré perdant. Il faudra réessayer (4 crédits disponibles).
Quand vous gagnez un match, vous passez à l’adversaire suivant jusqu’à Slaughter.
THE BRITISH BULLDOG’S GONNA TAKE A BITE OUT OF WWF !
Au niveau du gameplay, plusieurs prises ou mouvements sont disponibles :
à distance de votre adversaire : coup de poing, coup de pied ou dropkick (saut chassé). Possibilité de courir pour percuter l’opposant d’un coup de genou à la volée. Celui-ci peut riposter par un surpassement par les épaules.
au contact : une seule prise possible, la prise spéciale de chaque lutteur. Dommage qu’il n’y en ait qu’une seule.
sur les cordes : coup de pied ou dropkick sur un adversaire debout ou à terre.
contre un adversaire à terre : coup de pied ou tombé.
Vous catchez essentiellement dans le ring, mais il est possible de descendre de celui-ci à votre convenance. Cependant, vous n’avez droit qu’à 20 secondes hors de l’arène. Il est bien sûr impossible d’épingler votre adversaire hors du ring. Cette fonctionnalité (traditionnellement appréciée des joueurs) est limitée, car on ne peut pas tourner autour du ring, mais juste rester sur la largeur basse de celui-ci. Du coup, aucun mouvement supplémentaire n’est proposé (genre envoyer l’autre dans les barrières ou contre le ring). Sachant que gagner hors de l’arène (c’est-à-dire remonter avant 20 secondes avec l’autre encore dehors), vous fait perdre le combat, il ne sert pas à grand-chose d’en descendre.
Je dirais que si tous les aspects d’un match sont couverts (combat hors ring, possibilité de monter sur les cordes, de courir pour se projeter dans les cordes, combat au contact, à distance, à terre), tout est un peu limité. Faut dire qu’avec un seul bouton et les flèches, les actions possibles sont fatalement restreintes. On aurait toutefois apprécié une ou deux prises supplémentaires au contact, quitte à ce qu’elles soient communes à tous les persos (par ex. une souplesse arrière). Bon à défaut, le concept de prise spéciale est assez bien trouvé comme alternative.
Le gameplay présente pas mal de faiblesses ; il est difficile d’exécuter les prises.
D’une part, les commandes d’actions sont douteuses : le bouton « action » permet de frapper à distance (coup de poing, de pied avec bas et action) mais pas au contact. Pour faire la prise spéciale, il faut appuyer répétitivement et alternativement sur gauche et droite. Avec un joystick, c’est la garantie de le bousiller en 10 minutes de jeu. Avec un clavier, je peux vous dire que ce n’est pas évident non plus. Et c’est vite très saoulant. Pour se relever après avoir été mis au sol, il faut bourriner le bouton action. Lourd.
D’autre part, les touches clavier dédiées sont assez inappropriées : AQ pour monter-descendre, OP pour gauche-droite, espace pour taper. Impossible de changer la config.
THEY SAY NOBODY IS PERFECT BUT THEN THEY SAY THE EXCEPTION PROVES THE RULE !
La réalisation technique est par contre assez soignée. Dès les premiers écrans de présentation (eh oui, il y en a plusieurs !), on s’aperçoit que le jeu est résolument orienté spectacle, épousant ainsi le concept de divertissement sportif, fondateur de la WWF.
On a notamment droit à un plan montrant, de hauteur, un ring entouré d’une foule dense (bon, un amas de pixels colorisés en fait, mais l’effort est notable) et surplombé d’un écran géant annonçant le titre du jeu ; on a vu bien pire sur Amstrad !
Ensuite vient le tour de la présentation des 3 persos gentils, avec listing de leurs caractéristiques : poids, date et lieu de naissance, principale qualité (courage infaillible pour Hulk, monstrueux corps d’athlète pour le Bulldog…), prise de fabrique et même catch phrase (réplique culte) ! Bon, à noter que les prises favorites ont été adaptées pour les besoins du jeu, en fonction des possibilités. Je n’ai jamais vu Hulk Hogan délivrer un marteau-pilon… en tout cas ça met bien dans l’ambiance tout ça !!
