Probablement connaissez-vous déjà cette célèbre série de jeux de stratégie aux nombreuses suites sur PC. C’est pourtant sur Amiga qu’elle a commencée, réalisée par Blue Byte, éditeur également connu pour les Great Courts.
Settlers se passe dans un univers médiéval où plusieurs royaumes vont devoir s’affronter. Le jeu propose de jouer un simple scénario contre le nombre d’opposants voulu, lesquels peuvent être configurés pour être plus ou moins agressifs. Mais on peut également suivre une campagne qui est en fait une succession de scénarios à la difficulté croissante.
Plus qu’un jeu de stratégie, Settlers est avant tout orienté sur la gestion de l’espace et des ressources. Les joueurs commencent avec un simple château, en fait leur capitale. Perdre ce château signifie immanquablement la perte de la partie, aussi est-il capital de le protéger, en gardant à l’esprit que l’objectif est de raser celui des adversaires.
Avant tout, produire et acheminer la production
Pour pouvoir vous étendre, il vous faudra bien sûr des ressources. Et pour produire des ressources, il faut des structures, lesquelles nécessitent elles-mêmes certaines ressources pour être construites et pour pouvoir fonctionner! Ces structures doivent aussi être reliées entre elles par route, afin de permettre le transfert des marchandises vers le château ou vers l’entrepôt le plus proche. Par ailleurs, on ne peut construire que dans les limites de ses frontières, lesquelles sont définies par la présence de bâtiments militaires. Certaines structures, plus grandes que les autres, nécessitent plus d’espace, un espace d’autant plus difficile à trouver que le terrain est accidenté. Ceci vous laisse deviner combien il est important de gérer son territoire avec parcimonie!
La grande force de Settlers vient de la nécessité de gérer le mieux possible les voies d’acheminement des ressources. En effet, en traçant une route, il faut bien entendu tenir compte du relief : un travailleur aura plus de mal à tirer ses planches de bois sur une route qui monte beaucoup que sur une route plate! Par ailleurs, certaines ressources ne peuvent être utilisées « brutes ». Ainsi, le blé seul ne sert à rien. Pour être utilisable, il faut le moudre dans un moulin, puis le transformer en pain dans la boulangerie, avant que celui-ci ne soit entreposé. Mieux vaut alors que la ferme, le moulin et la boulangerie soient proches les uns des autres et que tant qu’à faire, les routes qu’empruntent les ressources vers ces bâtiments soient employées le moins possible à d’autres effets, sinon ça bouchonne! Comme on l’a dit aussi, les structures ont besoin de ressources pour fonctionner : un mineur ne travaillera pas s’il ne reçoit pas de nourriture et le forgeron ne fabriquera pas d’arme sans fer et sans charbon. La clef du succès dans Settlers est donc un réseau de routes efficace, d’où la nécessité de planifier ses constructions pour que les voies d’accès soient le moins saturées possible.
Les ressources étant nombreuses, les différents bâtiments possibles le sont également. Ainsi, pour le travail du bois, vous devrez disposer d’une cabane de bûcheron ainsi que d’une scierie. Un garde-champêtre pour sa part replantera des arbres. Les carrières de pierre à ciel ouvert peuvent être exploitées en plaçant une maison de tailleur de pierre. Comme évidemment il faudra nourrir tout votre petit monde, trois type de ressources alimentaires peuvent être exploitées : le pain nécessite des fermes, des moulins et des boulangeries. Pour produire de la viande, il vous faut un élevage de porc (nécessitant du grain pour nourrir les cochons) et un abattoir. Si vous avez un accès à la mer ou à un lac, un pêcheur pourra se charger de récupérer des poissons pour peu que vous lui construisiez une cabane au bord de l’eau.
Malgré leur accès difficile, les montagnes permettent d’exploiter de l’or, du fer, du charbon et des pierres (si vous n’avez plus de carrière à ciel ouvert) en construisant des mines. Mieux vaut d’abord envoyer un expert pour savoir si elles proposent des gisements, et lesquels. L’or fondu en lingot vous permettra de payer la solde de vos guerriers (plus ils ont d’or, plus ils seront motivés au combat) et le fer transformé dans une fonderie pourra être acheminé vers le forgeron pour produire des armes ou vers l’artisan pour produire des outils, avec du bois.
Chaque bâtiment nécessite évidemment du bois et des pierres pour être construits, lesquels transitent… par route (on en revient toujours au même problème!). Heureusement, vous pouvez construire des entrepôts afin d’alléger un peu le transit : si une structure est plus proche de celui-ci que du château-fort, les ressources y seront entreposées automatiquement.