Toujours dans l’optique de faire chauffer la sauce, on a droit à des échanges de politesses verbales entre les 2 catcheurs avant leur combat ! Le vilain commence par vous balancer sa réplique, genre, du Perfect dans le texte : « tu peux être grand, tu peux être fort, mais tu ne seras jamais parfait ! ». Ce à quoi votre lutteur peut répondre parmi 3 répliques au choix. Par exemple, en tant que Guerrier Ultime vous allez lui envoyer : « oui je suis fort, mais le plus grand et fort muscle que je possède est le cœur qui bat grâce à l’amour de tous mes guerriers, ce qui va causer ta perte mon pote ! » et toc ! Si vous trouvez ça un peu culcul, dîtes-vous bien que c’est ça le catch à l’Américaine…
Après le combat, le méchant vous sort la phrase de la victoire, ou bien de la défaite. The Mountie : « tu m’as battu mais à présent tu vas te faire slaughtered (massacrer) ! »
Une seule musique est proposée, au moment de choisir le mode de jeu. Elle est franchement cool mais on l’entend pas beaucoup, c’aurait été bien de la laisser ou d’en mettre une autre pendant la présentation ou le match. Pendant celui-ci on n’entend que le bruit et les effets des prises, ce qui ne rend pas terrible, les sons étant assez métalliques.
L’arène de combat est sobre ; on ne voit que le ring (sans arbitre), et l’extérieur bas du ring (sur lequel on pourra se déplacer). Le reste est vide ; on ne voit pas la foule ni de commentateurs. Cela dit les graphismes sont plutôt pas mal (ring et persos) pour de l’Amstrad. L’animation des lutteurs est plutôt bonne, notamment lorsqu’ils effectuent leur prise spéciale (toutes assez spectaculaires), parfois face à nous, comme le Guerrier Ultime soulevant son infortuné adversaire à bras levés. On les voit aussi grimacer d’efforts lorsqu’ils nouent un contact, c’est très bien fait.
Le jeu s’avère très difficile. Surtout en raison d’un gameplay un peu défaillant, et de commandes ardues à maîtriser. Sur Amstrad je suis parvenu au boss de fin, Slaughter, sans réussir à le vaincre ; sur mon PC, je n’ai même plus réussi à battre le premier perso…
Bon en fait, il y a moyen de s’en sortir avec une stratégie de tafiole, si vous me passez l’expression, en refusant le combat au corps-à-corps. Non seulement ce n’est pas classe, mais en plus faut vraiment avoir le timing parfait.
RÉSUMÉ
WWF Wrestlemania est un jeu de catch correct sur Amstrad. Il faut dire qu’il est l’un des 2 seuls avec Wrestling Superstars, sorti encore plus tard (93), et qui ne possède pas la licence WWF. S’il n’est pas exempt de faiblesses côté gameplay, sa réalisation soignée et le charisme des lutteurs (parmi les plus grands et populaires de l’histoire) pourraient lui faire mériter le détour. Il est toutefois un peu trop difficile, et sa durée de vie est bien faible. Et puis surtout, le jeu est sorti beaucoup trop tardivement. À peine dans les bacs, il était déjà de loin surpassé par des jeux NES tels que Pro Wrestling (de 86 !), à une période où l’Amstrad et les ordis concurrents étaient en train de rendre leur dernier souffle. Dire que 1991 est aussi l’année de sortie d’un Super Fire Pro Wrestling, au moins 100 fois supérieur…
Plus : très bonne présentation, animation pendant et entre les combats, une belle ambiance, des personnages très charismatiques, tant les gentils que les méchants. Et surtout, le seul jeu de catch disponible sur CPC en 91.
Moins : gameplay, trop grande difficulté, prises limitées, absence de musique pendant le combat, durée de vie faible, jeux similaires sur autres supports bien meilleurs.
Je note généreusement 6,5/10, arrondi à 7 pour la rareté du genre sur CPC (mais sur NES ça serait 2,5).
En vidéo : http://www.youtube.com/watch?v=-nuOMWDKzo4