Comme dans tout bon jeu de ce type, le joueur a à disposition une foultitude de statistiques lui permettant de se faire une idée de l’efficacité de sa politique d’expansion : carte, graphiques, chiffres de production et de ressources stockées… De même il est possible de paramétrer de nombreux critères afin d’améliorer la productivité dans sa chaque secteur ou de favoriser ceux en difficulté : ainsi peut on définir quelles sont les ressources devant transiter en priorité sur les routes ou comment se passe la répartition des ressources entre les différents bâtiments. Ainsi, si vous ne disposez pas assez d’armes malgré une quantité suffisante de fer et de forgerons, peut-être est-ce une bonne idée d’envoyer moins de fer chez le fabriquant qui s’éclate à produire des pelles inutiles à l’heure actuelle! Tout ces éléments permettent une gestion fine de la production et de son utilisation.
Une gestion militaire en retrait
L’expansion de votre territoire et plus tard la conquête de vos ennemis nécessitent des guerriers, lesquels doivent être logés dans des bâtiments militaires (même si une partie sera en garnison dans votre château, constituant votre garde prétorienne). Ils sont au nombre de trois : avant-poste, garnison et forteresse, par ordre d’importance. Chacune étend les limites de votre territoire (vous ne pouvez pas construire au-delà de vos frontières) et assurent la protection de vos structures. Plus le bâtiment est grand, plus il étend vos frontières et plus il contient d’hommes mais plus il coûte cher à construire. La prise d’un bâtiment militaire par vos ennemis entraîne un retrait de votre frontière et tous vos bâtiments en étant conséquemment exclus sont rasés.
La gestion de votre armée reste assez fine. Vous pourrez ainsi définir le taux d’enrôlement et la répartition des guerriers dans les bâtiments militaires en fonction de leur éloignement avec la frontière : il n’est pas nécessaire qu’un bâtiment au coeur de votre pays soit plein, mais les avant-postes proches d’une frontière ennemie ne doivent pas être en sous-effectif! Par ailleurs, il existe cinq grades de combattants : troufion, 1° classe, lieutenant, général et chevalier. Forcément plus le grade est élevé, plus la capacité au combat l’est également. On aura ainsi soin de relever les gardes en présence dans les avant-postes afin de les envoyer au château pour s’entraîner.
Si la gestion de votre pays est très précise, on en dira malheureusement pas de même des combats. Lancer une attaque consiste simplement à sélectionner le bâtiment militaire ennemi pris pour cible et à sélectionner le nombre de combattants à envoyer, dans la limite de ceux en garnison dans des structures pas trop éloignées. Pour le reste, on attend que les troupes arrivent et on assiste passivement au combat… Prendre simplement un avant-poste reste difficile car l’avantage accordé aux défenseurs est important : il arrive souvent qu’un général soit tué par un simple troufion ce qui est très frustrant… Mieux vaut alors s’attacher à attaquer les structures stratégiquement importantes : comme pour vous, l’ennemi a besoin de gérer son espace. Prendre un avant-poste proche des montagnes lui interdit l’exploitation du gisement d’or qui s’y trouve. Couper une route très usitée mettra l’adversaire en forte difficulté, surtout si c’est la seule route disponible pour certaines de ses marchandises! Autant le dire, le combat contre le château-fort ennemi est très long (beaucoup trop) et nécessite beaucoup d’hommes, car il est forcément le mieux protégé des bâtiments militaires.
Une belle réalisation
Même s’il n’exploite pas l’AGA, Settlers est très joli : les graphismes sont hauts en couleurs et les bâtiments sont bien détaillés. De nombreuses animations rehaussent le jeu sur le plan visuel et on est étonné de voir tout ce petit monde s’animer : ici un porteur s’échine à acheminer un lourd sac de houille, là un cochon dans une ferme se roule joyeusement dans la terre, ailleurs un pêcheur lance sa ligne dans un lac… La version Amiga n’a pas grand chose à envier à la version PC. Et au niveau sonore, l’Amiga prend même largement le dessus, avec une musique d’excellente qualité (là où une Sound Blaster 16 se permettait de restituer d’immondes crachouillis) et des sons suffisamment convaincants. L’interface n’est pas trop compliquée, même si elle nécessite un certain temps d’apprentissage. On accède à toutes les options en trois clics au maximum et on ne passe pas son temps devant des tableaux pleins de chiffres. Les parties sont longues et la campagne offre une bonne durée de vie avec un nombre de scénario conséquents et une difficulté progressive. Autre élément très agréable, la possibilité de jouer à deux en écran splitté, ce qui est rare. Même si le jeu a tendance à ralentir et si l’espace visible des joueurs est restreint, jouer à deux à Settlers est vraiment très amusant.
Settlers est donc un excellent jeu de gestion qui ravira tous les amoureux du genre, notamment grâce à la gestion de l’acheminement des ressources, ce qui est assez original. La réalisation est très soignée et le jeu à deux augmente une durée de vie déjà conséquente. Il est dommage que l’aspect stratégique soit autant en repli par rapport au reste mais Settlers est une valeur sûre!
Configuration de test : 68ECO20, AGA, 2Mo de RAM
CAPS : 143